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Priez pour vous
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 Article publié le 31 mai 2015.

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Je n’ai pas la foi, heureusement. L’aurais-je, que je vivrais avec la peur constante de la perdre. Ainsi, loin de m’aider, ne ferait-elle que me nuire. Emil Cioran.

 

Je ne suis pas de ceux qu’on ferre

De ceux qui suivent les suiveurs

Dans ce monde qui légifère

Priez pour vous c’est votre affaire

Je n’ai pas besoin de sauveur

 

J’en ai ma claque de vos cliques

Assujetties à l’angélus

A la simplicité biblique

A l’hosanna à la colique

De miséréré aux calus

 

Sont-ce là-bas les trois rois mages

Chargés comme leurs bourricots

De tapis d’encens de ramages

De myrrhe de fruits de fromages

De sel de drap de calicot

 

Je vois les douze doux apôtres

Qui s’en reviennent de Cana

Pleins de vin de soupe d’épeautre

Je n’ai qu’une peautre et qu’un peautre

Je vends ana et almanachs

 

Sous l’orme j’attends le messie

Les arondes sont de retour

J’ai mon calame ma vessie

D’encre ma lanterne noircie

Il a dû prendre des détours

 

Priez vos dieux priez vos maîtres

Je vis et je meurs ici-bas

Je ne suis pas qu’un forge-mètre

Qui veut tous les péchés commettre

La plume et la lance au combat

 

Priez pour vous âmes bâtées

Ames confites en douleurs

Têtes de nœud décalottées

Bides bénits foule hébétée

Madeleines toujours en pleurs

 

Nous nous sommes les infidèles

Les impies les blasphémateurs

Chaque saint brûle ses chandelles

Par les deux bouts putain d’Adèle

J’allume ma pipe d’auteur

 

Dans ma musette j’ai trois poires

Je vais flanqué de deux larrons

Quand l’un a soif l’autre veut boire

Ce sont de vrais larrons en foire

Toujours en quête d’un litron

 

Je ne suis pas de vos croisades

Encor moins de vos au-delà

Pour repousser vos camisades

Je me reverse une rasade

De ce vin blanc de Marsala

 

Je me plais à jouer les Gilles

A tenir des propos cornus

Aux pauvres gens des évangiles

Sommes-nous de la même argile

Jésus, sans doute, est né tout nu

 

Dans mon pays nul n’est prophète

Vous voudriez qu’il en ait un

Votre volonté soit défaite

Encor des lendemains de fête

A mettre en croix un importun

 

Tu n’as plus ta fleur de Marie

Tu as perdu ton capital

Je vois une grotte fleurie

Un charpentier qui te marie

C’est écrit là dans le cristal

 

Descendez si cela vous chante

De votre Eve et de votre Adam

De leurs amourettes touchantes

Les occasions sont alléchantes

Croquez la pomme à pleines dents

 

Etes-vous là pour faire nombre

Dans ces ramas d’illuminés

Qui patrouillent dans nos décombres

Qui de plus en plus nous encombrent 

D’espoirs de péchés pardonnés

 

Que font ces oiseaux dans ma rue

Leurs grands moignons d’aile engourdis

Sont-ce là mes coquecigrues

Qui se nourrissent de morue

Ainsi que tous les vendredis

 

Que mes disciples se dispersent

Dès que je n’ai plus besoin d’eux

J’aurai toujours un foudre en perce

Et ma garce aux mirettes perses

Est prête à leur frire cent œufs

 

Ma porte n’est fermée qu’au pêne

Toc toc Je suis parfois devin

Les traits d’esprit je les empenne

Pour si peu ce n’est pas la peine

D’aller déranger le Divin

 

Les clochers sonnent la male heure

Ce n’est certes pas rassurant 

Vous voyez des statues qui pleurent

Mais peut-être que l’on vous leurre

Dans ce vieux monde d’obscurants 

 

Mettons pour voir dans la balance

D’un côté les nantis les oints

Ceux qui vivent dans l’opulence

De l’autre réduits au silence

Ceux qui crèvent dans le besoin

 

Que voulez-vous que je vous racle

Sur mon rebec d’un autre temps

Les cordes tiennent du miracle

J’y ressuscite des oracles

Des cantilènes de Satan

 

La vieillesse me défigure

Irai-je jusqu’au dénuement

Mon corbeau de mauvais augure

A de plus en plus d’envergure

Je romance des dénouements

 

Je vois en songe ma Provence

Ses fruits ses fleurs mes deux cyprès

Nos esclandres de connivence

Une fontaine de Jouvence

Tous ceux qui me touchaient de près

 

Je vois les yeux qui m’ont vu naître

Des fées penchées sur mon berceau

Des gabians sur les fenêtres

Des vieux qui croient me reconnaître

Un enfant qui pousse un cerceau

 

Je vois la mer qui se disloque

Mon beau navire chavirant

Un vagant gris qui soliloque

Je m’accroche à des pendeloques

Dans les jambes de mère-grand

 

Otez-moi de vos litanies

Je sépare à mon rythme au mas

Le bon grain de la zizanie

Et vous laisse aux christophanies

Sur les chemins creux de Damas

 

Je n’ois foutaise ou pas foutaise

Les bibles ni les alcorans

Ni les torahs j’en suis fort aise

Je ferme ici la parenthèse

Je retourne à Emil Cioran

 

Je ne suis pas de ceux qu’on ferre

De ceux qui suivent les suiveurs

Dans ce monde qui légifère

Priez pour vous c’est votre affaire

Je n’ai pas besoin de sauveur

 

Robert VITTON, 2015

 

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