La première des fonctions sociales de l’écrivain est aussi peu sociale que
possible mais ne s’annonce pas seule au portillon : le poète facteur économique
n’est pas qu’un moyen d’amasser significativement de l’argent. Cette fonction
n’est que l’accompagnatrice ou la dérivée d’une des fonctions suivantes :
- le poète maître à penser, qui ne se rencontre plus guère qu’à
l’extrême droite des activités politiques ; au lieu de renvoyer les balles au
fronton, il vise les esprits qui, par leur comportement social, ont inspiré sa
logorrhée ; Céline est bien sûr le modèle mais on ne néglige jamais de
lorgner un peu sur des oeuvres aussi falotes que celle de Drieu car l’idée du
beau style, en comparaison avec le style des beaux draps, demeure un souci
constant chez ces amateurs du texte emprunté mais pas rendu.
- Le poète éducateur ne dépasse que rarement les limites d’une
prosodie malherbienne simplifiée (à cause de l’élision notamment) ; mais il
peut choisir de s’exprimer dans une prose si proche de ses chalands qu’on a
l’impression qu’il s’y connaît en petits détails importants de la vie
quotidienne ; plus psychologue que bouche d’or, à l’instar des camelots de ses décors,
il provoque les adhésions au lieu de s’en prendre à l’esprit immobile de ses
lecteurs ; il passe comme les sucres d’orge, en couleur et sur la langue des
petites filles curieuses.
- Le poète commentateur, hérité de cette pratique religieuse qui
consiste à s’interposer entre le texte sacré et le croyant, pratique érigé
en science et qui possède ses universités, ne s’éloigne jamais trop de la
chanson mais il sait quelquefois donner de la fable à son auditoire perché
comme les oiseaux des arbres et des fils ; sans les médias, dont il abuse en
technicien de l’apparence, il n’est plus rien ; par contre, sans sa poésie, il
demeure ce qu’il est : un charlatan de la pire espèce, un agitateur de fond de
bouteille où la substance continue hélas une existence quiète si on en juge
par l’entretien de ses palais.
- Le poète chercheur ne trouve pas ; le contraire nous eût étonné ;
s’il s’en excuse, c’est pour donner une idée de la profondeur de son génie et
des matières où il baigne comme les huîtres dans un ballet de sperme compliqué
de jeux d’algues et d’effets d’optique ; il est impossible de le critiquer en
commençant par sa connaissance des lieux littéraires tant il est, comme aurait
dit Cézanne, couillard en la matière ; par contre, ses analogies tombent à
l’eau sitôt qu’on les a remontées comme les seiches prises à cette espèce de
miroir aux alouettes faits de fils de couleurs qui constituent le meilleur des
attrape-nigauds.
- Le poète assassin n’est souvent qu’un jeu de l’imagination avec des
sensations qu’une partie infime de la population serait en mesure de traduire en
mots si elle possédait seulement un dixième du vocabulaire minimum nécessaire
à un commencement de texte ; les poètes assassins sont presque aussi rare que
les assassins ; il eût existé des poètes voleurs, le côté criminel de la poésie
en eût été augmenté considérablement ; mais le plagiat n’est pas un vol, pas
vraiment.
- Le poète suicidaire, s’il tarde à entrer en action, se soumet
immanquablement aux règles élémentaires du drame : il rate ses effets ; on n’évoque
rarement le suicide raté dans ce sens ; le poète suicidaire est jeune ou, s’il
a pris un peu de temps, il souffrait d’impuissance sexuelle ou des conséquences
de l’inceste, selon le sexe.
- Le poète rebelle est comme les bijoux ; des vrais, des faux, des
imitations ; il respire comme on sait mieux mentir à nos enfants qui, sans le
savoir, veulent lui ressembler ; la révolte ne détruit pas ; elle est un signe ;
aussi, le rebelle marche sur un chemin de croix ; la plupart du temps, il ne se
passe rien mais gare aux interrogatoires de police !
- Le poète exemplaire, ou exemple de poète, est mort ; sa fonction, par
le caractère posthume de son inconnue, est difficile à exprimer ; mais toutes
ces conversations de salon où l’on dispute du compendium littéraire national
ont une fin ; ceux qui disparaissent ne reviennent plus nous hanter ; une espèce
de droit naturel s’installe entre les hommes chargés de ce redoutable labeur ;
ne souhaitons à personne de s’épuiser de cette triste façon d’exister.
- Et pour finir, nous avons le poète objet d’admiration ; il n’existe
pas ; je l’invente pour combler le vide laissé par les classiques dans notre
société où les choses ont une place et les places des défenseurs obtus ; ni
compilation, ni compromis, il serait à la poésie ce que les roses sont à la
fraîcheur depuis qu’on en parle mieux qu’avant ; il ne remplacerait pas non plus
les succédanés au bonheur ; il ne mettrait personne d’accord ; admiré par
principe, un peu comme on admire la pluie derrière la fenêtre de nos durs
moments, il ne serait pas l’étranger qui, non content de traverser son
jugement, s’exprime dans le passé composé de ceux qui survivent à leur
destruction ; objet non pas de culte mais des sens ; on jouerait ses partitions
sur les pianos enfin disponibles du père Castel ; il aurait de quoi manger et de
quoi ne pas avoir froid ni trop chaud ; il serait aimé secrètement ; ses enfants
grandiraient dans la forêt de sa qasida ; ses livres se vendraient avec les
fruits de la terre ; il me ressemblerait mais en plus chanceux ; on hésiterait à
lui confier la pièce des paris ou les dés du coup à tirer avant de rentrer
dans son chez soi ; admiré de la tête au pied, il serait pénétrable comme une
fille des rues ; il rendrait un cent pour un mille car il faut bien lui donner
les moyens de progresser dans la jouissance de l’argent que personne n’a inventé
comme la roue ; portrait à achever pour amuser les secondes de malheur et
d’angoisse.
Il serait peut-être plus judicieux, afin d’établir une description des genres
de poètes relatifs et de leurs fonctions sociales associées, de se référer
aux "éléments purs" proposés par Ezra Pound. Comparée d’ailleurs
à une application contemporaine, les différences n’affectent en rien la liste
elle-même mais les compléments nouveaux de sa description. ABC de la lecture,
chapitre IV, section II.
Les inventeurs. Des hommes qui ont trouvé de nouveaux procédés ou dont
l’oeuvre constitue le premier exemple connu d’un nouveau procédé.
La génération d’Ezra Pound a en effet inventé beaucoup de procédés. Nous
n’en avons pas inventé depuis, en dépit des possibilités de traitement de la
mémoire artificielle. Pour l’instant, nous sommes trop prêts des données du
jeu et sans perspective prometteuse. Le cinéma profite mieux de ces avancées
technologiques. Évidemment, ces "inventions" n’ont jusque-là trouvé
d’application que dans le domaine très étroit de la littérature potentielle.
De plus, l’invention en question n’est pas le fait de poètes mais de
techniciens à la recherche de démonstrations de force. Le poète s’est contenté
de la vitesse d’exécution de ses propositions. Le fait que ces applications se
soient trouvées limitées aux géométries par exemple de l’enquête policière
est la conséquence, non pas de la nature de l’invention, mais du caractère
propre des poètes qui ont été tentés par cette aventure. Les autres
inventions, plus classiques, n’ont abouti qu’à des complications de la lecture
quand elles n’ont pas rendu impossible l’écriture même. C’est ici que l’on
mesure la portée d’Artaud. Il y a toutes les chances pour que le texte glisse
dans le sens de sa représentation dans les temps qui viennent. Les questions de
prosodie sont bonnes pour les oubliettes mais la nostalgie de la langue qu’on
agite n’est pas prête de disparaître. Une tradition, aussi stérile que toutes
les traditions qui nous traversent, s’installe doucement. Elle ne sera plus
qu’objet de mode et donc soumise à des variations de surface car, comme la mode
vestimentaire consiste à décorer l’apparence, le texte poétique sera le plus
mûr moyen de donner à la langue des assurances de principes sacrés. Nous
n’avons pas fini de nous entretenir d’allusions mais c’est le principe même
d’une civilisation qui ne veut pas mourir.
Les maîtres. Des hommes qui ont réuni un certain nombre de ces procédés
et qui les ont utilisés aussi bien ou mieux que les inventeurs.
Le maître n’est pas un imitateur. Il possède son outil de travail. On le
consulte d’ailleurs plus facilement que l’inventeur qui, de nos jours, est bien
incapable de parler littérature sans se référer inlassablement à ses
mythologies enfantines. Le maître enseigne par l’exemple mais ne dédaigne pas
les essais d’explication. Il est tout à la fois et rien d’annonciateur. Il
occupe le temps sur son fil en véritable funambule qui connaît les risques de
son métier. On est rarement séduit par les maîtres. On puise à leurs sources
ce qui n’apparaît pas aussi clairement dans le texte de leurs propres
souverains. Ils sont le passage de la curiosité à l’invention. Compte tenu de
la rareté croissante de l’inventeur, les maîtres sont en voie de disparition.
On les confond souvent avec les charlatans parce que les charlatans n’imitent
jamais les inventeurs par crainte de la comparaison justement.
Les vulgarisateurs. Des hommes qui sont venus après les précédents, et qui
n’ont pas fait aussi bien qu’eux.
Des disciples. Ils n’ont pas cherché plus loin que l’endroit où, dans des
circonstances précises de roman, ils ont rencontré leur maître. Ils ne sont
pas inintéressants. Ils jouent le même rôle que leurs maîtres mais à un
niveau inférieur de la pensée. Éducateurs souvent, on les rencontre plus
facilement. Ils ont la peau de la chose littéraire, son apparence la moins austère.
Mais sous cette peau, il n’y a que les organes de l’homme du commun. Bourget a
écrit un solide roman sur le sujet mais on ne le lit plus guère dans sa patrie
d’origine. Avec le vulgarisateur, on revient à la psychologie et à ses facilités
d’imager les actes frustrés de la vie quotidienne. Un spectacle, en somme et ça
ne va pas plus loin que la sensation d’être sur le bon chemin.
Les bons écrivains mineurs. Des hommes qui ont eu la chance de naître à
une époque faste de la littérature de leur pays ou bien à une époque où une
certaine branche de la littérature "se portait bien". Par exemple,
ceux qui ont écrit des sonnets à l’époque de Dante ou de courtes pièces de
vers à l’époque de Shakespeare ou au cours des quelques décennies suivantes
ou bien encore ceux qui, en France, écrivirent des romans ou des récits après
que Flaubert leur eut montré comment faire.
C’estunedesobservationsles plus pertinentes d’Ezra Pound au sujet des poètes.
Car il s’agit maintenant de différencier clairement l’écrivain mineur de
l’homme de lettres et de l’écrivain à la mode. L’écrivain mineur n’est pas dénué
de talent. Il n’a rien inventé, ne maîtrise pas suffisamment son métier pour
s’élever au rang de maître et n’est pas doué du talent de communiquer le plus
facilement possible les profondeurs véritables de son activité. Il n’agit pas.
On peut difficilement parler de fonction sociale à son sujet. Mais il existe en
tant que personne capable d’aller plus loin que prévu. Apparence trompeuse, son
pouvoir de séduction est considérable. Il résout tellement de problèmes
d’apprentissage qu’on est souvent tenté, même consciemment, d’aller dans sa
direction pour, non pas se soumettre, mais presque participer à son inspiration
de pacotille.
Les hommes de lettres. C’est-à-dire ceux qui n’ont pas vraiment inventé
quelque chose mais qui se sont spécialisés dans un genre quelconque de littérature.
On ne peut pas les considérer comme de "grands hommes" ni comme des
auteurs qui ont tenté de donner une représentation complète de la vie ou,
plus simplement, de leur époque.
L’homme (ou la femme) de lettres est généralement non seulement détesté mais
pris en exemple de ce qui arrive aux mauvais élèves. Il est vrai que leur
existence n’est pas essentielle à la survie de nos civilisations. Ils bouchent
cependant les trous laissés par nos pratiques sectaires. On les enfonce
facilement, car la plupart sont envieux et orgueilleux, dans les interstices de
nos raisonnements. Ils marquent leur temps et meurent après que leur marque a
disparu. C’est que, dans un souci constant de renouvellement et d’adaptation,
ils poussent leur pensée dans les recoins de la nation où ils ne survivront
pas malgré tous les efforts de représentation forcée. Barrès part d’un moi
nouveau, ne trouve guère les moyens d’aller plus loin et s’embarque dans un
nationalisme qui l’amène au seuil d’une mort contradictoire. La vie, comme le
souligne cruellement Ezra Pound, est absente de leur littérature. Même leur
temps s’y désagrège, sans doute parce que l’orgueil est incompatible avec les
exigences de l’analyse historique. Mais il s’agit là sans doute de l’écrivain
à plus fort potentiel social. Ses carences sont celles de l’homme du commun. L’écart
est invisible et notoire. De pareilles contradictions ne tiennent pas longtemps
la route. Une grande partie des hommes et des femmes de lettres fournissent
cependant le contingent des intellectuels chargés de répandre les idées,
celles qui forment le lit de l’existence du matin jusqu’au soir. La nuit
appartient à d’autres valeurs plus persistantes.
Ceux qui font la mode.
Curieusement (je n’ai pas trouvé d’explication), Ezra Pound ne commente pas
cette catégorie plancher. Pourtant, c’est la seule qui a connu une évolution
remarquable. Il échappe à Ezra Pound que l’économie ne se décide pas dans
les cabinets gouvernementaux mais dans les officines de la mode. Même l’eau, si
nécessaire à notre existence, fait l’objet d’une enquête préliminaire avant
d’être mise en bouteille ou simplement distribuée par des tuyaux. La littérature
est soumise elle aussi à des interrogatoires de la vie quotidienne. Ces
techniques d’analyse de la meilleure manière de concevoir la littérature sont
redoutablement efficaces. C’est qu’alors le texte répond à une attente pressée.
Il a toutes les chances d’atteindre l’endroit précis de l’esprit qui est dans
l’attente de cette petite satisfaction. L’homme moderne est de plus en plus
capable de se satisfaire d’illusions. La pratique du rêve et de l’hallucination
est en perte de vitesse et n’a d’ailleurs jamais concerné qu’une part marginale
de la société. Cette fois, la littérature est capable de s’adresser au plus
grand nombre possible c’est-à-dire d’occuper tout le terrain disponible au détriment
des autres pratiques textuelles. Ce n’est pas seulement la poésie véritable
qui ne trouve plus de quoi exister pour les autres, c’est toute la pratique qui
se trouve remise en question non pas par l’idée même d’analyser le besoin
avant de s’adresser à ses organes mais par l’impossibilité matérielle de
mettre en place une pareille organisation. La publicité, qui n’utilise
d’ailleurs pas les moyens retardataires de la propagande politique, achève le
travail mais ne l’invente pas. Elle est encore moins capable, par définition,
de trouver le point d’ancrage du texte. Ceux qui font la mode ne sont donc pas
des poètes mais des analystes compétents. Ceci n’exclut pas les coups de
chance qu’on finit par expliquer d’ailleurs, ce qui ajoute à la connaissance du
public. Dans ces conditions, le poète est d’abord une cousette. Ce n’est qu’à
force de réussite qu’il accède à la majorité commerciale. Nous sommes passés
de la nécessité du privilège, et de tout ce qu’il supposait de soumission et
de ruse, à celle d’un apprentissage parallèle aux explorations de la matière
littéraire.
Cette analyse pourrait paraître exagérément pessimiste ou carrément incohérente.
Mais qu’on me cite une oeuvre contemporaine ou récente qui atteigne les
chevilles de ce que le poète était encore capable de faire il y a 50 ou 60
ans. Si nous établissons le compendium de ces nouveautés, nous n’y trouvons même
pas la promesse d’une littérature nouvelle. Nous sommes sur le point de tourner
en rond comme les Arabes, nos maîtres en modernité.
Mais c’est peut-être méconnaître la nature humaine que de se figurer qu’elle
est bien cette fois en train de perdre son âme. Même à limiter cette "décadence"
au baladin occidental, on n’expliquerait pas les défauts de la démonstration
moderne. Certes, les cloaques français ont presque disparu avec le second
Empire. Il n’en reste plus que la misère mentale due aux mauvaises
associations, mariages, aventures sentimentales, poids des ans et des traditions
fermement catholiques même si on est juif, arabe ou simplement métèque, etc.
Rien ne change la vie à ce point.
La religion incite à la paresse,
la science ne tient pas ses promesses,
les politiciens non plus,
nos miroirs nous conseillent la crédulité,
la magistrature est un simple élément de gouvernance,
les pouvoirs s’intriquent,
les métiers se dissolvent dans la rapidité d’exécution et les changements
d’optique incessants,
la lecture se confronte au temps qui reste après décompte de tous les actes
exigés par la survie et par les convenances,
l’hallucination n’a rien donné,
le cyberespace annonce la douleur comme condition du plaisir et ça n’est guère
réjouissant,
on n’a plus envie de se faire greffer ou simplement tatouer,
on rejoint des communautés pour mieux s’isoler des autres,
on rencontre des cerveaux qui ne raisonnent plus à force de croire et d’espérer,
on est en droit de se demander si le jeu en vaut la chandelle
et le suicide revient comme une douleur lancinante après les moments d’une révolte
aussi peu camusienne que possible.
Ponge ? Nous y avons pensé avec envie comme les personnages d’Unamuno mais nous
ne sommes guère allés plus loin que ce désir d’obtenir quelque chose de la
société des hommes sans à avoir à en payer le prix exorbitant.
Nous sommes revenus aux clavecins de Louis-Bertrand Castel, ayant bien sûr
oublié que l’idée est dans l’air depuis plus longtemps qu’on pourrait même
l’imaginer si cela nous était donné. Mais cette fois, nous pensons posséder
les moyens de les construire. Nous possédons déjà mieux que des signes précurseurs.
Notre rage de vivre va coûter cher aux autres. Elle coûtera cher aux choses
qui ont leur "ananké". Il va falloir tordre les poignets de ce qui
nous retient encore. Nous sommes prêts. Et des réponses d’une rhétorique
inacceptable, maintenant que nous connaissons la liberté individuelle, nous
arrivent de cet Orient qui n’a jamais donné un instant de bonheur à ses
habitants crevés au travail de la terre et de l’Occident. Des réponses d’un
autre temps qui n’a jamais été celui de l’Orient.
Faut-il finalement oublier les langues pour être encore de ce monde ? Oublier
les couleurs et surtout les architectures. Réduire les sens au cerveau, cela
revient à le plonger dans l’univers musical. Peut-être un avenir mathématique
au bout de toute réflexion physique. Mais monsieur Teste n’a-t-il jamais existé,
ô paradoxe, que dans l’imagination en proie aux personnages de sa réalité ?
Glissant ? Cette lente destruction de l’Occidental qui se métallise, de l’Arabe
qui meurt de soif, du Chinois qui gratte le sol de sa patrie pour trouver un
dieu digne de ses conceptions urbaines, de l’Indien écartelé en divisions
sociales qui menacent les classifications scientifiques e tutti quanti. Il doit
bien exister un monde dans ce monde qui ne soit ni occidental, ni arabe, ni
chinois, ni indien, ni quoi que ce soit d’envahissant au point d’en perdre l’équilibre -et qui appelle à une autre existence.