|
Navigation | ||
Séries spectrales et autres accidents
La dictature tonale
[E-mail] Article publié le 9 octobre 2016. oOo La lutte contre ce qu’on peut appeler, sans risque d’exagération, la dictature tonale, est menée avec efficacité par toutes sortes d’acteurs dont certains apportent des contributions proprement miraculeuses. Mon fer à repasser, par exemple. Tout a commencé pour lui par une mauvaise chute qui a vraisemblablement endommagé son réservoir d’eau. Il est toujours possible de projeter de la vapeur à bout portant sur le vêtement que vous repassez. Mais le jet d’eau est proscrit, comme s’il s’assimilait lui-même à une notion de « retour à la tonalité ». Pour les chemises, il faut convenir que c’est parfois peu pratique. Mais au titre de l’expérience acoustique, la longue déglutition irrationnelle que semble tenter d’opérer, en un effort sans cesse renouvelé, le mécanisme de propulsion de l’eau portée à ébullition, engendre une séquence sonore où se combinent un fantôme de sifflement et un son continu qui ressemble au bruit que ferait un homme qui se gargariserait sans trêve de longues minutes durant. On n’a jamais entendu ça. Mes voisins se demandent sûrement si je suis entré en communication avec une civilisation extraterrestre (d’autant que j’écoute souvent des disques du groupe de heavy metal conceptuel, Blue Oyster Cult. Moi, je me pose la même question. Et j’imagine un ingénieur de l’IRCAM devant mon fer à repasser. Je l’ai enregistré, d’ailleurs. Ce fer à repasser est devenu, dans mon intuition matinale, l’avenir de la musique, même. Une synthèse qu’aucune informatique n’aurait pu assister, à l’origine. Je compte sur les techniciens de l’IRCAM. Mais sur le coup, je n’en ai parlé à personne. Ma chemise était (mal) repassée. |
Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs | [Contact e-mail] |