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Article publié le 1er février 2011. oOo Le chant de la vie
Ma viole d’Ingres tintant au fond de la nuit Mon ange blanc traversant Minuit Ô ma génétique… Chante-moi ce beau chant de la vie !
Se peut-il que dans mes chromosomes Il y ait autant de poésie ? Que la Cytosine avec la Guanine s’allie Et la Thymine et l’Adénine font leur nid ?
Chante-moi ce beau chant de la vie Ce zygote solitaire dans le chiasma infini Qui ne veut se taire, et qui fait ses petits Et moi qui pensais venir du Paradis !
Ô ma génétique… Me dis-tu que Drosophile est ma lointaine cousine ? Se partagent mon héritage singe et bécassine ? Berce-moi cette douce mélodie, ce petit air assassine !
Mon ange blanc traversant Minuit Eugène l’incompris se soit-il trompé de gène ? Ni race il y a, ni peuple élu, ni Dieux à Carthagène ? Seulement une lyre à la vie, et le souffle des gènes !
Ma viole d’Ingres tintant au fond de la nuit Combien d’esprit dans ta veine, et combien de génie ! Se peut-il que Dolly soit la fille d’Eugénie ? Et un jour verra-t-on notre vie rajeunie ?
Ô ma génétique… Es-tu si monstre qu’il faille t’enchaîner à l’éthique Ces bases, ces sucres, ces ligases si diaboliques ! Chante-moi ce beau chant bucolique…
Un soir, à Majorelle
Il a vu la photo Il a dit : « - C’est elle ! »
Une photo que j’ai faite Pour fixer une hirondelle Perchée sur son faîte Puis s’envolant à tire-d’aile
Il a vu la photo Il a dit : « - C’est elle ! »
Une photo que j’ai faite Dans un square à Majorelle Ce soir-là, il y avait fête Et si belles dames, sous leurs ombrelles
Il a vu la photo Il a dit : « - C’est elle ! »
Une photo que j’ai faite Sous les feuilles en dentelle Sous l’ombre clairsemée, bien nette D’arbres centenaires, sur l’herbe éternels
Il a vu la photo Il a dit : « - C’est elle ! »
Une photo que j’ai faite Au hasard de la manivelle Sans vouloir tenter la bête Sans vouloir fixer la belle
De noble horreur ses yeux saisis Le Monsieur trembla de peur ! Ses grandes jambes si fléchies… Qu’il s’asseya sur son bonheur !
- C’est elle !
Là, au bout de cette clarinette Si, si, c’est elle ! J’en ai souvenir encore bien net Et cette tache noire sous sa prunelle !
- C’est elle !
Elle bouge ! Oh, je ne puis voir ! Elle vient hanter mes esprits Me noie de désespoir Elle frappe après Minuit !
- C’est elle !
Elle sort ! De ses yeux me taraude J’ai beau fermer les miens, elle me poursuit ! Que me veut cette affreuse nigaude ? De voler mon âme, et peupler mes nuits !
- C’est elle !
Regardez comme elle est belle ! Si frêle, en l’air suspendue Ses voiles chatoient, on dirait une hirondelle Oh, je n’en peux plus !
Les mains interloquées, quelque peu ébahi Je regarde ce Monsieur Sur son séant assoupi Les yeux levés aux cieux
Qu’a-t-elle ma photo D’effrayer si brutement Ce Monsieur gigolo Qui me la tend poliment ?
Une photo que j’ai faite Dans un square à Majorelle Sous l’ombre clairsemée, bien nette Pour fixer une hirondelle
J’ai vu la photo Et j’ai dit : « - C’est elle ! »
Oh, ma douce folie ! Mon amante éternelle ! Tes yeux si jolis ! Ton cœur si cruel !
Excuses-moi, je ne t’ai vu Sous cet habit d’hirondelle Tu passes inaperçue Si belle sous ton ombrelle !
Frappe, frappe après Minuit Je t’attends, ma douce folie Viens peupler mes nuits Après tout, chacun sa folie !
Chaude larme
Comme une lame, l’onde avance Comme une lame L’onde de choc, choque l’âme
Etincelles, Bang, Big-bang !
Je souris dur, au coin d’une larme Qui tombe…
Elle dégouline, elle arme Se rétracte, se réfracte, elle désarme Elle tombe…
Il faut que larme s’enflamme !
Elle rejaillit, s’embrase Me regarde de ses yeux doux Etincelle, Bang, Big-bang ! Artifice et firmament Elle disparaît dans le décor
Où est ma larme ? Je veux ma larme !
Je l’avais bien là A coté de moi Elle me tenait chaud Et chauffait mon émoi
Maintenant j’ai froid Froid dans le dos Froid dans le désert Perdu sans émoi
Je n’ai pas une larme A mettre sous mon âme A suspendre, à sustendre Au-dessus de la lame
Comme une lame L’onde de choc, choque l’âme Et pas une larme !
Le désert…
Mémoire en friches Souvenirs en jachère Chagrins séchés, arides Emotions viagères
Une source était là Elle a séché naguère Pas une goutte ! Pas une larme !
Comme une lame L’onde de choc, choque l’âme Et pas une larme !
Un vent chaud Sirocco
Dégouline sur ma terre Dresse mes cheveux sur ma tête
Tout s’assèche ! Le brin d’herbe verte Le caillou qui tenait Le brin d’herbe verte La bosse du chameau Le puits du chamelier Même la queue du scorpion Et la feuille sur le rameau
Comme une lame L’onde de choc, choque l’âme Et pas une larme !
Tout s’assèche ! La synapse qui tenait mon chapeau Le neurone qui gardait mon troupeau La fontaine qui prenait l’eau L’eau de mes ruisseaux Où coulaient mes limbes cervicaux
Tout s’assèche ! Je cherche, vainement Une larme dans ma tête Entre-lac de bois sec A mettre sous mon âme A suspendre, à sustendre Au-dessus de la lame
Comme une lame L’onde de choc, choque l’âme Et pas une larme !
Elle s’est brisée Sous les ailes des oiseaux…
A corps perdu
Sur une plage de fin du monde Un corps s’enlace, éperdu Des corps s’entassent, le ventre nu Décor qui passe… Le temps d’une seconde
Sur une plage de fin du monde Une fesse s’enlace, éperdue Des fesses s’entassent, face aux nues Confesse la grâce… Le temps d’une seconde
Sur une plage de fin du monde Un sein s’enlace, éperdu Des seins s’entassent, blanc-seing Dessin qui trace… Le temps d’une seconde
Sur une plage de fin du monde Un sexe s’enlace, éperdu Des sexes s’entassent, blanc-velus Sussex de glace… Le temps d’une seconde
Sur une plage de fin du monde Un corps exulte, détendu Une fesse s’exalte, retendue Un sein s’érige, distendu Un sexe s’envole, volupté tendue Le temps d’une seconde
Dans une fable de fin du monde Un corps s’embourbe, décor qui passe Une fesse suffoque, confesse la grâce Un sein se cache, dessin qui trace Un sexe se casse, Sussex de glace Le temps d’une vie, d’une chienne de vie…
Or sang
Un cœur, couleur or sang Un regard, couleur or sang Un cri, couleur or sang Un cormoran d’Ouessant
Mais aussi…
Un fleuve, couleur or sang Une couleuvre, couleur or sang La mer d’Aral, abêtissant Ma mère à Bâle, ahurissant
Alors viens…
Viens, cyanure, viens Tuer tous mes oiseaux Pour ce qui reste, j’en conviens Il faut si peu dans mes ruisseaux
Viens, mercure, viens Brûler la vie de mes enfants Pour ce qui reste, j’en conviens Que vaut la vie de mes enfants ?
Une terre, couleur or sang Une veine, couleur or sang Tisane à la verveine Avec un zeste de moussant
Mais aussi…
Mes poumons, couleur or sang Mes reins, couleur or sang Mes yeux d’airain Qui ne voient guère les passants
Alors viens…
Viens, radium, viens Avec les vents, tu te souviens Je t’attends, je tends mes mains Je sais, tu seras là demain
Viens, polychrome, viens Teins-moi la peau en vert Comme un joli martien Illico, goûte-moi mon enfer
Mine d’or, dis-moi, quel est le prix de l’or Jaugé à l’once de sang, et à l’envers du décor ?
Et toi puits, dis-moi, quel est le prix du brut Jaugé à l’aune de l’Amazone, et au regard de l’Inuit ?
Un diamant brille de mille feux, là-bas… Et mille feux, ici, dévastent ma maison !
Miloud HALBOUCHE |
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