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Préface de Jean MÉTELLUS
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 Article publié le 14 septembre 2008.

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Direction : Valérie Constantin

Préface de Jean MÉTELLUS

A sa manière l’entreprise que réalise ce livre est plus qu’un dialogue, plus qu’un échange, c’est une communion, un repas pris en commun autour d’un seul et même menu : Haïti et l’amour, l’amour entre les êtres , l’amour de son pays d’origine.Certains auteurs qui figurent dans cette revue ne sont plus à présenter. Ils sont connus et souvent traduits dans plusieurs langues et de toutes façons, ils ont déjà essaimé et la jeune génération s’en est nourrie.Il faudrait peut-être alors s’attarder sur les nouveaux venus, ceux qui ont 20 ans ou à peine plus. Je ne pense pas froisser des susceptibilités en disant des textes offerts ici qu’ils font honneur à leurs aînés et qu’ils sont porteurs de fruits savoureux.

Ce cahier de plus de cinq cents pages se propose de donner une idée de la création artistique en Haïti après les années 1920. Malgré cette limitation, le projet paraît encore presque utopique, vu la richesse de la production littéraire et picturale dans ce pays depuis cette époque. Mais en segmentant l’histoire des réalisations artistiques et littéraires par générations d’âge, les concepteurs de ce document ont fait preuve de réalisme et d’efficacité, leur entreprise acquiert une véritable crédibilité et force l’admiration. Ce faisant ils instaurent un dialogue entre les générations : Génération 1, Années 20-40 ; Génération 2, années 50-60 ; Génération 3, Années 60-80.

Certes il est impossible de mentionner tous les noms de créateurs à l’intérieur d’une même génération. Dommage ! diront certains, surtout ceux qui ne connaissent pas la vitalité, le dynamisme et l’énergie propres à ces artistes. Tant mieux ! Répondront d’autres, surtout les connaisseurs et ceux qui vont lire, regarder ou simplement parcourir cette énorme rétrospective et qui pourront à leur manière prendre l’exacte mesure de cette activité créative. Les textes et les tableaux de chaque artiste sont précédés d’une courte notice bio-bibliographique très instructive. Nous apprenons ainsi que plusieurs auteurs publient aussi bien en Français qu’en Créole ou en Anglais. On ne peut plus parler de littérature haïtienne tout court mais de littérature haïtienne d’expression française, de littérature haïtienne d’expression créole et de littérature haïtienne d’expression anglaise. Mais si dans une revue générale rapide la littérature haïtienne peut et même doit être rangée dans la rubrique dite francophone, cette littérature est avant tout une littérature vivante certes produite par des Haïtiens mais qui touche à l’universel. 

A sa manière l’entreprise que réalise ce livre est plus qu’un dialogue, plus qu’un échange, c’est une communion, un repas pris en commun autour d’un seul et même menu : Haïti et l’amour, l’amour entre les êtres , l’amour de son pays d’origine.

Certains auteurs qui figurent dans cette revue ne sont plus à présenter. Ils sont connus et souvent traduits dans plusieurs langues et de toutes façons, ils ont déjà essaimé et la jeune génération s’en est nourrie.

Il faudrait peut-être alors s’attarder sur les nouveaux venus, ceux qui ont 20 ans ou à peine plus. Je ne pense pas froisser des susceptibilités en disant des textes offerts ici qu’ils font honneur à leurs aînés et qu’ils sont porteurs de fruits savoureux.

Je ne les connais pas tous, loin de là. J’en ai rencontré deux ou trois, très jeunes, qui étaient de passage à Paris, avec qui j’ai fait des photos, je ne citerai aucun nom mais je suis sûr qu’ils tiendront bien haut la flamme que notre génération s’est efforcée d’allumer. Pour notre génération, Jean Brierre, Roussan Camille, Aimé Césaire, Haïtien de cœur, Magloire Saint-Aude tous de grands bardes nous ont profondément marqué. Espérons que notre empreinte sur les générations à venir restera lisible aussi un certain temps.

Pour ma part, je n’ai pas remarqué de différences nettes entre les générations répertoriées dans cette revue. La seule qui me frappe vraiment – et c’est peut-être capital – c’est, sinon l’envahissement de l’écrit par la peinture, une espèce de présence obsédante du graphisme, de la mise en page, chez plusieurs jeunes poètes.

Un seul auteur a mêlé texte et tableaux.Je ne me souviens pas avoir remarqué - quand j’ai commencé à lire attentivement et activement la poésie – cette présence de portraits, paysages, figures animales ou humaines et des couleurs, dans la poésie. On pourrait dire que cette génération ouvre toutes les portes, d’un seul coup, dans un même mouvement, avec une certaine furie pour respirer, s’exprimer et maîtriser le réel. Peut-être ont-ils fréquenté plus que nous les poètes-peintres comme Hugo, Michaux ? De toutes façons, ce serait bon signe. Mais ce petit fait méritait d’être signalé, peut-être que cet événement marque un tournant sinon décisif, du moins majeur dans la fonction et la réalisation du dire ou du faire poétique. Nous assistons peut-être à ce processus d’"énantiomorphose ", parfaitement décrit par E. Canetti et au cours duquel dissimuler et démasquer se tiennent. Il y a dans cette démarche un désir profond de ne pas parler et simultanément une nécessité impérieuse de révéler ce que l’on tait. Cela peut créer une tension extrême chez l’individu. Michaux a eu beaucoup d’expériences de ce genre parfois sous neuroleptiques et hallucinogènes. Mais nos jeunes n’en sont pas là, ils sont au stade de l’expérimentation pure dans une société par ailleurs déchirée. Leurs textes manifestent avec intensité ce sentiment de rupture, de déchirure.

Mais nous voudrions insister sur la richesse de l’inspiration de ces artistes - le pays et son histoire, le vaudou, l’amour, la mort… -, sur la variété des expressions picturales ou poétiques. Si nombre d’artistes présents dans ce cahier ne produisent pas de tableaux naïfs, cependant les couleurs explosent dans la plupart de leurs œuvres, peut-être est-ce une façon de supporter la grise réalité de la misère ou d’idéaliser un avenir espéré ou de faire offrande à une puissance supérieure, mais peut-être est-ce tout simplement la manifestation d’une extraordinaire appétence pour la liberté, d’un formidable vouloir-vivre.

Ce cahier est porteur d’un grand espoir, il montre la vitalité créatrice de nos compatriotes ; cette initiative mérite d’être hautement saluée et nous lui souhaitons un franc et plein succès.

Jean Métellus

 

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