Qu’avons-nous à dire aux fantômes
Qui nous visitent depuis six ans ?
Depuis six ans nous répétons les mêmes mots
De fêlure et d’angoisse,
Nous psalmodions les mêmes récitatifs
En espérant que reviennent nos disparus
Avec les gerbes de la récolte de l’espoir.
Nous qui semons dans les larmes
Depuis la nuit des temps,
Nous sommes la multitude perdue
Dans la géographie de l’absurde,
Nos cris sont des corps mutilés
Dans le vide de l’histoire.
Le monde s’est penché sur notre douleur
Le temps d’une stupeur ou d’une humanité,
Puis nous a laissés dans l’abîme angoissant de l’oubli.
Nous n’avons rien oublié :
Notre mémoire est un long tunnel où déambule
Un peuple fragmenté dans sa propre solitude.
Pourtant,
Nous poursuivons notre marche vers le rêve
Avec la posture altière de nos palmiers,
Défiant la tristesse et la désespérance,
Bravant la mort jusqu’à la déraison.
Depuis six ans nous errons dans l’absence,
Tourbillon d’écume sur le rivage de la folie,
En quête de la vie,
Car nous savons qu’entre la douleur et le chant,
Le temps viendra
Où toute chose,
Où toute nuit,
Où tout être
Entrera dans la lumière
Pour l’avènement d’un jour de résurrection.