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Mélis éditions - France DELVILLE
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 Article publié le 14 janvier 2008.

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Mélis éditions
France DELVILLE

Etre éditeur est, aujourd’hui, plus courageux que jamais, et l’édition plus que jamais utile à la mise en place d’une éthique planétaire, d’un nouvel humanisme qui seul pourra éviter la guerre totale. Cet humanisme semble être le ton des éditions Melis au fil de ses titres, humanisme aujourd’hui inévitablement empreint de diversité. Et c’est cette diversité qui apparaît dans ce que Luciano Melis présente à la 20e édition du Festival du livre de Mouans Sartoux. Interviewé par Patrick Cintas dans la « Revue d’art et de littérature, musique » (1), il s’en explique : « Notre littérature n’est plus destinée à une élite mais bien à toutes les catégories sociales, elle ne s’éparpille pas pour autant, elle a maintenant plusieurs visages, plusieurs destinées dans un même corps… L’éditeur a un rôle de voyant, n’oublions pas qu’il est situé à la proue des parutions, c’est donc à lui que revient le choix, acte terrible et merveilleux… Je crois que certains éditeurs ont une part de responsabilité dans ce qui se passe aujourd’hui, certaines révolutions sont constructives et permettent à l’homme de se renouveler et, parfois, de se révéler… Ma passion consiste à lire, découvrir, rencontrer, méditer, sentir, aussi. Avoir l’oeil sur demain, sans oublier le présent… ».

Et comme il est admis qu’un homme sans passé n’a pas d’avenir, Luciano Melis est dans une logique imparable lorsqu’il présente « Garibaldi mon héros », écrit par lui-même, pour participer à l’hommage rendu à un constructeur de mondes, et résistant — ce qui va ensemble — pour le bicentenaire de sa naissance, le 4 juillet 1807. « Citoyen de Nice, citoyen du monde », dit Luciano, Victor Hugo affirmait qu’il était « l’homme de la liberté, l’homme de l’humanité ». Et marin dès son jeune âge. Ce qui a peut-être incité les éditions Melis à composer une « Anthologie de la mer » intitulée « Vague à lames », couverture illustrée par la célèbre vague blanche d’écume du célèbre Hokusaï et faisant défiler Artaud, Ben Jelloun, Bonnefoy, Cavafis, Cheddid, Delanoë, Glissant, Guillevic, Maeterlinck, Orizet, Prassinos, Jean d’Arvor, grand-père de PPDA, etc., « …partie de cabotage entre amis, sans chichis, écrit Jean Poncet, juste pour le plaisir d’instants de bonheur, avec illustrations de Misha qui ponctuent les pages de loin en loin, et ont la simplicité suggestive de haïku visuels ». Luciano Melis aime la poésie, mais avec « L’attrapeur de rêve », il permet au poète Jean Orizet de révéler une autre veine, celle du roman fantastique, ou plutôt initiatique, tel que Stevenson, Wilde, Nerval, Maupassant l’ont pratiqué, et peut-être Hermann Hesse, ou Daumal. Mais dans la réalité, les Cheyennes et les Sioux faisaient usage d’une amulette nommée « attrapeur de rêves » (dreamcatcher). Ce qui permet cette précieuse traversée des cultures que j’évoquais, et que l’on retrouve chez Michèle Blachère-Delahaye, avec son « Et tout au bout… », histoire sensible d’un homme qui retourne seul au Cameroun après avoir vécu vingt ans avec son épouse au Sénégal. Repartir, ou partir, voilà la question. Est-il possible de renaître, de naître, grâce à un continent matrice où l’on peut encore, nu dans la forêt, remercier le dieu de la pluie ? Renaître dans les forces que l’Occident a oubliées. Et s’y adonner entièrement cette fois en s’accouplant avec une Africaine, engendrant un petit métis. Ces initiations sont-elles possibles ? Dominique en mourra peut-être, mais l’Afrique qu’il avait cherchée, mort.

Avec Jean-Marie de Morant, et son « Continent des vieux grès rouges », c’est encore un homme parti à la recherche de lui-même, mais qui, hanté par le récit de la Genèse, va aller voir du côté de l’astrophysique, de la paléontologie, etc., ce qu’il en est vraiment du big-bang. « Une exploration aux limites de l’infini qui sera pour lui l’occasion d’un big-bang intime », écrit Alexis Lacroix dans Marianne. « Je crois que le corps, la figure, l’étendue, le mouvement et le lieu ne sont que les fictions de mon esprit », s’écriera-t-il.

Ce qui n’est pas très éloigné de l’oeuvre de Paul Carta, qui fait sortir ses héros de notre espace-temps pour trouver avec ou contre des êtres galactiques des solutions pour le maintien de la vie, et cela à travers ce jeu d’échecs souvent été utilisé comme métaphore d’un combat plus intelligent que la violence pure. « L’échiquier des étoiles » est une plongée dans la technique prodigieusement complexe du jeu d’échecs aussi bien que dans la psychologie de l’individu et celle des grands maîtres, ainsi que l’ont fait Nabokov et Kawabata, avec le jeu de Go cette fois. « Ce livre est français et il va être le best-seller de cette année » et « ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir un tel talent », écrit Okuba Kentaro dans la revue « Europe échecs ».

Autre combat pacifique, contre l’ignorance, est celui de Ratimir Pavlovic, philosophe, poète, critique littéraire, critique scientifique, critique d’art, conférencier, épistémologue, traducteur, et qui, avec les deux tomes de « La pensée créative et scientifique contemporaine », dialogue avec les représentants les plus éminents de la pensée contemporaine, vingt-et-un prix Nobel, et aussi Jean Bernard, Henri Laborit, Henri Meschonnic, Jean-Pierre Faye et son travail essentiel sur le rôle du langage dans les passages à l’acte, du côté du Bien, du côté du Mal, et la notion aujourd’hui de « langage vide », réverbération des langages, vertige… et pourtant le langage qui peut délivrer et reconstruire ! Entretiens divers où l’on découvre encore qu’Antoine Vitez, le génial homme de théâtre, fut aussi traducteur passionné de Mikhaïl Cholokov, prix Nobel de littérature russe qui sut utiliser des documents, journaux intimes, à la manière de Dos Passos, et que cette approche a modifié la vision de Vitez, question du lien entre la grande Histoire et la petite, celle des gens… Les deux tomes de « La pensée créative et scientifique contemporaine » apportent mille surprises de ce genre, et cela au nom de l’amour de la langue française que Pavlovic aimerait voir devenir langue universelle.

Toutes ces oeuvres nécessiteraient des heures d’exégèse, ainsi que toutes les autres présentées par les éditions Melis à Mouans- Sartoux, la place nous manque. Mais, pour mémoire, entre autres : les magnifiques photographies d’Eric Melis illustrant un tout aussi magnifique texte d’André Verdet sur la vallée des Merveilles, « L’enfant du lac », de Francis Ryck, poème cruel sur la fin de l’enfance lorsque se dévoile la société sous forme de crime, et « La maison abandonnée » de Béatrice Bonhomme, poignante méditation sur ce qui s’effrite, mais fait naître « une nuit intemporelle ventrue d’étoiles et de mémoires », où les oiseaux apportent une nouvelle vie, signée sur le ciel, et que Christine Charles sait faire apparaître au sein de toutes les salissures, comme insistance.

 

France DELVILLE

Article paru dans Le patriote


1 - Lire cet entretien ici.

Avec Jean ORIZET et Ratimir PAVLOVIC - Photo DR Claire Garate

 

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