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 Article publié le 12 mars 2023.

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A tout miché, pesez Ricord.

Morts, êtes-vous des mythes et pareils aux myrtes des morts ?

L’argot de Rrose Sélavy, n’est-ce pas l’art de transformer en cigognes les cygnes ?

 

Robert Desnos, Rrose Sélavy, 1922-23

*

Les nazis, ces managers du crime de masse planifié, au cerveau bouffé aux mythes, à la raison instrumentale hypertrophiée, sommet de la bêtise.

J’ai dans le cœur un morceau de la terre d’Israël ni pire ni meilleur que toutes les autres nations.

Que te resta-t-il après le désastre, Victor, à penser, à espérer après qu’on eut ruiné en toi toute confiance ?

*

Un siècle déjà, et c’est comme si c’était hier.

Le lierre des jours coure le long du tronc noueux du vieil arbre de vie ; le temps venimeux n’ajoute rien à l’affaire qui est entendue depuis déjà fort longtemps.

Le vélin des nuits, vilain éventail tout droit sorti des cuisses de Jupiter, s’enivre du vin des écritures. Il faut que tout ce carnaval cesse une bonne fois.

 

Ah Thérèse, je n’aime pas tes faux airs de ville sainte ! Le martyre y est partout, la mort y festoie nuit et jour.

 

Même sans talent, même ruiné, tu as une vie à défendre. Plein de sève et de rage, bourré de talent, tu as une vie à défendre.

 

Quelques paroles maussades jetées en pâture à la foule ne font pas un chef, pas même un coq doué de la parole juché sur son tas de fumier.

 

Le fiel des maux, le miel des mots. Mélangez le tout, saucez et vos vœux seront exaucés.

 

Des cigognes cognent des cygnes essoufflés ; les rives aboient, les berges humides ont soif.

 

La pureté n’est plus ce qu’elle était, monsieur l’éleveur de poulets. On a rasé ta ferme, on a brûlé tes grains. Et maintenant tu pourris dans la lande.

 

Tu n’avais du ciel que le nom et tu l’as souillé avec tes soûleries de soudard mystique, tes délires agronomiques appliqués aux humains.

 

Tu as pollué jusqu’aux sources de vie.

 

C’est la vie, me dit une rose en bouton. Elle n’avait que ses épines pour défendre sa pudeur. 

 

Passe par-là un rude gaillard aux mœurs rogues comme on n’en fait plus de nos jours. Les voyous pullulent, clopes au bec, et peu, si peu de mots pour articuler leur colère.

 

J’ai percé ton secret, me dit une rose épanouie. Je vois très bien où tu veux en venir, vil écornifleur.

 

Ah si les fleurs avaient des cornes, tout serait si simple ! Les fleurs ne sont jamais cocues, même en rêve.

 

On n’est jamais mieux servi que par soi-même, me dit un jour de grand vent une mouette esseulée. Un meurtre de corbeaux s’abattit sur elle pour la dépecer. C’était en avril dans le champ d’Auguste Poussière.

 

A Brussey, les paysans ne sourient jamais. Ils vaquent tranquillement à la destruction méticuleuse des sols, fiers comme Artaban juchés sur leurs gros tracteurs. Leurs enfants ont les joues creuses, les yeux rougis, les oreilles en forme de choux-fleurs. Une bonne vingtaine de pesticides courent dans leurs veines., à ce qu’en disent les docteurs. 

 

Passe en trombe dans une voiture de livraison blanche un de ces abrutis du village, toujours pressé d’arriver sur les lieux de son crime. Un de ces jours, on retrouvera dans un pré son cadavre tuméfié. Pas sûr que, prudents, les corbeaux veulent s’en repaître.

 

Ce qui est valable pour toi l’est-il pour moi ? mais moi qui ne suis pas toi, je suis un moi tout comme toi. Nous voilà bien avancés !

 

La pauvreté, outre les souffrances intolérables qu’elle induit, est un gigantesque gâchis humain. En as-tu seulement conscience ? Tu préfères détourner le regard, n’est-ce pas ?

 

La qualité d’une société s’évalue à l’aune de la prospérité qu’elle est capable d’offrir à ses membres sans exception. Les exceptions sont si nombreuses. On les justifie par le faible rendement et la piètre qualité des personnels, leur incompétence étant jugée rédhibitoire.

 

Rendre une marchandise vendue (en raison de sa mauvaise qualité) : re-habere,redhibere. Est rédhibitoire ce qui n’a pas la valeur d’usage escomptée.

 

Le défaut rédhibitoire de toute société inégalitaire : elle traite certains de ses membres comme des objets utilitaires de piètre qualité à recycler ou à éliminer, s’ils ne font pas l’affaire.

 

Une rose et son rosier, un rosier et ses roses.

 

Rose, rosiers se moquent bien d’être d’une quelconque utilité.

 

L’utilitarisme, je l’ai vu à l’œuvre dans de jeunes esprits pervertis par leurs parents : ils sélectionnaient, croyaient-ils du moins, les matières qu’il estimaient leur être utiles, alors qu’ils ne disposaient même pas des outils intellectuels adéquats pour choisir avec discernement ; en eussent-ils disposé qu’ils auraient compris la vanité de classer les choses et les gens selon leur supposée utilité.

Je lui dis un jour, à cet utilitariste en herbe : Et toi, à quoi sers-tu ?

 

L’acte gratuit n’existe pas. Tout comportement est motivé.

La psyché humaine est si complexe que d’aucuns ne savent pas même expliquer pourquoi ils ont agi de telle ou telle façon faute d’en avoir la pleine conscience. Le retour sur soi, tout comme le retour sur expérience, leur font défaut. Ils ne sont qu’eau dans l’eau, air dans l’air.

Les raisons de leurs comportements leur échappent, faute de lucidité, et la lucidité n’est pas innée, elle s’acquière avec beaucoup de travail ; devenir son propre maître est la chose la moins aisée.

La faible intelligence n’en est pas moins portée par le plus gros cerveau qui soit dans le règne animal.

Comment un aussi gros cerveau peut-il produire tant d’insanités ? ou tant de cruautés ?

Une ombre plane sur l’humanité, la propre, dont elle fait parfois quelques ombres chinoises de mauvais augure.

L’art, tant qu’il nous dure, sans rien n’occulter ni exalter de ce qui oppresse, caricature, pervertit ou détruit, n’est pas l’ultime secours ni la béquille d’un corps malportant. Ni une flamme ni un flambeau ni un phare dans nos nuits.

Des yeux pour rire, des yeux pour pleurer, ce n’est pas assez. Il nous faut l’art, l’art sans fard, versatile et bruyant, une arme d’estoc pour assommer la bêtise rampante ou bêlante.

 

Jean-Michel Guyot

8 février 2023

 

 

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