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Choix de poèmes (Patrick Cintas)
La queue d’Ochoa est une offense à la chair
![]() oOo Extrait de la [Chanson d’Ochoa]
Une nuit, il entend le rire d’Ochoa. Il met le nez À la fenêtre et voit nettement qu’il s’agit d’une fellation. La fille n’est autre que Raïssa. Il sort la lame de son couteau
Et saigne sa propre chair. La queue d’Ochoa est une offense À la chair. Nous nous reproduisons parce que nous nous Aimons. Tuez la reproduction mécanique et la multiplication
Des possibilités de plaisir. La lame touche l’os. Il continue. Les amants disparaissent au bout de la rue, feux-follets D’une tension interne qui trouvera son expression dans
Le meurtre, on ne peut plus en douter. Il a vu les petits Seins rutilants de salive. Mais la paralysie le cloue À la fenêtre et le couteau s’extrait de la chair et de l’os.
Il tombe sur le dallage de terre cuite et l’écaille d’une Virgule de sang qui s’épanche. Il ne souffre pas, ne sait Pas à quoi il doit cette absence d’une douleur qui serait
La seule explication. Il a peut-être rêvé comme il rêve À l’inexorable. Mescal fournissait aussi les hallucinations, Mais cette nuit le sang de Cayetano était pur comme l’eau
De la fontaine publique dédiée aux femmes reproductrices Et aimantes à défaut d’être amoureuses et nécessaires. Il ne sort pas, se traîne dans sa maison, ne voit que le sang,
Le sien, peut-être le sien, ou le sien, qui peut savoir à qui Appartient cette coulée verbale qui s’exprime par l’esthésie Et l’anesthésie ? Il trouve le feu, le voit couver sous la cendre,
Mais la haine n’a pas cette odeur, un chien le dirait. Doña Cecilia elle-même reconnaîtrait la haine si Le moment était bien choisi pour en parler. Le corps
Prend la tangente de la réalité, si facilement qu’il croit Mourir et s‘accroche au linteau. Il a besoin de lumière. Il sait que la lumière lui rendra le corps et que l’esprit
Pourra alors y penser en toute sérénité. Mais la tristesse Est si profonde cette nuit-là qu’il n’est raisonnablement Plus possible d’espérer. Il n’attend plus rien ni du sang
Ni du feu, mélange propice à la lumière en cas de haine. — Je haïrais l’homme si j’étais ce que la femme est à l’homme. Comment haïrais-je ma fille si elle n’était pas la mienne ? |
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