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Article publié le 2 mars 2014. oOo tu as la clé oui j’ai la clé et je vais m’en servir je m’en sers j’entre je pénètre il y a des témoins je ne toucherai à rien promis juste les yeux là laisser la porte entrouverte car ils le veulent si tu la fermes ils vont se douter de quelque chose
Apollinaire j’aime ta poésie car tu sais ce que tu dis chaque fois que chante un obus tu es là plus vivant que les morts maintenant entourés de servantes le vin coule à flot le flot coule à vin tu es là plus vivant que mort et plus poète que Dieu
n’entre pas avec moi dans cette scène du crime mais ne t’éloigne pas reste avec eux derrière la porte que je n’ai pas refermée comme le mur
elle y colle son oreille elle entend ce que je vois
Apollinaire j’aime quand tu fais les vers mieux que les morts et même que les vivants qui ne sont pas encore morts de cette mort qui est injuste quand on s’appelle Apollinaire et juste si on ne s’appelle pas ------------------------j’ai la clé je te dis oui paterson n’y voit pas d’inconvénient il a dit c’est drôle cette fois il n’a pas dit bizarre drôle ça veut dire drôle et bizarre bizarre ne change pas de conversation tu verras comme la poésie quand elle se mêle de rendre à la vie sa mort est un exemple de ce qu’il est possible de posséder sans voler son prochain et sans faire la guerre ou alors une guerre juste avec des sentiments et surtout celui de ne pas être mortel enfin pas pour l’instant oui j’ai la clé et j’entre sans toi sous le regard des témoins qui n’en savent pas plus que toi d’ailleurs que sais-tu de ce que je sais que sais-tu du bonheur que j’ai trouvé alors qu’il n’en était plus question avec toi j’ai perdu la clé elsie justine elsie juliette tu ne sauras jamais.
(Il entre finalement.)
« Je ne sais pas, dit Paterson. C’est drôle. Je ne sais pas ce qu’il faut en penser. Il était… dévasté. Tu connais mon intuition. Oui, oui ! J’éteins. Voilà ! » il éteint et se met à penser, dans le noir complet de la chambre il n’arrive pas à une conclusion, ni même à une hypothèse au moins un peu crédible. « Pat ! Tu penses. Dors maintenant ! »
(J’entre avec lui.)
On ne devrait pas aller plus loin que la connaissance de la surface. pourquoi cherches-tu à en savoir plus ? parce que c’est un roman. un roman est de la poésie en prose, dit Furetière plus de trois siècles avant toi. ne t’éternise pas ici. ne te dépose pas comme la poussière. n’ouvre même pas la fenêtre pour revoir la rue sous un angle légèrement différent. ne caresse pas le rideau. cette odeur n’est pas la sienne. tu n’as jamais su qui elle était pour les autres. mais quels autres, bon sang !
Apollinaire poète n’est pas là au rendez-vous de la mort que quelqu’un de plus vivant que lui a donné à quelqu’un de moins mort que toi
Hou Hou ce qu’on est bête eu ! Hou Hou de pas savoir compter Hou Hou ya pas plus bête eu ! Bé bé a fait fait pipi !
que cherches-tu toi qui n’es pas poète ? que trouveras-tu si tu cherches mal ? qu’arrivera-t-il si tu trouves la vérité ? que t’arrivera-t-il si personne n’y croit ?
Il commença par compter le nombre des tiroirs. Il n’y avait pas de traces de lui ici. À moins qu’elle en ait transporté après… depuis cet ailleurs que tu as tant aimé, pensa-t-il. Mais les souvenirs commençaient à perdre leurs contours.
ramène la clé petit père ramène à papa Apollinaire sera content chaque fois que tu ramèneras la clé à ton géniteur
n’oublie pas que la poésie est un rêve d’adulte petit père qui n’a pas lu qui n’a pas pris le temps de lire dans ses yeux…
(Il referma la porte. Il n’avait rien trouvé de compromettant. Paterson n’exigerait rien d’autre de la science. Il se doutait de quelque chose.)
(La vitrine d’Eugène est noire maintenant. C’est de sa fenêtre qu’il la regarde. Telle est la poésie : ils coupent l’électricité et tu te souviens de ce qu’elle éclairait. Ne pense pas à autre chose, Petit Père !)
— C’est drôle, dit-il tout haut. Nous ne vivons plus que pour nous-mêmes. As-tu pensé à quelqu’un aujourd’hui. Je veux dire : sans intention de t’en servir ? Non. Il ne le dit pas. Il le pense seulement. Elle dort déjà.
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