Vous en connaissez, des poètes, des vrais qui...
Vous en connaissez, des poètes,
des vrais qui riment la perpète,
qui font flic rien que pour bouffer ?
Dans l’œuf ils se font étouffer
avant de prendre la retraite.
Quand on est bête on devient bête.
Et pourtant Roussot résistait.
Dans les marges il écrivait
des trucs qui sont dans la police,
même souvent dans la justice,
et pourtant ils n’étaient pas cons !
Dans ces trucs il y avait du bon,
et pas du bon bon pour les caves
et mauvais pour ceux qui entravent
sans avoir besoin d’étudier.
Du bon jamais vite expédié
comme on en voit chez les libraires.
Du bon qui prend le temps de faire
et qui le fait avec la foi
comme nous l’impose la Loi.
Ah ! Des fois j’ai les nerfs aux fesses
et je sombre dans la bassesse
tellement que ça me fait chier
qu’on me marche dessus les pieds
parce que je n’ai pas d’études
bien que je n’ai pas l’habitude
de ne pas étudier aussi.
Et le portrait n’est pas grossi.
Je fais du sport et je suis mince.
Je me savonne et je me rince.
J’ai une solution à tout.
Je prends les choses par le bout,
un seul suffit à mon aisance.
Et puis je dis ce que je pense
si jamais j’en trouve le temps.
Les vaches c’est en le broutant
qu’elles font du pré des vacances.
Elles se trouvent bien en France.
Vous voulez le leur reprocher ?
Attention on peut amocher !
On a des moyens à la pelle.
Un mot de trop, on interpelle.
Les juges sont tellement cons
(je ne dis pas connes mais bon…)
qu’on se croirait en zone libre.
La démocratie équilibre
la balance et le pot pourri.
Si vous n’êtes pas bien guéri
on vous injecte des poètes
qui font le printemps à la fête.
Et des mots que quand on les voit
on les lit sans avoir la foi !
Il faut être vraiment fortiche
pour être à la fois pauvre et riche.
J’en ai vu comme je vous vois !
Et je vous vois comme je bois !
Au marché de la poésie,
on dit même qu’elle est saisie.
Saisie par quoi, je ne sais pas.
Les huissiers marchent le nez bas.
Quand on leur cause ils parlent neutre.
Je prends la mouche au stylo-feutre
dans les marges de mon carnet
où mon indignation je mets
pour autre part ne pas la mettre.
Je suis poli avec les maîtres
et convenable avec les dieux,
surtout s’il y en a un ou deux,
et peut-être un seul dans le monde.
Qui sait dans quel sens je m’abonde ?
J’ai bien écrit le premier vers,
un truc vraiment que c’est l’enfer,
ce qui de rime me dispense.
Ne rime pas qui bien y pense.
Mais j’ai l’espoir d’y arriver
et le Nougaro égaler,
en termes clairs comme sur scène,
et un peu dans tous les domaines,
à Toulouse et plus loin s’il faut.
Le premier vers est sans défaut.
J’ai compté toutes les syllabes
et même avec l’accent arabe
qu’on dit qu’il a de l’avenir.
En poésie on voit venir.
La correction grammaticale
est une question abyssale.
Je m’y risque mais sans payer,
car j’ai déjà un gros loyer.
Quant aux mots du vocabulaire,
je fais selon mon dictionnaire
qui va de là jusqu’à ici,
ce qui limite mais ainsi
je mise sur la différence,
ce qui pourrait, d’un coup de chance,
me propulser sur le devant
que je peux l’attendre longtemps.
En attendant, je suis derrière,
prenant bien soin de ma carrière,
que j’ai l’échelle qu’il me faut
pour m’accrocher à un barreau,
à deux pas de la réussite
que quand ça vient ça va très vite.
On se mariera quand tu veux.
J’aimerai vraiment être deux.
De "La trilogie française"
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