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 Article publié le 11 janvier 2005.

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CE QUI N’EST PAS DECHIRANT EST SUPERFLU, TOUT AU MOINS EN MUSIQUE.

Cioran

 

-En relief, noir,fait à l’aiguille sur une de mes taies d’oreiller-

 

J’écris au marteau piqueur sur Verdi, sur Monteverdi, sur les champs grégoriens, entre les soupirs des canalisations, sur les dentelles, les broderies, les calebasses de la pluie, sur les fla, les ra, les tla des tambourinaires, sur les battements de cœur et de paupières de la cité.

Je reverdis.

J’écris sur l’écriture in rebus des murs peints de frais, sur les dalles martelées des contestations, sur les pas d’Apollinaire, sur les frontispices, sur les pissotières, sur les façades effarées, sur le triangle pubien des girls de la Pub, sur les SEXophones de la Réclame, sur la romance CACO, COCA, CACAphonique, sur les indécis déciBELLs, sur les pipeaux rustiques, sur les cliquetis vert-de-gris des armées, sur les ex voto de Niki de Saint Phalle, sur le tintamarre des colonnes Morris...

 

MUSIQUE-MUSICA-MOUSIKÊ

-Sur l’enseigne d’un marchand d’instruments anciens-

 

Je suis l’arrangeur des bastringues, des kiosques, des boîtes, des tabatières, des pendules, des barcarolles pour gondoles de grands magazes, du temps qui passe, du temps passé...

 

J’arrive avec les silences de Mozart -Je mets ensemble les notes qui s’aiment, me disait-il encore ce tantôt-, avec les fées et les orphées des juke-boxes de ma jeunesse, avec la Pavane pour une éléphante défunte de mon enfance, avec les Ré bémol majeur de Fauré, avec la Valdingue des Strauss et quelques viennoiseries dans ma musette, avec le pain polka de Dvorak, avec du Madison 62, avec les forgerons, les enclumes et la mélodie des sphères de Pythagore, avec le tutu-pampan de mon tarole, avec le tabac tatoum du Boogie-Woogie des gares de triage, avec le Fox-trot et les semelles de Fred Astaire, avec le Paso-Doble des tauromachies de Goya, avec le Tango-bordel-Gardel, avec le Flamenco de ma Gitane sans filtre, avec une ribambelle de gongs complètement sonnés, avec ma Rumba amourachée, avec ma Samba aux pieds nus, avec la Java à punaises et à bretelles, ma Javavava qui cause javanais, avec le Slow de mes étés de cigale, avec ma Symphonie qui manque de bras, avec le Blues des banlieues, avec les harpeuses et les rockeuses d’Éole, avec mes quatre mains sur les pianos aqueux de Debussy, avec le Xylophone macabre de Saint-Saëns, avec les Nocturnes parisiens, avec mes cliques et mes claques, avec mon style à capella, avec les rhapsodes d’Homère, avec mes couacs, mes quoique, avec ma grosse caisse, mes qu’est-ce, avec le théorbe de Bardella, avec mon porte-voix...

 

 

 

Je suis l’accordeur des pianos-bars, de l’airain et de la soufflerie des Notre-Dame, des fanfares pharamineuses astiquées à la peau de chamois et à l’huile de coude...

Je suis le clocheteur des corbillards des automnes, des rousses automnes que découpent mille chalumeaux belliqueux - Colchiques dans les prés fleurissent, fleurissent,.. Je suis le jaquemart, souvent dans les nuages, le jaquemart des toits où passent des ramoneurs, leur hérisson grimpe sur leur dos, où des chats de gouttières guitarent sur l’air du tralala, où des souris blanches, bleues, vertes violonent sur l’air du tradéridéra, où des rats quêtent -C’est la mèr’ Michel qui a perdu son chat..., où bêlent des moutons insomniaques -Il pleut, il pleut bergère..., où se hèlent des astrologues, chapeau pointu et lunette en carton, où des funambules glissent sur des cordes à linge, où s’ennuient des pères Noël rangés des traîneaux, où s’attardent des somnambules, où flânent des poètes -Au clair de la lune, mon ami Pierrot, prête-moi ta plume pour écrire un mot. Un mot. Les chiens assis aboient aux cornes argentées, et comme dit l’autre, à cette faucille d’or qui fauche les étoiles...

LA MUSIQUE EST UN BRUIT QUI PENSE.

Victor Hugo

-Sur la palissade d’un chantier du quatorzième arrondissement-

 

Ô ma frangine, sur les portées télégraphiques où se reposent les hirondelles de tes printemps, je griffonne les racontages, les

cancans des moulins rouges, des moulins à paroles, des moulins à prières, les phraséologies des voies, des voix de garages, des railways, des aiguillages...

J’arrive avec les jouets mécaniques, avec les jeux d’eau, avec les automates, avec les pompes à incendie, avec les soupapes, les contrepoids, les tuyaux de la machjne à faire de la musique, l’hydraulos de Ctésobios, ce fils de coiffeur d’Alexandrie du troisième siècle avant J- C.

 

Thaïs, sa musicienne de femme fut, dit-on, la première hydrauliste, la première organiste.

J’ai la parole de Barberi et des frères Limonaire.

J’arrive avec ma tragédie musicale, avec mes improvisations, avec mes partitions, avec mes bandes magnétiques, avec les Caprices d’Euterpe...

Je dirige des orchestres hérissés d’archets, de baguettes, de plectres, embarrassés de trompettes de Jéricho bouchées à l’émeri, de tambours voilés de Biscaye, de caisses roulantes et trébuchantes, de clarinettes claires et nettes, de tubas tubards, de trombones joufflus, de flûtes aux lèvres pincées, de guitares échevelées, de tam-tams ferroviaires...

Orchestres embourbés dans la fosse commune, dans le charnier de l’Histoire, la Mort est au pupitre !

LA VOIX DE SON MAÎTRE.

-His master voice-

-Un pavillon, un toutou, la Gramophon Company dans les pattes, sur la vitrine d’un disquaire -

W(est) C(oat) SWING

-Sur la porte des toilettes publiques, quartier Beaubourg-

 

J’accompagne la Misère au violon, je blouse les timbales de la soif. Je vous entends venir avec vos casseroles, avec vos plaidoiries de marchands de soupe, avec les castagnettes insolentes de vos séguedilles, avec les cliquettes et les crécelles des semaines saintes, des lépreux et des enfants. C’est toujours le pot de bronze contre le pot de verre, le pot de peinture contre le pot au rose, le pot de colle contre le pot à pisser, le bras de fer contre le bras d’honneur.

 

 

 

Je dépasse la mesure, dites-vous ? Quelle vielle ! Je vous montrerai de quel haubois elle se chauffe...

Nous reprendrons l’Opéra-Bastille !

 

La musique fringue le cri du cœur !

 

Trissez-vous, les aminches, à la vitesse du son !

En avant la zizique !

Au diable l’audible !

 

Roland, que n’as-tu donné ton cor à la science ?

 

SI TU VEUX CONTRÔLER LE PEUPLE COMMENCE PAR CONTRÔLER SA MUSIQUE.
Platon

-Sur un mur. rue de Madrid-

 

Ô musiques de nuit, rondes cloutées.

Ô musique des foires, des chevaux de bois -A moi le pompon !-

Ô musiques des paysages, des objets...

Ô musiques traînantes, entraînantes, en lambeaux des phonos de ma saison.

Ô musiques des haut-parleurs NAZIllards des chaises électriques, des chambres à gaz.

Ô musiques englouties, mortes, ô musiques des caves, musiques intérieures, musiques de l’âme.

 

JAZZ À TOUS LES ETAGES

-Sur le montant gauche de la porte d’entrée d’une bâtisse promise à la démolition, Clamart-

Une main hâtée a grlffonné sous l’inscription : GaZ A toUs LEs OtaGes.

 

Que moulinez-vous manivelles sans cervelle ?

Ô sainte Cécile, ayez pitié de nous, pauvres musicastres, pauvres ménestrels.

 

Quand tu pass’s par l’quartier l’quartier des Ménestrels

Mouett’s colomb’s corbeaux piafs s’envol’nt en poussière

J’prends tes gambett’s pour en fair’ des flût’s traversières

Et mes murs boiv’nt tes mots sous mon ciel d’isorel

 

J’donn’ tes pieds aux claquett’s tes mains aux castagnoles

Tes ongl’s aux mandolin’s ta peau douce aux tambours

Tes airs d’fée dégrafée aux fanfar’s des faubourgs

Tes pas aux farandol’s aux rond’s aux carmagnoles

 

J’donn’ ton dos et ton âme au violon de Man Ray

Ta hanche au violoncell’ ta lèvre agourmandie

Au bec des clarinett’s à la clairett’ de Die

Aux abeill’s de l’Hymette à l’asti au vouvray

 

J’donn’ tes baisers d’oiselle à la Mort qui m’alpague

Dans les bois dans les cuivr’s dans les chants automnaux

Ell’ n’aim’ pas jouer seule aux dés aux dominos

J’donn’ tes parol’s candies à la langueur des vagues

 

J’donn’ ta voix aux sirèn’s d’mon île à falbalas

A l’écritur’ des vents au cantiqu’ des cantiques

Ton souffle au cor d’Roland aux grand’s orgu’s atlantiques

Aux tromp’s d’mes marchands d’brousse aux accordéons las

 

J’donn’ ta nipp’ ton parfum ton diam à la Misère

A la Samba sans gaine à la Rengain’ sans bas

Ta rose à ma guitar’ ton rire aux coups d’tabac

J’donn’ tes chagrins tes grains d’folie aux noirs rosaires

 

J’donn’ ton coeur d’vingt avrils aux métronom’s d’mes nuits

Quand j’traverse à tâtons ma cité chamarrée

J’donn’ ton sel tes saliv’s tes larm’s à la marée

Qui m’laiss’ sur les pavés d’quoi tromper mon ennui

 

J’donn’ ta langu’ verte au tcha tcha tcha charivarique

Aux babils des babels aux charabias aux chats

Perchés à mes javas à mon prêchi-prêcha

Et nous changeons d’boul’vard à ch’val sur un’ barrique

 

Quand tu pass’s par l’carré’ l’carré des Ménestrels

Jette un’ fleur sur la pierre où rouill’ mon épitaphe

Ci-gît un rimailleur frotté d’ail un mataf

D’eau d’vaisselle un folâtre un enfant naturel

 

Robert VITTON, Paris, 2004

 

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