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Article publié le 21 février 2021. oOo Quand je t’attrape, je te tanne Le cul et le cuir chevelu O mon orgueilleuse satane Je sais que tu l’as revoulu
Quand je t’attrape ma harpie Je rogne tes griffes ton bec Je mets tes ailes en charpie Et je retourne à mon rebec
Quand je t’attrape salope ointe Toujours entre deux sacrements Je te taille une oreille en pointe Et vante ton tempérament
Quand je t’attrape je te trousse Comme une vieille poule au pot En attendant je fais carrousse Je rince ma tripe au tripot
Quand je t’attrape je vous livre Toi et mon carcan goguenard Qui n’avez jamais lu mes livres Aux instruments de Fragonard*.
Quand je t’attrape je t’étouffe D’un insatiable baiser J’ébouriffe toutes tes touffes L’amour s’enjolive à l’user
Quand je t’attrape je t’immole Pour tuer le temps rien de tel Je t’apporte des figues molles Du pain d’épice un quart Vittel
Quand je t’attrape j’époustoufle Ton jongleur ton cartomancien Ton ange et caetera pantoufle On n’est trahi que par les siens
Quand je t’attrape je t’entraîne Dans ma farandole sans fin Le roi de la fève et sa reine Y meurent de soif et de faim
Quand je t’attrape je te pèle Le prose comme un triste oignon Je reprends ma pioche et ma pelle J’enterre ma vie de trognon
Quand je t’attrape je t’ampute Je te coupe en petits morceaux Pour éviter une dispute Et je me réveille en sursaut
Quand je t’attrape sale bête Quand je t’attrape je te mords Et j’écarquille tes gambettes Le temps de goûter à la mort
Quand je t’attrape dans ma rue Je te parle de mon quartier Des maquereaux et des morues Des grenouilles de bénitier
Quand je t’attrape je t’enferme Dans une cage à triple tour Je regagne la terre ferme La cage est vide à mon retour
Quand je t’attrape sur ma grève Grise brodée au plumetis Je t’embarque pour un long rêve Plein de cris et de clapotis
Quand je t’attrape chez Fombeure Chez Fort chez Daudet chez Defoë J’entre dans ta motte de beurre Ou dans le moulin de Laffaux
Quand je t’attrape tu m’encenses Et tu me sacres galérien Puis tu revêts ton innocence Je pense n’y être pour rien
Quand je t’attrape je te pile Dans un mortier qui sent l’anchois L’ail de Lautrec ou je t’épile Tu n’as que l’embarras du choix
Quand je t’attrape je t’imite La bouche en cœur le fion serré Ma patience a des limites Je regrette mon pré carré
Quand je t’attrape je t’énerve Je te désosse dans les champs Je te rime malgré Minerve Je suis ta lame à deux tranchants
Quand je t’attrape je t’emporte En trousse sur mon canasson Jusqu’à la minuit de ma porte Où je fabrique mes chansons
Je t’attrape Je t’attrape
Robert VITTON, 2015
* Allusion à l’écorché Le Chevalier de l’apocalypse d’Honoré Fragonard né à Grasse en 1732, chirurgien, anatomiste, cousin germain du célèbre peintre Jean-Honoré Fragonard.
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