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Article publié le 27 septembre 2020. oOo Et plane sur les eaux mortes le narrateur omniscient. Buse, aigle ou simple busard, chouette ou hibou la nuit venue, l’œil vif toujours. Rien à saisir à la surface des eaux mortes, même pas miroir de mondes enfouis dans les vases. Le narrateur se fait alors martin-pêcheur, plonge dans le vif du sujet, explore et les rives et les bas-fonds, mais c’est le pré fauché, le champ retourné qu’il lui faut, corbeau ou pie voleuse qu’il devient alors. Non que la bête multiple, qu’il devient de métamorphose en métamorphose, sache tout à l’avance de ce qui, se déroulant par avance devant lui en un temps record, vient au-devant de lui tel un émissaire envoyé pour conclure une trêve. Il n’y a jamais de trêve, mais deux temps qui se combattent à la vie à la mort. Lorsque le combat prend fin - il le faut bien - deux adversaires se sont entremêlés, se sont mis en boule et déchirés comme deux chats qui margotent. Aucun ne fécondera l’autre, et pour cause. La cause est ailleurs, ignorant tout du combat. Les mots étaient comme des flammes toutes pareilles les unes aux autres, mais nombreuses, si nombreuses que dans le foyer de ses rêves brûlait l’âtre et la forge, la lourde cuisinière et la lampe à pétrole. Né des cendres encore chaudes de son Dire, le narrateur renaît, phénix abasourdi. Tel est l’enjeu toujours en passe de dévorer le proche avenir dans un présent sautillant ; jouer à saute-mouton sur des plages de passé proche, voilà ce qui fait avancer le récit. D’eaux mortes en eaux vives, le récit, mais, à la fin, c’est la terre ferme qu’il habite. Il plane au-dessus des heures durant, puis se pose, meurtre de corbeaux avides. Et foin des rives en ces temps de disette. Au cœur de l’été, c’est l’hiver. Dans l’hiver revenu, paille et foin nous parlent d’un temps fleuri qui n’est plus. Herboriser, que voilà une triste destinée ! Mais, dans l’album défraîchi voici que tout refleurit, envahit la page de ses prés et de ses champs, de ses fourrés et de ses orées. Un bruit d’ailes se fait entendre, et croassent les corbeaux repus.
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