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Dictionnaire Leray
MAL FOUTU
[E-mail] Article publié le 22 janvier 2017. oOo Sur sa jeunesse, François Morellet a cette phrase : « Je n’avais alors aucun goût pour le "mal foutu" que certains appellent "sensibilité d’exécution ». Et, à la fin de l’entretien qu’il a accordé au magazine d’un musée d’art moderne parisien : « Je vais très bien maintenant. Merci. » Il faut parfois se poser la question du "mal foutu". En toute simplicité. On voit un dessin, on livre, on écoute une pièce bancale. On se dit : "Ce truc est mal foutu", ou bien "mal fichu". On tire un trait dessus. Ou au contraire, on se prend à imaginer tout ce qui aurait dû, ce qui aurait pu être et qui s’est envolé, décapsulé par une grossière pression du réel, l’inhabileté du trait. En un sens ou en l’autre, ne reste qu’à tirer des traits. Le "mal foutu" serait un peu de cela, même : l’irrégularité du trait. Précisément, ce qui accablait dans sa jeunesse François Morellet. On voit un tableau de Léonard de Vinci, on se dit presque instantanément : "Qu’on a dû s’y reprendre ! Et quelle naïveté, enfin, pour croire avoir cru pouvoir représenter !" On rit de la naïveté de Léonard, alors. Mais la terre tremble. Le semblant de cette notion nouvelle du beau en art, qui exclut a priori le "mal foutu" (la sensibilité d’exécution) aura pu être lui-même englouti dans un raz-de-marée inopiné, parce que l’appartement du critique d’art qui en avait esquissé le rêve était situé en bord de mer, sur la côte de Ballaing. Et tout ce temps, des gens continuèrent à dessiner. |
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