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Un vrai désir du courage et de l'intelligence
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 Article publié le 19 décembre 2010.

oOo

« La plus belle émotion qui se puisse éprouver est l’émotion mystique.

 Elle est le germe de toute vérité en art comme en science.

L’homme qui ignore cette émotion ne vaut pas mieux que s’il était mort ». (1)

 

Miroir

Ô miroir

Dis-moi qui je suis

Mais tu n’es qu’un miroir

Tu ne peux refléter que mon image

Ma belle image corporelle

Enveloppe de pensées et porteuse de ténèbres

Ô miroir

Beau miroir

Objet d’étain, de mercure et de verre

Tain réfléchissant d’un visage au tain ténébreux

Teinté le tain de ce teint ténébreux et se regarder en face sans se voir

Se regarder en face et s’apercevoir

S’apercevoir d’une image qui est sans doute la nôtre

Certainement une autre image

Une image immobile qui essaie de sourire

De se sourire à elle-même

Mais est-ce un sourire

Mais est-ce mon sourire

Est-ce le sourire d’un autre qui n’est pas moi-même

Est-ce le regard d’un regard qui ne regarde plus

Prend-t-il encore le temps de se voir

D’encore s’apercevoir

Fait-il de tout cela une simple icône dorée dans laquelle on se reflète

Un beau tableau satisfait, complaisant et suffisant

Comme aimanté par ce reflet de soi

Mais attention

Image inversée et donc contrefaite

Image qui semble dans son encadrement immuable

Intangible

Inbousculable

Alors se pose la question

Suis-je moi

Suis-je lui

Suis-je un

Suis-je deux en un

Suis-je Tout en Un

Suis-je Un en Tout

Mousquetaire en marche perpétuelle

Mousquetaire en marche spirituelle

Chevalier bienfaisant

Parvenir au soi par l’abandon

Et traverser ce miroir

Du grand Tout pour Un

Du Un pour le grand Tout

Mais qui suis-je

Suis-je vraiment

 

Suis-je vraiment

À cette question un vrai désir m’envahie

Un vrai désir du courage et de l’intelligence

« Le désir est toute action et toute pulsion » (2)

Il est impossible « de parvenir » à quoi que ce soit « sans désir puisque la base fondamentale de la sagesse n’est que le désir de la connaître. » (3)

Désir courageux d’être dans son être

Ce désir « qui renaît à chaque fois que nous prenons conscience

de la beauté et du bonheur » (4)

Désir de s’inscrire dans l’énergie vitale

Dans la vie

Désir d’asseoir son existence juste à la bonne place

Pas à côté de soi

Pas à la place des autres

Mais en soi avec humilité, patience et charité

Trouver le courage de s’asseoir pour bouger en soi

Trouver la force d’exister sans se tordre de douleur

Avoir ce désir qui taraude l’anima d’Etre

L’étoile scintillante, l’étincelle divine, cintia animae

L’étincelle du courage courageux de l’éternel compagnon du tour des mondes que nous sommes

Le courage

« Cette vertu qui surmonte la peur » (5)

Le courage

C’est toujours être seul

Braver le danger de soi

Résister à la crainte de l’immobilité

Résister à la douleur

« Quel soulagement pour l’esprit que la vérité :

mais une fois celle-ci entraperçue, quel tourment ! » (6)

Alors le courage c’est accepter ce risque permanent

Le courage est conventionnellement attribué à l’organe interne qui rythme la vie, le cœur

Mais ce cœur n’est que symbolique s’il n’est pas pourvoyeur de l’impulsion de vie

Ce cœur courageux est propulseur de l’impulsion divine

Courage heureux

Frère, il ne me reste qu’à le conquérir

A gravir encore et encore

Marche après marche

De démarches en démarches

Redescendre les marches pour les remonter

Un pas en avant

Un pas en arrière

Plus de pas en avant que de pas en arrière

Avancer coûte que coûte

Avancer dans ce désir de la bienfaisance

Écarter le voile qui nous ferme les yeux

L’écarter et regarder les yeux grands ouverts

Traverser le miroir cette fois

Parcourir les plaines

Pour conquérir les collines et les montages

Passer les cols

Constamment s’élever

Se décoller la rétine du miroir

S’en convaincre

Ce ne sera certes qu’un regard imparfait

Mais c’est un bon regard de s’en convaincre

C’est le regard de l’intelligence

C’est intégrer l’intelligence dans ce cheminement

Intelligence

Inter-ligere

Intelligence

Inter-ligere

Entre lier

Inter-ligere

Re-ligere

Pour entrelacer les idées pour mieux sans détacher

Pour mieux Être

Seul avec soi

Face à soi sans miroir, cette fois

Courage

Il faut être courageux pour être intelligent mais seul

 

Mais attention les satanés miroirs du profane veillent

Vigilance

Il me faut rester vigilant, vaillant et exigeant face aux arcanes ténébreux qui nous accablent

Pour s’entre-délier de nos métaux lourds

Pour se convaincre de cette intelligence-là de s’être pris par la main qui nous construit

Qui nous tire désespérément en avant

Cette intelligence-là, mes frères

Cette intelligence-là

C’est comme pris en mains par la divine essence qui nous anime

C’est le cheminement constructeur

Aller viens

Viens

Je t’emmène

Viens, viens

Tu te soulèves

Ne le vois-tu pas, ne le sens-tu pas, tu te soulèves

Tu te décolles du sol et de ta peau

Pour n’Être que soi, pour Être

Être seulement là où on doit Être

Et « Constamment s’élever par ces deux puissances que sont l’intelligence et la volonté. » (7)

Un vrai désir du courage et de l’intelligence

Qu’on se le dise

Il faut beaucoup de ce courage-là pour Être

Sans quiconque soit-là pour nous dire là où on peut Être

Là où on doit Être

Il faut beaucoup de courage

Certes aussi auprès

À côté des autres

Mais surtout en soi

 

S’aventurer du profane au sacré

Sans cesse,

S’aventurer du sacré au profane

Sans cesse, sans cesse

Sans répit

La vie n’est faite que de ce « sans cesse »

De ce courageux jeu d’équilibriste

Entre le profane et le sacré

Entre l’avoir et l’Être

Sans cesse remettre la pierre sous le burin

Sans cesse frapper le burin de son maillet

Cogner sans cesse

Du profane au sacré

Du sacré au profane

Façonner la pierre

Construire pierre après pierre

Comme un vrai compagnon cisèle son œuvre majeure

Qui est Sa vie

Pierre après pierre

Des pierres que l’on ajuste une à une

Des pierres encastrées une à une ou entremêlées de torchis

Peu importe le liant

Pourvu que le contenant soit solidement encré dans la terre

Et bien élancé vers le ciel

Cathédrales

Minarets

Tous décochant leurs flèches vers le cosmos

Paratonnerres

Réceptacle théurgique

Terre / Ciel

Résolument voué à la bienfaisance

Façonner la pierre encore et encore

Regarder la pierre

Polir la pierre comme un joyau précieux

Comme un joyau devin

Devin du divin

Divin de ce dit « vin enivrant »

Sorte d’« In vino veritas » divin

 

Dans cette ivresse-là

Par cette ivresse-là

Prendre sans cesse

Sans cesse à revers les instants de sa vie

Ne pas s’endormir

S’entendre parler

Puis s’écouter

S’écouter tendrement

Mais s’écouter sans concession

S’écouter sans miroir, sans reflet

S’écouter, profilé comme un carénage pour fendre l’air

Pour pourfendre les mauvais airs de famille

Caréner son anima pour ne pas se confondre en avoir

En acquis

Se fendre avec élégance de n’être qu’en soi

 

Ah, hum

L’odeur de la terre

D’où vient la vie et où repart la vie

Le poids du socle de la charrue qui racle le sol

Retourner la terre pour la régénérer

Et pour qu’elle nous permette de planter

Et pour qu’elle nous permette de voir pousser les graines

Pas seulement les contempler béatement mais participer

« La persévérance est l’essence même de la création » (8)

Participer donc

Arroser la graine

Devenir la graine

De l’induction à la déduction

 

Ah, hum,

Je suis une coupe

Je suis une coupe qui reçoit

Je suis la coupe

La coupe pleine d’un bon vin divin

Ivresse des hauteurs

Ivresse du courage d’être ivre

De l’intelligence du lâcher prise

Ivresse d’être un bon millésime

Tanin culotté et culottant la coupe

Je suis une coupe oui qui me remplie d’ivresse

Je bois et rebois de ce vin divin

Étourdi pour ce « sans cesse »

Sans cesse se laisser boire à sa propre source

Sans cesse se laisser surprendre à sa propre soif

La lumière éclaire ces vignes pour que le raisin se dore de bienfait

Pour que le raisin se gorge encore plus

par ces racines qui nous encrent

Droits ici bas

Bien à la verticale

Terre / Ciel

Inter-ligere

Re-ligere encore et toujours

Recueillir et transmettre

Relier terre et ciel

Remuer terre et ciel

Oui gorger le raisin de ce sucre

Gorger le raisin de lumière

Chaptalise-le du sucre qui enivre son œnologue dans les ténèbres

Fasse que l’œnologue s’enivre en toute lucidité

Mystique et lucide à la fois

Avec foi en la terre et la vie qu’elle procure

Raisin prêt à craquer par la lumière qui l’éclaire

Qui l’éblouit tant le rayon lumineux est luminescent

Lumens paroxystiques

Raisin craquant engorgé de lumière

Raisin devenu vin

Vin évanescent de divin

Vin parfumé au divin

 

Par tous ces mots je suis ivre et suis porté par l’émotion mystique

« Si les souffles de son parfum s’exhalent en Orient,

un homme privé d’odorat

devient dans l’Occident capable de les sentir.  » (9)

 

C’est alors et alors seulement, que l’on peut passer

De l’imagination

A l’imaginaire acquis et enseigné

Et enfin à l’imaginal induit et divin (10)

Cet imaginal-là qui pour l’artiste dépasse l’imaginaire (11)

Cet imaginal-là

Pour celui, artiste de sa propre vie, dépasse aussi l’imaginaire acquis et appris

Cet imaginal qui extirpe le profane de ses ténèbres vers la lumière

Cet imaginal que l’on porte en soi

Même si

Même si parfois on le cache pour ne pas contraindre son prochain à la question, aux questions

Même si parfois on le cache lorsqu’il nous arrive de l’approcher, de le cajoler, de s’y confondre, de s’y transcender, de s’y transe ascender

Cet imaginal génial

Géniteur de notre divin

Il faut du courage pour le faire sien

 

« Le ciel est par-dessus le toit.

Si bleu, si calme !

Un arbre, par-dessus le toit,

Berce sa palme (…)

 

Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là,

Simple et tranquille.

Cette paisible rumeur-là

Vient de la ville » (12)

Pour conclure :

« Mon cœur devient capable de toute image

Il est prairie pour les gazelles, Couvent pour les moines,

Temple pour les idoles, Mecque pour les pèlerins,

Tablettes de la Torah et livre du Coran.

Je suis la religion de l’Amour,

Partout où se dirigent ses montures,

L’Amour est ma religion et ma Foi. » (13)

 

Un vrai désir du courage et de l’intelligence m’enivre et me porte
et m’enivrera indéfectiblement !

 

La Dauberie, le 17 décembre 2009

 

 

 

(1) Albert Einstein

(2) Définition du Stoïcisme

(3) L.-C. de Saint Martin

(4) Marcel Proust

(5) Alain

(6) Edmond Jabès

(7) Maître Eckhart

(8) André Vandamme

(9) Citation tirée de L’éloge du vin d’Omar Ibn al Farid, poète soufi

(10) Cynthia Fleury

(11) Henri Corbin

(12) Paul Verlaine

(13) Ibn Arabi, soufi andalou

 

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