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Seriatim 3 - [in "Seriatim"]
Seriatim 3 - Toujours la même question... (Patrick Cintas)
[E-mail] Article publié le 23 mai 2021. oOo QUI ? Toujours la même question : Qu’est-ce que je fous ici ? Il en fait une chanson puis : la mésange À tête noire avale goulument une abeille Au seuil de la ruche (au trou de vol) À moins que le philante apivore / Le trottoir est herbu ici, remarque-t-il À voix haute alors qu’il est seul : mystique Des soleils répandus aux pieds des murs. Quelle thébaïde pour une déréliction ! Rouge coquelicot et avoine des champs. Qui m’a déposé ici au milieu de tout ? Je n’aime pas la terre ni la pluie. Inventez tant que vous voudrez : des cultes À foison si vous savez ce qu’est une foison. Ni feu ni eau pourtant : l’herbe est jaune Ici : nous sommes revenus pour exister Encore : trop vieux ou pas assez jeunes / Donnez un nom à chaque rehaut : accumulation De gouttes en surface : qu’est-ce que je fous ici ? Je me fous d’être ici / je ne suis pas venu : j’aime Mieux dormir / ce monde ou un autre : kif-kif. Chacun veut sa part de territoire, ici ou ailleurs, Venu de loin ou vu de près : quelle saison s’en lasse ? Les mots finissent par avoir un sens : quai de gare Perdu au fin fond du pays, à la racine des montagnes Qui donnent le la aux instruments spirituels : déposé Comme un sac des messageries de la solitude. Pour voir l’herbe déjà sèche, ses insectes pressés : sans doute d’en finir : je n’ai pas désiré ce voyage / mais j’ai aimé l’enfance : aimé le voisinage, la mer, Les ciels d’orage / qui m’aime si je n’aime personne ? Voyez les traces des activités économiques qui Expliquent qu’ici tout n’est pas vraiment mort : J’ai aperçu (ou deviné) des yeux par l’ombre Clairs et profonds : ou je les ai imaginés : ainsi Commence le roman qui : tôt ou tard : deviendra Poème : avec ou sans poésie : déposé comme feuille À l’automne d’un voyage en tous points semblable Aux émigrations mises en page par la pratique Du rythme / ne me dites pas que j’ai sauté Du train en marche : profitant d’un ralentissement Consécutif à un suicide : saisissant cette occasion De mettre un terme à ce déplacement insensé D’un point à un autre de la possibilité de vivre. Voilà toute l’histoire : anabas gueule ouverte Dans le buisson : quel insecte se laissera séduire Par cette langue « émergée » ? / l’anachorète N’a pas vu Dieu ni entendu sa voix : la promenade Est semée de gouttes sucrées : « ils finissent tous en chambre » : avec ce désir de n’être pas le fils Ni la fille : ce vœu qui n’est plus un désir : cette Intention finalement : voyage horizontal par dé Par définition / « ce poisson est l’ancêtre de l’hom / Et de la fem / de l’enf / de ce qui est écrit au civil Comme dans les annales du crime : ballast chauffé À blanc : rails des laminages : le quai est un art » Qu’est-ce que je fous ici ? Cite des noms de choses appartenant à la nature Ou du moins à ce qu’on imagine (communément) Relever de ce socle d’enracinement : trouve des Mots chez les autres : revisite les lieux : le mal Est partout et le bien se fait rare, dit ma voix Au silence du quai : herbes rôties des étés sans Noces : tiges cassantes aux interstices des murs Croissant devant : je ne sais pas pourquoi j’ai Laissé tomber : ce ralentissement m’a inspiré, Je crois : ce n’est qu’une histoire ou un fragment Clinique des faits : venu de quelques-uns et allant À la fin de soi : sans suite à donner à leur Histoire / ni pauvre ni vieux, ni malade ni exaspéré : Ne trouvant pas le seuil de ces murs bâtis En d’autres temps : je suis qui vous voulez Que je sois ! Et je le suis ! Quel soleil m’ignore à ce point ? Pas de valise, à peine vêtu, rien dans les poches Et surtout pas le nécessaire : personne pour Me dire : que je suis allé trop loin « que c’est pas ici » / que je finirais bien par rencontrer Quelqu’un / à sa table buvant son vin / pas Noire l’angoisse / pas rouge la douleur / le temps Exige de quoi payer : l’idée était d’entrer (ô la la !) Dans la peau d’un autre qui ne fût pas moi / voilà Toute l’histoire : celle de Río le fleuve sans amont Ni aval : aucune étrave en travers des érosions / Algues agitées de passages / sous les frondaisons Trouvait le repos : et dormait comme s’il n’avait Jamais aimé : les strophes s’annonçaient en masse / « un jour je saurai tout de vous » / qui est qui À cette hauteur ? / lieux désertés ou ignorés : Pourtant le quai témoigne d’une activité humaine : Sans traces de pas (effacées par les vents) ni objets Perdus ou jetés / déambule un instant (une seconde Pas plus) les yeux examinant le sol dur et épars : Des routes proposent leurs destinées, sans panneaux Ni signes de vie : ici commence mon récit, après L’histoire et avant le roman : poésie d’un lieu Issu d’un ralentissement que rien n’explique Ni ne conte : pensant ils reviendront bien un jour Ou l’espérant malgré la colère : rien, pas un mot Écrit, pas une sonorité retenue par cœur, rien À plat : peut-être un théâtre, architecture en Phase prémonitoire : « jouera tous les papeles » À ce stade du pourrissement de soi en miroir : L’éparpillement des os (la chair est oubliée depuis Longtemps) / au cénotaphe des mains usées Par le travail nourricier : jeté la clé au loin Plutôt qu’à l’intérieur : sans souci de parabole / et les années installent rideau et rampe, Coulisses et tringles, trappes et balcons / Répétant qu’est-ce que je suis venu foutre Ici : en ce lieu de non-voyage : presque nu Et sans lendemain : créant la source et son eau Pour aller plus vite que le vent de l’Histoire / Assise dans ses voiles la beauté sur la margelle Blanche de chaux : n’oubliant ni la rose ni les Chants d’oiseaux reconnus à leurs positions Sur la branche : personne pour dire le contraire Ajoute-t-il au texte : revenant par superposition Pas de transparences ici continue-t-il de penser / au frôlement des plis eux transparents : « ça s’rait-il pas plus simple de le dire en chanson ? » ou ailleurs : si tant est que la manière est situable « je vois ça d’ici » / peut-être ami d’enfance… qui Sait ce que nous savons au fond de nous ? / Qui Descend le premier ? Qui en a parlé avant les autres ? Voici les saisons et les sciences du comportement : « nous avons aussi emporté les mots qui vont avec » Comme bagages à surveiller aux ports : clés et chaînes Du sens : on ne perd pas ce qu’on tient / passagers Entre infini et profondeur : au bastingage vomissant Des textes : écumes des houles : de temps en temps Apparaissait une figure mythologique : genre demi Dieu ou garce circonspecte : « nous partons tous les ans » / chaque année le même itinéraire conçu Par les spécialistes des déplacements de surface : Amours clandestines : ancillaires si possible : nièce Volage et pas assez âgée pour figurer sur la toile. Ce qu’un simple appareil textuel peut suggérer À l’esprit : pourvu qu’il se prête au jeu : gagne Quelquefois : offre alors le gite et le couvert : Loups et vents : le feu couvait « que voulez-vous ! » Voici le fer rongé par l’attente « comme je vous l’avais promis » oui oui des ponts glissants de sel Et d’écailles : des histoires en veux-tu en voilà ! Entre et sort : sinon réplique : ou passe son tour : « c’est dingue comme la critique peut vous blesser même si vous avez raison ! » / poitrines Exténuées offertes en sacrifice non pas aux dieux Mais à ses saints : monarques des vitrines joyeuses : le monde dans la main et la main sur la rampe Fraîchement vernissée : têtes hautes des satisfaits Et paluches noires des mal nés : « je revoyais tout ça sur le quai alors que personne ne pouvait témoigner de mon improbable solitude » / mort Pour rien : « qu’est-ce qui ne s’oublie pas si le pays n’en est plus un ? » / des fois on s’alimente de sucre Et d’autres fois de sa fermentation : de l’enfance De l’art à son enterrement : « il doit bien y avoir un cimetière dans ce trou perdu » / mais perdu Comment ? À quel endroit de la logique imposée Par la sagesse ? Nous aimons les fleurs et les gouttes De rosée. Qui se perd en chemin dans les châteaux ? Quelle guide aux genoux rouges n’en rie pas une Fois rentrée chez elle ? Pourquoi moi et pas une Autre ? / arpentant le quai désert et inutile : Je revoyais (littéralement) ces tours en pays Étranger : pourquoi sommes-nous allés si loin ? Oui oui le poème doit se mordre la queue ou Passer son chemin ! Je n’ai pas l’âge de ma fille. Nous aimons les lieux d’ombre et de soleil caché. Voyons si c’est par là comme en mer les observations De la hune : si nous n’étions pas deux cette lune Là-haut foulée par l’homme : quelle écriture Pour ce voyage ? Les journaux ressemblent À nos romans : ou l’inverse : genoux rouges Et mollets douloureux : mais la douleur Ne se voit pas à leur niveau : seul le visage Est signifiant dans ces circonstances un peu Comment vous dirais-je ? / rien de tel au verso De nos cartes postales : quelle que soit la saison / les objets composant le jardin s’assemblent Toujours de la même façon : ce qui change : C’est la saison : encore que les années, ma mie… Sur le quai seul et sans argent pour le dire : L’excuse du ralentissement : « ne descendez sous aucun prétexte ! » / mais descendu il Ne trouve pas même la force de se souvenir : il observe les herbes calcinées de cet été Particulier : la pierre concassée : les mottes Dures : ici et là des habitants furtifs : insectes Pour la plupart : rien à boire ni à manger : rien À voir en marge de l’attente : pas un arbre Pour s’interposer entre le ciel et soi : la mort A un visage : « si vous me le demandez : je propose le mien » / Quel désert au fond ! Entre les civilisations : ne servant pas même De transition : le seul souci c’est l’eau et avec L’eau l’insolation / histoire d’une évaporation En style sibyllin : aimez-vous cette dispersion Des moyens hérités d’une longue tradition ? Qu’est-ce que je fous… un bon petit métier Ou à défaut quelque chose à faire, utile ou pas / sans oublier la reproduction de l’espèce et De ses choix civilisateurs / on apprend vite si On veut : et je sais que vous voulez ! Arrrghg ! Quelle misère si on y pense ! Se trimbaler d’ici À la rue et de la rue au pot : à fleur du style et De sa nouveauté : je vends pour ne pas travailler Comme les autres « rentre en possession du bien que la vie te donne de droit » / des lunes sous le soleil : Qu’est-ce que je fous ici ? Rien pour écrire, pour dessiner, pour composer Les graphies de l’émerveillement, rien sur terre Mais : là-haut ? Ou dessous en grattant un peu ? Se dit ça ne durera pas arrive le moment quelqu’un Pose la question : qu’est-ce que vous foutez ici ? Décline alors quel nom ? / exhibe quels papiers ? / quel visage ressemblant ? / dit vous ne me con Connaissez pas / voyez cette abeille dans le bec S’agitant parce qu’elle sait ce qui l’attend — lui : (ou elle) On voit ça tous les jours si nous chante ! Ne perdons pas de temps en babioles ! Suivez Moi ! je connais le chemin : je suis d’ici. Pense il y avait longtemps que je n’avais ouï Le d’ici des origines de mon enfance / joie Constante puis cassure nette du récit enjambé Par temps de soleil et de mer : je sais où je vis Mais je ne sais pas où je suis / « quelle question ! » Ce type sentait la bière et le tabac : « pas la première ni la dernière : on a l’habitude : suivez moi ! » / comme si j’avais besoin de ce théâtre ! Jambe de bois ou d’ivoire : ce qui t’appartient Parce que tu vis et que d’autres sont déjà morts. Des mots dans le dictionnaire de la nature : Tout y passe : et l’hiver le vent amène ses loups / cogne la cognée et enjambe la jambe : enfance Interrompue non par suicide mais sans la mort Qui lui donnait un sens : jusqu’à ce que la langue S’interpose entre le Bien et le Mal : que l’autre Légifère par procuration : que toute sépulture Ait son dieu : toute union sa fornication et : Descendant de son palais suivant le sens de l’eau : Plus bas il vit que le train sortait du tunnel et : Qu’au passage à niveau elle l’attendait : plus Loin : le quai écrasé de chaleur : des heures d’attente : Qu’est-ce que je fous ici ? Oui oui ce personnage venait à moi sans intention De changer une virgule :
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