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Article publié le 14 septembre 2007. oOo Tout ça pour ça
Inclinant la tête D’un acquiescement sordide Tout se règle et se fige Entrelacs de rues Que le regard expulse Au loin. Le feu du Sud qui brisa les lignes Faites d’œillades magnanimes Au lendemain du pacte Avec le diable.
Un instantané. Les clichés ne sont plus légion Ombres dont maints tissus Polaroïd Expirent à même la lucarne Saisir l’image qui fuit Insaisissable est le temps du soupir Captation ouatée Jusqu’aux bourrelets du souvenir Canon qui tranche le rire d’enfants
Pauvre pellicule sans vacarme ! _______________________________________
Pour qui s’abreuva du Sud Les cigales se sont tues Fuyant le sirocco Implorant le zéphyr
Nous vîmes de quoi tenir Nos limites ; peut-être bien nos ressacs Infestés d’Occident Triste éboulis de nos parois vitales
Pas un ne s’avisa Se pénétrant de sueurs putrides Se corrompant se tailladant Tous semblablement À une file de ravitaillement Puis à une procession mortuaire Où chacun joue au cadavre délétère
Tous ont beau jeu D’Apôtres adventices Plantes d’un dieu Habillé de joie factice D’une seule voix hurlant À s’arracher la gorge : « Vive la France !! Vive la France ! Les Arabes dehors ! » Sieur Mokhtar Seigneur du Rire Te souvient-il de ce champ de ruine ? Tout ça pour ça…
Il en vient ce poulbot D’Hussein Dey à Palestro Qui prêta sermon En riant aux éclats Une carte de séjour tatouée Sur son ventre tout plat Qui jurait la main sur le cœur Des fautes d’orthographe Il tissera un chapelet vengeur Qui jurerait sur sa mère… Qui jurerait sur le Livre…
Que ne lui sourit Marseille Sous la houle jalouse ! L’empreinte de ses soifs à jamais Indélébile.
Quand il s’avança vers elle Le long de la rue d’Isly Il bomba le torse Pour rutiler ses plaies De danseur malhabile Des syllabes de la vertu Il fit cette crâne entorse :
« Mademoiselle moi je traverse bientôt ! » Déjà le bateau poète Circule en ses saillantes veines
« Je pars pour t’emmener un jour, Mademoiselle » Dit-il au hasard Un bout du territoire à venir Qu’il croit conquérir Sur le corps de la Muse Dévoilée puis dévoyée
Telle une déclaration d’amour Sur une carte géographique Il lui fredonna Une mélopée marine Évoqua Marseille, Un orgasme dans la voix « Pardon, suis-je donc un beau parti ? » Dit-il au hasard Tout ça pour ça…
Bouts de dialogue crépusculaire Tant que deux gars discutent ferme : « - C’est le type à la Safrane année 2000 Série II - Non, non celui à la Mercedes rouge Aux déflecteurs bleus (Vent quand tu nous tiens !) - Diable, le Mercedes rouge l’a vendue, C’est sûrement le Golf GTI 16 soupapes Qui ne salue jamais ! - Mais que mille fois NON - SI. SI. » Signes distinctifs Signes de démarcation Empreintes digitales Signe des temps Quand les hommes en ce pays Deviennent des Mer…des Saf et des Gol Ce Sud qui déborde ; Grand Guignol Quand la parole est déjà excès D’elle-même Tout ça pour ça… ______________________________________________
Même de guerre lasse Ne s’accouplent Les vents contraires On racontait naguère Que le Kabyle est fier Normal Aârab, il n’est point Normal « Puisque je ne suis pas terroriste. » Dit-il au hasard
Combien l’ont-ils entendu Menaçant, fanfaronnant « Imazighen ! Imazighen ! A Naraz Wala N’aknou »
Amazigh n’aime pas Aârab Mais il n’est pas raciste ! Amazigh, en rêvant À Rome, Confond Jugurtha Ses geôliers et Marius
En rêvant à Rome Amazigh est une Idée Une Éthique Une marque de fabrique Dit-il au hasard
Que ne l’avez-vous entendu Se livrer à ce jeu immonde : Amrabeth, Akbayli, Ahari, Expurgé de ses Aklane, Sauvé de ses Izoukar ! De ses 33 tours… A Naraz Wala N’aknou
Amazigh n’est pas raciste Lui qui du sang est si pur Qui se rêve Malouin Peut-être Basque Ou illusionniste
Amazigh exhibe souvent Sa peau de timonier grec Toi El-babour, Ménage-le. Sur le Vieux Port Rends-le à sa pureté originelle
Pardon notre Bonne-Mère Qui ne se reconnaît qu’en Zizou __________________________________________
Passa le temps D’aucuns jureront Qu’il chuchotait la romance Aux Suédoises de passage. Beaubourg et son lacis De tuyaux à donner le tournis Cueillir la rose par le mensonge Voici donc sans trahir L’esprit de ce qui s’y est dit : « I am not Arab, hein ? Toi, pas confondre moi Avec eux ! » Dit-il à chacune à tour de rôle
Appelez-le plutôt Amazigh Célébrez-le En homme libre Libre de tout Libre de haïr « A Naraz Wala N’aknou ! » Leur dit-il au hasard
Ô Jean-Marie sur les cimes Du mont Djurdjura ! Tout ça pour ça…
Tout ça pour ça…
Retour de voyage. Ce poème est une photographie, non un cliché, d’une Algérie telle qu’en elle-même : obscure et flamboyante ; fière et envieuse. Aux lendemains de la sanglante décennie 90, chacun de compter tout à la fois ses morts et ses chances de pouvoir quitter le bateau à l’égard duquel la méfiance déborde. Ce poème se veut aussi un instantané de la réalité de la réalité d’un certain mal kabyle.
Kansas City, Août 2007 |
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