Retour à la RALM Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs [Forum] [Contact e-mail]
  
Otrofictif 6
Navigation
[E-mail]
 Article publié le 2 mars 2014.

oOo

tu as la clé oui j’ai la clé et je vais m’en servir

je m’en sers j’entre je pénètre il y a des témoins

je ne toucherai à rien promis juste les yeux là

laisser la porte entrouverte car ils le veulent

si tu la fermes ils vont se douter de quelque chose

 

Apollinaire j’aime ta poésie car tu sais ce que tu dis

chaque fois que chante un obus tu es là plus vivant

que les morts maintenant entourés de servantes

le vin coule à flot le flot coule à vin tu es là

plus vivant que mort et plus poète que Dieu

 

n’entre pas avec moi dans cette scène du crime

mais ne t’éloigne pas reste avec eux derrière

la porte que je n’ai pas refermée comme le mur

 

elle y colle son oreille elle entend ce que je vois

 

Apollinaire j’aime quand tu fais les vers mieux

que les morts et même que les vivants qui ne

sont pas encore morts de cette mort qui est

injuste quand on s’appelle Apollinaire et juste

si on ne s’appelle pas

------------------------j’ai la clé je te dis

oui paterson n’y voit pas d’inconvénient il a dit

c’est drôle cette fois il n’a pas dit bizarre drôle

ça veut dire drôle et bizarre bizarre ne change

pas de conversation tu verras comme la poésie

quand elle se mêle de rendre à la vie sa mort

est un exemple de ce qu’il est possible de posséder

sans voler son prochain et sans faire la guerre

ou alors une guerre juste avec des sentiments

et surtout celui de ne pas être mortel enfin pas

pour l’instant

oui j’ai la clé et j’entre sans toi

sous le regard des témoins qui n’en savent pas

plus que toi d’ailleurs que sais-tu de ce que je sais

que sais-tu du bonheur que j’ai trouvé alors

qu’il n’en était plus question avec toi j’ai perdu

la clé elsie justine elsie juliette tu ne sauras jamais.

 

(Il entre finalement.)

 

« Je ne sais pas, dit Paterson. C’est drôle. Je ne sais pas ce qu’il faut en penser. Il était… dévasté. Tu connais mon intuition. Oui, oui ! J’éteins. Voilà ! » il éteint et se met à penser, dans le noir complet de la chambre il n’arrive pas à une conclusion, ni même à une hypothèse au moins un peu crédible. « Pat ! Tu penses. Dors maintenant ! »

 

(J’entre avec lui.)

 

On ne devrait pas aller plus loin que la connaissance de la surface. pourquoi cherches-tu à en savoir plus ? parce que c’est un roman. un roman est de la poésie en prose, dit Furetière plus de trois siècles avant toi. ne t’éternise pas ici. ne te dépose pas comme la poussière. n’ouvre même pas la fenêtre pour revoir la rue sous un angle légèrement différent. ne caresse pas le rideau. cette odeur n’est pas la sienne. tu n’as jamais su qui elle était pour les autres. mais quels autres, bon sang !

 

Apollinaire poète n’est pas là au rendez-vous

de la mort que quelqu’un de plus vivant que lui

a donné à quelqu’un de moins mort que toi

 

Rentre chez toi

Petit oiseau

Sinon papa

Fera pas beau

 

Maman le sait

Depuis toujours

C’est pas d’l’amour

C’est du raté

 

Hou Hou ce qu’on est bête eu !

Hou Hou de pas savoir compter

Hou Hou ya pas plus bête eu !

Bé bé a fait fait pipi !

 

que cherches-tu toi qui n’es pas poète ?

que trouveras-tu si tu cherches mal ?

qu’arrivera-t-il si tu trouves la vérité ?

que t’arrivera-t-il si personne n’y croit ?

 

Il commença par compter le nombre des tiroirs. Il n’y avait pas de traces de lui ici. À moins qu’elle en ait transporté après… depuis cet ailleurs que tu as tant aimé, pensa-t-il. Mais les souvenirs commençaient à perdre leurs contours.

 

ramène la clé petit père ramène à papa

Apollinaire sera content chaque fois

que tu ramèneras la clé à ton géniteur

 

n’oublie pas que la poésie est un rêve

d’adulte petit père qui n’a pas lu qui

n’a pas pris le temps de lire dans ses yeux…

 

(Il referma la porte. Il n’avait rien trouvé de compromettant. Paterson n’exigerait rien d’autre de la science. Il se doutait de quelque chose.)

 

(La vitrine d’Eugène est noire maintenant. C’est de sa fenêtre qu’il la regarde. Telle est la poésie : ils coupent l’électricité et tu te souviens de ce qu’elle éclairait. Ne pense pas à autre chose, Petit Père !)

 

— C’est drôle, dit-il tout haut. Nous ne vivons plus que pour nous-mêmes. As-tu pensé à quelqu’un aujourd’hui. Je veux dire : sans intention de t’en servir ? Non. Il ne le dit pas. Il le pense seulement. Elle dort déjà.

 

ramène à papa

la petite clé

que maman t’a donnée

 

ramèn’ toi p’tit père

n’oublie pas la clé

et ne pens’ plus à cette garce !

 

Un commentaire, une critique...?
modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides. Servez-vous de la barre d'outils ci-dessous pour la mise en forme.

Ajouter un document

Retour à la RALM Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs [Contact e-mail]
2004/2024 Revue d'art et de littérature, musique

publiée par Patrick Cintas - pcintas@ral-m.com - 06 62 37 88 76

Copyrights: - Le site: © Patrick CINTAS (webmaster). - Textes, images, musiques: © Les auteurs

 

- Dépôt légal: ISSN 2274-0457 -

- Hébergement: infomaniak.ch -