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 Article publié le 14 septembre 2004.

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Pour des raisons historiques complexes, le roman est devenu de nos jours, pour le plus grand nombre de lecteurs, synonyme de la littérature ; c´est-à-dire, le genre du roman s´impose aujourd´hui comme l´essence de la littérature, alors qu´en fait, il en est peut-être la forme la plus inessentielle, parce que la plus divertissante. De tous les genres littéraires, le roman est sans doute le plus divertissant et le plus apparenté à cet autre genre de divertissement qu´est le film. Mais la littérature n´est pas (que) divertissement. En fait, à une époque où le divertissement a pris le dessus comme idéologie, il incombe peut-être à la littérature d´être le contraire du divertissement. Ce qui ne veut pas dire qu´elle ne devrait pas garder son ancien rôle qui était d´enchanter et de porter l´âme et l´esprit vers un autre monde. Mais justement, être enchanté ne veut pas dire être diverti. Si l´enchantement est l´essence de la littérature, les genres littéraires les plus disponibles à l´accueillir sont peut-être ceux qui sont le plus proches des origines de la littérature : le conte et la poésie.

Copyright 2004 Patrick CINTAS

Les quelques textes recueillis ici et proposés au lecteur font partie d´un volume au titre provisoire Fables, que j´ai entamé en 1997 et qui a pris une forme plus ou moins définitive vers la fin de 2003. Cependant, certains d´entre eux pourraient être mieux qualifiés de contes - contes paraboliques est le syntagme qui me convient le plus, car il me fait penser à beaucoup de contes de Kafka - ou même de récits mythiques. À vrai dire, le mythe avec ses structures symboliques et sa forme emblématique présente dans les mythes de création est le modèle culturel qui me fascine le plus et qui m´incite et m´ouvre vers quelque chose qu´on pourrait appeler du créé ou de la création. Ceci ne veut nullement dire que j´embrasse cette structure mythique à bras ouverts et telle quelle, dans un esprit qu´on pourrait appeler « pré-moderne. » « Pourquoi on fête l´année du grand merle » est en fait une parodie d´un mythe d´origine de la communauté, et « Souvenirs d´un pays oublié » contient également des éléments parodiques de la lutte entre le Bien et le Mal. Quant à « Un sourire », le texte le plus vieux parmi ceux que j´ai recueillis ici, il est une fable moderne où des bribes d´autres histoires, images, personnages (la plupart, des littératures de la modernité) s´entrelacent à la trame fragmentée du récit. « Chérie » est peut-être le texte le plus proche d´une vraie fable -d´où l´allusion dans le texte à La Fontaine (qui n´est pas un auteur que je compte parmi mes « auteurs de chevet ») - texte de circonstance, écrit pour un concours organisé par le Consulat de France à Washington. Les deux autres textes, « Poissonoeil » et « La soupe de la veille » pourraient être lus comme des fables poétiques ou des récits mythiques. Les personnages y sont des archétypes et le fil narratif - très vague, à peine une narration -tente de s´élever, par son schématisme même, au mythe.

Ces petits contes ou fables ou mythes ou petits récits renvoient à trois types d´espace qui ont, eux aussi, leur signification particulière. « Pourquoi on fête... » et « Souvenirs... » ont comme cadre l´espace d´origine de l´auteur situé en Europe de l´Est. De l´autre côté, « Poissonoeil » et « La soupe... » évoquent - du moins pour leur auteur - l´espace où ils ont été écrits, la Californie. Ceci dit, l´espace spécifique n´est dans chaque cas que le moteur qui a fait possible la création, car il est, je crois - je l´espère -transfiguré en l´espace enchanteur des contes de fées. Si les quatre récits sus-mentionnés enveloppent dans leur tissu, même si d´une manière déformée, fictionalisée, un espace qui existe dans la réalité, « Un sourire » est peut-être le texte le moins défini spatialement, où l´espace est le royaume abstrait mais non moins vrai pour autant de « l´appartenance culturelle. »

De même que je ne pourrais pas dire que je suis un écrivain de l´Europe de l´Est ou américain, je ne suis pas sûre que je sois un « écrivain français », même si la langue dans laquelle j´écris est le français. Si je devais à tout prix m´identifier - mais, comme tout écrivain, j´aimerais ne pas le faire - je dirais peut-être que j´appartiens à la culture française par la langue et l´esprit, à l´Europe de l´Est par la conscience que notre origine reste toujours en nous, même si d´autres couches s´y déposent et finissent par la recouvrir, à la culture anglo-saxonne par une sensibilité hérité du romantisme anglais, et surtout, à un espace situé nulle part mais auquel tout écrivain authentique aspire, le seul espace où il se sent chez lui, qui n´est certainement pas l´espace où vivent ses compatriotes, quels qu´ils soient, mais où vivent tous les fantômes des esprits avec lesquels il se confond.

Daniela HUREZANU

 

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