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Article publié le 11 avril 2007. oOo
Atelier de Rodica DRAGHINCESCU
Michel MELLET Le mois prochain : Anita RUTILI
GOUTTE DE ROC
Voyager à l’infini Affronter des tempêtes sans frémir Se ruer vers l’aventure, se battre à volonté Echapper à son destin Etre Simbad le marin
Apercevoir une côte inconnue, rêvée Avancer dans ses chaudes eaux turquoises et poivrées Se frayer un chemin entre les pétales anacardiennes A la cadence molle des vagues Aborder le paradis espéré Avoir sa récompense
Vivre dôlement, manger goulûment, boire à en tomber Se perdre dans les voluptés, S’engloutir dans des bras noirs et soyeux Se noyer dans des cons profonds Les faire suinter et rougir de plaisir Etre ses compagnons de félicité
Palabrer sans fin, parler pour ne rien dire Parler à en oublier de parler Dormir son soul Savourer son plaisir Se réveiller sous une ombre Courir fous de terreur Redevenir ses compagnons d’infortune
Voir le Rukh, voir l’oiseau-roc Admettre l’inimaginable Enfoncer ses ongles dans le désespoir Voir dépecer, avaler l’impensable Ne pas mourir ; vivre Imaginer le pire et se rebeller
Se battre, se défendre Exacerber ses sens Deviner la parade La créer, la bâtir, la terminer, viser Rester englué par la peur puis tirer.
Amalgamer le métal à la chair, la percer Voir l’exsudation du cœur fondre le trait Lentement, lentement, creuser son sillon Fumant et rouge sur la poitrine Brûler les pattes et enfin tomber Lave geignante au milieu des fleurs Les roussir, les fondre Et éructer son panache sulfureux Sous un ciel impassible, de marbre, Avant de reprendre son périple.
HAYANGE EN NOVEMBRE
Une flamme bleue ouvre sur la ville. Reine des métamorphoses démesurées Elle claque son oriflamme dans un vent De soufre sous un ciel de plomb.
Au-dessus d’un océan de dépouilles Patural règne de son feu éternel. Les toits en dent de scie sculptent l’horizon Des grands ensembles, aveugles de trop d’yeux fermés. La Cité aligne quelques maisons brunies Le long de serpents brillants d’être laminés.
Sur le bitume de la transhumance journalière, Dans le lointain, la pluie fait chanter sa présence. Les grands bureaux, borgnes, imitent le Château Tandis que le marbre de la place estompe ses bâtiments. Saint Martin égrène ses tempos assourdis par le froid, Saint Nicolas se retient de tendre les bras à la Vierge, Sous un ciel lourd de goudrons avalant les collines.
La petite Chapelle qui se meurt de ses morts oubliés, De son écran de verdure, surveille les vivants Gourmande de leur nombre et de leur vie. Les jardins cerclés de bois et de fers montent, Partent à l’assaut du Plateau décharné.
Un ruban de fer transperce la ville, la viole. Ahanant sous la charge, les diesels éructent. La barrière piège de gros cafards multicolores Bloque des insectes, en masses sombres, Sur le macadam brillant d’être foulé aux pieds.
La plaine de l’ouest, cernée d’entrepôts gris, Rassemble les serpents de fer au sortir d’épaves. Un soleil plaque ses feux avares sur un toit, Blesse l’œil d’un morceau de lumière vite cassée, Eclabousse d’un sang délavé des nuages épars.
PROFESSEURE
Il y a fort longtemps, d’un pays éloigné, Visage de sphinx impavide, concentré Est venue une femme égratignée Dispenser son art par nos contrées.
Dure est la tâche, ingrats les élèves. Son visage s’allonge sous la vigilance Sa grâce se clôt et l’ennui prélève Sa quote-part de soleil et d’insouciance.
Dès Gargantua absent, perce la Lionne, Les joues se relèvent, les lèvres turgescent, L’œil étincelle puis la voix friponne Ordonne, affirme et toujours professe.
Lors, les élèves secouent leurs chefs. Sont poètes, écrivains et publiés, Voyant s’ouvrir les lucarnes, derechef, D’un avenir glorieux une fois édités.
Fusent les manuscrits et éclatent les rires. L’œil se fait rieur, sa pensée pétillante. Druidesse, princesse désengourdie, Saturée de vies ensorcelantes...
Jusqu’au retour de Gargantua.
(RE)NAISSANCE
Votre Roi argenté vous a conduit à la mort Vous avez brûlé vos bois et votre air s’est réchauffé Votre eau s’est dépeuplée et a scellé votre sort Vous avez détruit votre terre et elle s’est vengée
Faces creuses, yeux sans pupilles, cerveaux vides Vous persistez à l’adorer, son maelström vous engloutit Faces repues, ventres distendus, entrailles putrides Vous trahissez vos enfants aux espérances étourdies
Ils sont venus les Côtes d’os. Vous ont submergés Sculptant dans vos chairs leurs désirs inassouvis Ils sont vos éphémères héritiers, pas ceux espérés Sculptant avec vos chairs des lendemains rougis
Ils sont venus les Côtes d’os à cheval sur les tornades, Déformants d’hystérie vos femmes, troussant leurs cottes. Ils sont venus les Camards, riches de monades, Ondulants depuis les cimes coupantes d’un ciel zélote/Ondulants depuis un ciel aux cimes ilotes
Puis plus rien
Un peuple minéral recouvre votre monde Talque vos routes, vos villes et vos tombes Les feuilles sont poussières, le bois pierre/sombre L’air soufre, l’eau croupie, la terre tombe
Puis JE suis venu
Pour vous, j’ai planté des champs de blés Pour vous, j’ai assouvi la faim de vos villes Pour vous, j’ai abreuvé la soif de vos canaux Pour vous, j’ai recréé un monde de vie.
Jamais les soleils ne s’éteignent sur mes terres. Des planètes neuves sont miennes. Je vous rajeunis de mondes naissants et fier. Je serais le dispensateur de vos félicités.
Mes forêts raniment votre atmosphère. Mes fleuves font fleurir vos averses. Mes océans alevinent vos eaux vertes. Mon air rafraîchit à jamais vos déserts.
Vos yeux troués se sont levés sur le ciel. Vos bouches sans dents se sont raffermies. Vos mains percées cicatrisent et s’emplissent. /se referment Vos lèvres asséchées se désaltèrent.
Il était temps. Mais JE suis venu. Michel MELLET |
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