Nous ne sommes pas faits pour penser.
Nous avons le pouvoir de réfléchir,
ce n’est déjà pas si mal.
Je traverse les vitrines.
Je caresse des objets.
Je travaille à les posséder.
Et je lègue mon infortune.
Quoi de plus triste qu’un homme ?
Et quoi de plus semblable ?
Je vis dans mon appartement.
Je me nourris des autres.
" Bonjour monsieur Alixte
ou monsieur Renaud
ou qui que vous soyez !
Vous me devez de l’argent… "
Le bonhomme s’assoit.
Il a bonne mine.
Il examine mes meubles,
ouvre un livre,
s’étonne de retrouver sur le mur
une image qu’il a déjà vu
quelque part.
" Mais où ? "
Comme si je le savais !
Il faut que je réfléchisse.
J’ai des problèmes.
Et personne ne m’attend
dans la rue.
Vous connaissez quelqu’un
dans la rue, vous ?
J’ai 24 heures pour
y réfléchir. Et je
descends pour me
rendre compte
de la difficulté.
On me connaît.
Pas tout le monde.
Et tous ceux qui me connaissent
habitent quelque part.
Pas dans la rue.
Je cherche longtemps.
La nuit tombe.
Je suis dehors.
Je peux partir.
Mais avec qui ?
Part-on tout seul ?
Le bagage de ma pensée
ne pèse pas lourd.
Mon portefeuille non plus.
Suis-je arrivé ?
Ma porte s’est-elle refermée ?
Que pense-t-on de moi
maintenant ?
Je réfléchis.
Je n’arrête pas de réfléchir.
Mais rien qui vaille une pensée.
Je me demande pourquoi j’écris.
Pour me plaindre…
Trouver une solution…
Revenir chez moi…
Là où je vis encore
comme la tête du serpent
qu’on a coupée.