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Ombre et lumière
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 Article publié le 20 février 2022.

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Je te l’ai dit : Je suis à prendre ou à laisser. Tu m’as laissé, grand bien te fasse.

A cette époque, je m’attachais à la première venue qui me semblait pouvoir m’offrir tendresse et sécurité. J’étais terriblement inquiet, ayant dû prendre mes distances avec une mère aimante mais paralysante, je ne dis pas dévorante.

Mon manque de confiance en moi d’alors provenait de mes deux parents, des gens simples mais intelligents, malheureusement écrasés dans leur enfance par les privations rendues plus dures encore sous l’Occupation nazie. Ils y ont laissé une part de leur santé, ont vécu pendant toutes ces années avec une peur diffuse au ventre. Mon père ne fut pas gâté, flanqué qu’il était d’un beau-père sans cœur et d’une mère aussi sèche que ce compagnon qui n’avait pas daigné divorcer pour elle et l’épouser. J’arrête là, les histoires familiales se répètent, toutes occupées par leur lot de chagrin et de peines, des joies aussi, des moments lumineux qui aident à vivre, longtemps après qu’ils ne sont plus que souvenirs.

La première venue, disais-je, comme si elles avaient été légions. Non, ce ne fut pas le cas. Le grand timide que j’étais s’y entendait par sa froideur à tenir à distance presque tout le monde. Je n’ai ouvert la porte du jardin qu’à de rares élues qui n’en valaient pas la peine.

Beaucoup de temps a passé, mais est-t-il jamais passé ?

« J’ai changé à travers une permanence. », écrivait l’ami Jean-Paul sans sa biographie que j’avais dévorée, avant de passer le bac de français, lecture heureuse qui me valut une excellente note à l’écrit.

Ambigu comme ce verbe qui hésite entre les auxiliaires être et avoir, le temps, ambigu comme nous qui sommes condamnée à l’ambivalence à son égard, merci Monsieur Bleuler pour ce bon mot. Sigmund a bien retenu la leçon.

Je le sais : même sous hypnose, je ne serais jamais que le double de moi-même, et ce à l’infini, perdu dans un jeu de miroir qui interdit toute captation d’une image unique, a fortiori du « modèle » reflété par les miroirs, tous déformants qui plus est, le « modèle » n’étant à tout prendre qu’un ensemble projeté par mon entourage familial sur ma personne introuvable.

Ce qui me fait dire que seule la lumière est vraie, innocente et sainte.

Vouloir ne faire qu’un avec cette lumière omniprésente sans y être, sans en être, c’est tout bêtement impossible. Laissons la lumière à ses jeux, restons cette ombre qui la suit, accordons aux autres, à tous les autres de venir s’y reposer le temps d’une bonne sieste. C’est le moins que nous puissions faire dans ce désert.

Je n’ambitionne pas, disant cela, d’être pour toi cette oasis de verdure que je puis être à mes heures. Le désert demeure, et sa traversée patiente ou harassante, et ses sables et ses vents brûlants.

Je suis le premier à en aimer la rudesse, de celle qu’on évoque pour qualifier un climat ou une saison. Même si nous sommes nombreux à ne pas vouloir vivre dans des conditions extrêmes, il reste qu’oasis et puits d’eau fraîche et pure ne nous sont donnés qu’au beau milieu du désert, et non ailleurs.

Pour autant, nous aimons vivre le long des fleuves. Nous recherchons l’humidité et ses riches pâturages, ses terres fertiles et son ombrage nombreux, c’est bien humain.

Le Nil est pour cela le fleuve des fleuves que nous révérons comme un dieu, sans pour autant l’adorer à la manière d’une idole. Nous l’aimons pour ses jeux de lumière, ses crues et ses décrues, sa vie qui dispense la vie aux humains qui ont soif de vivre.

Loin, très loin d’autres fleuves, d’autres histoires, et toi, et moi, et nous tous, vous tous et vous toutes, fils et filles de la lumière qui accompagnez de votre vie le grand désert.

 

 

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