Retour à la RALM Revue d'Art et de Littérature, Musique - Auteurs invités [Forum] [Contact e-mail]
AUTEURS INVITÉS
Depuis avril 2004,
date de la création
du premier numéro
de la RALM.
Commencement
Navigation
[E-mail]
 Article publié le 15 novembre 2006.

oOo

De la supériorité de la femme sur l’homme, sans machisme aucun.

Elle-même au début, ne s’était aperçue de rien, avait ignoré la première rencontre. Tout s’était produit à son corps défendant. Le changement initial s’était opéré si insidieusement qu’elle n’avait pas éprouvé la plus petite sensation, le moindre petit frisson qui parfois préviennent, pas plus que n’avait soufflé en elle l’arrière arrière pensée qui provoque une question nouvelle. Rien qui soit palpable. 

On aurait pu comparer cette absence de conscience à la première journée qui s’étire après l’hiver et qui nous échappe, ou à ce champ ensemencé que l’œil voit de terre puis vert pâle au regard suivant, sans que le cerveau ait saisi l’étape au cours de laquelle s’enracine la plante pour oser sa première ascension vers la lumière.
Elle n’avait pas changé quoi que ce soit dans ses habitudes. Elle dormait, mangeait, plaisantait, travaillait comme si de rien n’était. Elle songeait le soir à ce qu’il fallait rapporter à l’appartement. Elle papillonnait, toujours pieds nus sur la moquette, tantôt rêvant sur des fils de grands silences, tantôt reprenant scrupuleusement les notes de sa thèse sur « L’engagement du poète René Char dans l’écriture et dans la Résistance : similitude ou contradiction ». Elle aimait à se contempler nue après la douche, satisfaite de sa psyché - délicat miroir ovale déniché dans une brocante, cerclé d’un vieux bois de chêne qu’elle avait seule décapé puis verni, façon toute personnelle de glisser une part d’elle-même dans les reflets d’en face - elle aimait à démêler soigneusement ses longs cheveux bouclés et souriait en pensant à son petit ami.
La lecture du soir (inexplicable adoration pour Agata Christie) restait le dérivatif de prédilection, celui qui permet de se lover dans le canapé et de sentir le sommeil s’emparer du corps : les membres jaillissent parfois de leur torpeur, secoués d’une décharge électrique imprévisible ; les muscles de la bouche se relâchent imperceptiblement... alors même la plus belle des filles perd la grâce naturelle de son visage, réveillée par un filet de bave s’échappant de ses lèvres entrouvertes. Il faudrait perdre cette habitude lorsqu’ils vivraient ensemble. Les jours s’étiraient dans un ronronnement de chatte bienheureuse.

La division cellulaire à l’intérieur de son corps se multipliait pourtant depuis une semaine. Son organisme se modifiait à une vitesse insoupçonnée. La nature y dirigeait de pharaoniques travaux mais elle n’en devinait rien, habituée à ses vingt-quatre ans d’insouciance insolente.

J-M Bollinger Sensations de procréation non perçues(octobre 2006)

 

Un commentaire, une critique...?
modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides. Servez-vous de la barre d'outils ci-dessous pour la mise en forme.

Ajouter un document

Retour à la RALM Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs [Contact e-mail]
2004/2024 Revue d'art et de littérature, musique

publiée par Patrick Cintas - pcintas@ral-m.com - 06 62 37 88 76

Copyrights: - Le site: © Patrick CINTAS (webmaster). - Textes, images, musiques: © Les auteurs

 

- Dépôt légal: ISSN 2274-0457 -

- Hébergement: infomaniak.ch -