Deleuze, Gilles
Philosophe, théoricien du structuralisme, courant d'idées auquel il lie étroitement la notion de série, qu'il appuie sur Freud et Lacon, parfois sur Levi-Strauss *. L'originalité de Deleuze réside dans les nombreux emprunts au champ des mathématiques, dont la validité et l'opportunité ont fait l'objet de controverses. Néanmoins Gilles Deleuze ramène la problématique de la série a son origine conceptuelle : Leibniz et le calcul infinitésimal..
Logique du sens
C'est avec la sexualité, c'est-à-dire avec le dégagement des pulsions sexuelles, que commence la série parce que la forme sérielle est une organisation de surface.
Or, dans les différents moments de la sexualité que nous avons considérés précédemment, nous devons distinguer des espèces de séries très différentes. En premier lieu, les zones érogènes dans la sexualité prégénitale : chacune s'organise en une série, qui converge autour d'une singularité représentée le plus souvent par l'orifice entouré de muqueuse. La forme sérielle est fondée dans la zone érogène de surface pour autant que celle-ci se définit par l'extension d'une singularité ou, ce qui revient au même, par la répartition d'une différence de potentiel ou d'intensité, avec maximum et minimum (la série s'arrête autour des points qui dépendent d'une autre). La forme sérielle sur les zones érogènes est donc également fondée sur une mathématique des points singuliers, ou sur une physique des quantités intensives. Mais c'est encore d'une autre façon que chaque zone érogène porte une série : cette fois, il s'agit de la série des images projetées sur la zone, c'est-à-dire d'assurer à la zone une satisfaction auto-érotique. Soit par exemple les objets de suçotement ou images de la zone orale : chacun pour son compte se fait coextensif à toute l'étendue de la surface partielle, et en parcourt, en explore le champ d'intensité, du maximum au minimum et inversement ; ils s'organisent en série d'après la façon dont ils se rendent ainsi coextensifs (par exemple le bonbon dont la surface est multipliée par croquement, et le chewing-gum par étirement), mais aussi d'après leur origine, c'est-à-dire d'après l'ensemble dont ils sont extraits (autre région du corps, personne extérieure, objet extérieur ou reproduction d'objet, jouet, etc.) et d'après leur degré d'éloignement par rapport aux objets primitifs des pulsions alimentaires et destructrices dont les pulsions sexuelles viennent de se dégager. En tous ces sens, une série liée à une zone érogène paraît avoir une forme simple, être homogène, donner lieu à une synthèse de succession qui peut se contracter comme telle, et de toute manière constitue une simple connexion. Mais en second lieu, il est clair que le problème du raccordement phallique des zones érogènes vient compliquer la forme sérielle : sans doute les séries se prolongent-elles les unes les autres, et convergent autour du phallus comme image sur la zone génitale. Cette zone génitale a elle-même sa série. Mais elle n'est pas séparable d'une forme complexe qui subsume maintenant des séries hétéérogènes, une condition de continuité ou de convergence ayant remplacé l'homogénéité ; elle donne lieu à une synthèse de coexistence et de coordination, et constitue une conjonction des séries subsumées [...].
[Des différentes espèces de séries]