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Et d'or la parole en éveil
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 Article publié le 13 février 2022.

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De par le silence

Dans le creux de la vague

 

Yeux brillent de mille feux au firmament de minuit

Dans ta chair instable

 

Ne peux mieux dire à l’instant

Oubli de l’oubli jeté dans la fournaise des mots les plus recherchés

 

Nappes phréatiques-frénétiques bouillonnent dans les entrailles de la terre

Jaillissent çà et là en geysers, déserts soufrés, solfatares et fumerolles

 

Achevant de donner à ce spectacle de désolation l’aspect d’une oasis

De feu gluant suant le soufre, lentes concrétions jaunes acides 

 

Rongent-dévorent le minéral enclin au silence, sulfureuse présence

Des mots indigènes recrachés par ces bouches en feu en instance

 

Ceux-là rattroupent la meute errante

Des silences meurtriers, les convoquent

 

Aux assises du langage, impossible amnistie

Puise dans les ressources du dit langage la force d’aimer

 

D’autres lieux, d’autres paysages dans le voisinage

Desquels les baladins sublimes véhiculent paroles toniques et folles musiques

 

De village en village, et villes florissantes bourgeonnent à rebours

Fomentent les révoltes étales comme autant de taches de gras

 

Sur l’étole de la prêtraille qui dépenaillée s’égaille,

Aube endimanchée s’ébroue au sommet de la longue colline, brandit le caducée des forêts

 

A même le massif de la Serre, et le cerf s’avance dans sa royauté ensanglantée

Chiens étripés, chasseurs suréquipés éventrés, eaux des sources cristallines rosissent

 

Ainsi du silence, vague après vague

Sur la grève rejeté, poulpe mort, varech décomposé 

 

Jamais tu ne foules les fougères

Dolines s’y trouvent, béantes dans l’hiver affamé

 

Neige panse les blessures de la terre

Puis fond-ruisselle dans ses failles

 

Sources vives enflent alors et gazouillent

Alentour se dressent les épicéas, vigiles des lieux

 

Eparses les forces

Qu’un temps le poème rassemble

 

Qu’en-deçà des silences se prépare sous les terres fracturées

Un grondement de tonnerre. Poète en affine les plus infimes vibrations

 

Y jette une poignée de soleil, embrase une brassée de mots

Arrachés aux silences entés sur tant et tant de créatures innocentes enfin délivrées

 

Affidées aux fûts si droits les ombres transversales tournent avec le soleil

Proche et lointain convolent en des épousailles renouvelées

 

Sous l’œil avisé d’aèdes assemblés passant l’un après l’autre

Sous la solive d’expiation dans les parages de laquelle enfle une rumeur de mer

 

Un bras de mer, soudain, te parvient jusqu’au cœur des forêts

Parties à l’assaut des voraces falaises, toutes lettres de créance envolées

 

Mouettes deviennent songeuses, strient de leur cris l’azur laiteux

Plongent en vagues nombreuses dans la mer houleuse

 

Temps vrillé tourne en toupie folle au fond de la reculée

De par le silence éparpillé vagues à nouveau se déchaînent

 

Redonne du grain moudre aux moulins à aube d’autrefois

Vagues d’embruns et d’aiguilles de pins embaument l’air chaud de ta demeure,

 

Amie poétesse aux mille mots brassés de jouvence, dans le froid hivernal 

Tu instilles un sourire printanier, alentour partout fleurit

 

Primevères abondent dans ton jardin proche, si proche de la forêt,

Notre mère à tous et à toutes qui allions le bâtir et l’habiter sur les terres de rencontre

 

Et bras de mer enlace les iles nombreuses

De ta parole en archipel

 

Singulières étraves que tes mots qui fendent l’écume de navires jadis passant,

Les innombrables, pris à présent dans les sillons écumants de ton plaisir à dire

 

Ce qui aussi se trame dans les nuées, les roches éboulées, la fuite d’une biche

A l’orée du bois, sur un chemin de campagne et les prés fleuris jalonnés de puissants noyers 

 

Ambre sur la grève gît roulée par les flots apaisés

Et voyage de mains en mains jusqu’aux cous de belles demeurées fidèles

 

A la parole donnée, ainsi lient dans une gerbe de mots

Le souvenir de l’aimé emporté par le flot des épées

 

Epis de blé mûr en gerbes bientôt liés ondulent sous le vent délié

Non loin, dès lors, clairière ravive une flamme dans tes yeux que tu avais bleus

 

Roches grises et châtaigniers, verdure et sable blond, tes complices,

Prêtent à tes yeux de cette vigueur nouvelle qui appelle toutes les nuances

 

Par lesquelles, ni anciennes ni nouvelles, tes racines marchent dans le ciel

Elisent aussi bien un havre de paix qu’un champ de bataille, loin de toute logomachie

 

Là où ici et maintenant se rejoignent en un point toujours fuyant, sable coule

Entre tes doigts poing fermé, impossible étreinte pour le vivant sablier que tu es

 

Tout entière vouée au ressac des langues, pupille noire plonge dans l’iris

Aux couleurs si changeantes mais si vives, tantôt quartz irisé, tantôt fleur nerveuse,

 

Tantôt arc-en-ciel, toutes choses à l’orée desquels masculin et féminin se pressent

Au balcon fleuri des significations multiples pour mieux entrevoir

 

Ce qui, dans ta langue, donne toute l’altitude nécessaire à son prodigieux essor

Porté par ton corps de neige ou d’ébène à l’aube d’une réconciliation qui tarde à venir

 

De par la langue

Au sommet de la vague

 

Yeux brillent de mille feux au firmament de midi

Dans ta chair instable

 

Jean-Michel Guyot

10 février 2022

 

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