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Mao Zedong


Dirigeant communiste chinois. La traduction de ses oeuvres était établie par le régime chinois, d'où certaines étrangetés linguistiques. L'assimilation des notions de progrès et de série offrent une trace de l'héritage conceptuel d'Auguste Comte.


De même, nous avons vu que dans le domaine de la pensée également, nous ne pouvons pas échapper aux contadictions et que, par exemple, la contradiction entre l’humaine faculté de connaitre, intérieurement infinie, et son existence réelle dans des hommes qui sont tous limités extérieurement et dont la connaissance est limitée, se résout dans la série des générations, série qui, pour nous, n’a pratiquement pas de fin, -- tout au moins dans le progrès sans fin.



Martinet, André


Linguiste. Martinet est l'un des rares de sa discipline à avoir donné à "série" un sens technique précis.


Une classe de phonèmes consonantiques caractérissés par un même trait, comme /p f t s _ k/ en français, qui s'ordonnent le long du chenal respiratoire est dite série ; les consonnes qui comme /t n d/ ou /_z/, qui s'articulent au même point de ce chenal, et au moyen du même jeu du même organe, forment ce qu'on appelle un ordre. On distingue, en français, entre une série sourde, une série sonore et une série nasale, entre les ordres bilabial, labio-dental, apical, sifflant, chuintant, palatal, et dorso-vélaires. Deux séries comme /p f t s s _ k/ et /b v d z z _ g/ forment ce qu’on appelle une corrélation.


Mathieu, Jean-Claude


Critique littéraire. Son œuvre principale est une thèse sur La Poésie de René Char* remarquablement documentée. Cet ouvrage qui accorde une large place à la période « surréaliste » de René Char esquisse une analyse des « séries énumératives » qui structurent une partie du Marteau sans maître.


Entre les segments radicalement solitaires le poème ne peut opérer que des classements et aligner des séries […] Ces listes et séries révoquent l’instituteur - bientôt apparaîtra le « chemin des écoliers » et l’école buissonnière -, désorganisent l’ordre maternel, coupent hardiment dans des corps de doctrine qui « parlent comme des livres » […] Dans le poème, le classement combine deux trait : la segmentation en vers libres parallèles qui se superposent dans la verticalité, la marque du pluriel qui donne la plus grande dispersion à chacune des catégories.



Meschonnic, Henri


Poéticien et poète. Sa "théorie du rythme" est controversée, et plus encore son style polémique. La série a longtemps eu chez lui un statut contradictoire, offrant un cas d'extrême confusion sémantique, jusqu'à ce qu'il développe la notion de "sémantique sérielle" - diffusion sémantique de chaque phonème dans un texte.Le style péremptoire ne fait que renforcer l'énigme que constitue le plus souvent le sens de "série" et, plus encore, de "sériel".



Critique du rythme


La signifiance est de tout le discours, elle est dans chaque consonne, chaque voyelle qui, en tant que paradigme et que syntagmatique, dégage des séries


La rime est l’élément de composition... Sa position est secondaire. Le parallélisme, ou plutôt le sériel, y est premier


La rythmique française, dans le cadre des vers traditionnels, est sérielle, et non systématique.


Plus la poésie a privilégié la rythmique, plus elle a systématisé une sémantique sérielle, qui multiplie l’“inflexion oratoire” -- l’accent consonantique qui, ajoutait Lote, “n’exerce qu’une action minime sur la voyelle, tandis que la valeur de la consonne s’accroît dans des proportions énormes”.



Politique du rythme, politique du sujet


Mais je ne prends pas le discours seulement au sens de Benveniste. J’entends par là une interaction entre la langue et la littérature, à prendre comme une sémantique du continu, selon ses rythmes, sa prosodie, sa sémantique sérielle .


Naturellement, la valeur du continu se vérifie sur d’autres actes poétiques dans d’autres langues, avec d’autres moyens. Comme ces trois longues qui égalisent le cri de douleur des tués et le cri de triomphe des tueurs, dans un vers d’Homère, toute une anthropologie d’un rythme ou la sémantique sérielle du nom Ophelia dans Hamlet.


Traité du rythme


C'est l'energeia, au sens de Humboldt, "énergie" au sens de force de travail, à la fois action et activité, l'activité d'un langage qui se montre et se réalise dans la rythmique, qui est ainsi la matière même de l'effet de sens. Ce qui, dans un tout autre registre, apparaît aussi dans Les Tragiques d'Agrippa d'Aubigné. La place manquant pour donner assez d'exemples, on n'en retient ici que deux. Mais la violence du discours, sa charge émotionnelle sont entièrement dans la poétique du rythme chez d'Aubigné. Dans le premier vers (livre II, "Princes", vers 254), dix positions sur douze sont marqués, dont deux et sept successives


Nul esprit n'est esprit, nul âme n'est belle âme


et, ce sont les points forts, mais ils sont extrêmement nombreux dans Les Tragiques, deux vers qui se suivent (III, "La chambre dorée", vers 1014-1015), avec onze et dix positions marquées sur douze. Violence du sens, violence du rythme


Dîtes vrai, c'est à Dieu que compte vous rendez,

Rendez-vous la justice, ou si vous la vendez ?


sans négliger la différence de force entre une consonne d'attaque de syllabe et une consonne finale, qui fait liaison (les deux /s/ du mot justice sont en fin de syllabe), on ne peut pas effacer qu'il y a un effet de série, repris en force par le /s/ d'attaque de si. De même les deux /ã/ de Rendez-vendez ne sont pas accentuants, mais sériants : ils contribuent au jeu de langage qui lie les deux mots par leur opposition même.




Michaux, Henri


Poète. "L'Ether" assimile avec beaucoup de force la série à un phénomène de récursivité, éprouvée sur le plan de la conscience.


Des pensées en écho déferlent en lui. Mais même à ces échos il ne peut faire face. S’il a froid, il pense aussitôt qu’il pense avoir froid, puis il se voit penser qu’il pense qu’il a froid; à peine s’est-il émerveillé de se voir penser toute cette série qu’aussitôt il se voit s’en émerveiller, puis assiste au spectacle de se voir s’émerveiller de voir qu’il pense qu’il se voit penser qu’il a froid et ainsi toujours en retraite, jamais plus lui, mais derrière lui, à s’observer, il peut enfin se croire perdu.


La série des retraites, des replis des postes d’observation de la pensée première est telle que, quoique représentant l’avenir par son contenu, et, en son passage loin d’être du passé, au contraire et presque excessivement actuelle, à en perdre la respiration, elle est loin d’être une compagne comme sont les pensées en général.


L’éther et l’amour sont deux tentations et deux attentats de l’homme contre le temps. Le temps est chassé durant les saccades de la jouissance. La série précédente est coupée, on peut donc recommencer à partir de 1. .



Millet, Catherine


Critique d'art, rédactrice en chef d'Art Press. Elle a été la promulgatrice la plus importante de l'art conceptuel dans les années soixante et aujourd'hui encore apparaît une des personnalités les plus influentes de l'art contemporain.


[Joseph Kosuth] a présenté une série d'objets usuels, chaîne, scie, horloge, accompagnés de leur photographie et de la définition, extraite du dictionnaire et aggrandie, des mots "chaise", "scie", "horloge". Il empêchait ainsi de greffer sur la proposition tout sens connoté. L'objet n'exprimait rien de personnel par rapport à l'artiste pas plus qu'il ne pouvait être annexé par l'imagination du spectateur en entrant en relation avec quelque souvenir.

Depuis ses propositions réalisées à partir du Thésaurus et jusqu'aux jeux de logique qu'il se propose dans ses dernières expositions, Joseph Kosuth développe le second stade de son travail. [...] Rompant avec la présentation par agrandissements photographiques - trop facilement associées à des tableaux par le public -, Joseph Kosuth a présenté, reproduits sur des affiches collées dans la rue ou dans les emplacements publicitaires des panneaux, des séries de mots extraites des catégories du Thésaurus. Aucune de ses séries n'est propre à engendrer une représentation iconographique, c'est-à-dire susciter une oeuvre formelle précise. Surtout, chaque série appartient à une catégorie plus large et son isolement par Joseph Kosuth est arbitraire. Au niveau de la compréhension abstraite, cet isolement est impossible. La série renvoie automatiquement aux séries complémentaires.



Monet, Claude


Peintre impressionniste. Certains critiques voient en lui le premier peintre "sériel". Le fait est que, dans sa dernière manière, il procéda explicitement par séries, ce dont il s'explique dans sa correspondance.


Je pioche beaucoup et avec ardeur, je m’entête à une série d’effets différents, mais à cette époque, le soleil décline si vite que je ne peux le suivre (...) je deviens d’une lenteur à travailler qui me désespère, mais plus je vais, plus je vois qu’il faut beaucoup travailler pour arriver à rendre ce que je cherche : l’instantanéité.


Il a fait une assez belle journée aujourd’hui et j’ai travaillé dur, mais peut-être pas bien. Cela devient de plus en plus difficile, car je veux finir et le soleil change de course chaque jour et la lumière ne tombe plus de la même façon. Le temps change tellement qu’il me faudrait sortir avec toutes mes toiles dans un carton. Je choisis souvent ce que je vais prendre selon le temps qu’il fait, et je trouve finalement que je ne peux pas travailler parce que, comme aujourd’hui, le temps change pendant mon chemin.


Chaque oeuvre n’acquiert sa valeur que par la comparaison et la succession de la série tout entière.



28 janvier 1909


Cher monsieur Durand,


En réponse à la demande de votre fils, je viens vous dire que cette fois vous pouvez annoncer sans crainte que l'exposition, si souvent ajournée, aura lieu cette année en Mai, mais seulement le 5 si vous le voulez bien [...] Je serai prêt, car mon voyage à Venise a eu cet avantage de me faire voir mes toiles d'un meilleur oeil. J'en ai mis de côté toutes celles qui ne méritent pas d'être exposées [sic] et le reste fera, je crois, une exposition peu banale.

J'allais oublié [sic] de ne pas annoncer cette série sous le nom de "Les reflets" mais comme ceci : "Les Nymphéas, série de paysages d'eau".