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V - ALBA
Gor Ur - Prose pour Tony Duvert

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 Article publié le 26 novembre 2023.

oOo

Cipión hermano, óyote hablar y sé que te hablo, y no puedo creerlo, por parecerme que el hablar nosotros pasa de los términos de naturaleza. Berganza, Novelas ejemplares.

Prose pour Tony Duvert

Finca de los Alamos (plus tard surnommée la Finca del Ahorcado, la ferme du pendu) — Maître Roger Russel, avocat au Barreau de Foix, était assis dans un fauteuil de rotin devant un guéridon où trônait une jarra de Guinness. Il avait prévu deux verres, au cas où il serait nécessaire de saouler la petite. Pedro Phile la larguerait sur la route et elle ferait le chemin à pied, dans la nuit, et c’était une nuit claire, la voix lactée andalouse était particulièrement scintillante ce soir. L’air était tiède, avec des moments d’une étrange fraîcheur qui sentait la marée, mais Roger Russel, qui tirait la langue, n’y capta aucun embrun. Les embruns n’étaient jamais portés jusque-là, trop loin, trop haut, même si la mer prenait toute la place, si toutefois on consentait à tourner le dos à la Sierra Nevada. D’ici, on ne voyait pas les neiges du mont Mulhacén. Et puis la route qui traversait ces monts pelés et gris ne montait pas non plus jusqu’au ciel toujours blanc de feu du matin au soir entre le solstice de juin et l’équinoxe de septembre. L’été écrasait les ombres. On avait l’impression de voir à travers elles. Mais Roger Russel eût été bien malin de communiquer cette impression tant il ne la comprenait pas. Il n’avait pas été formé pour ça, ni n’avait cherché à comprendre ce genre de chose qui appartenait, selon lui, à la race de ceux qui n’ont rien d’autre à faire et qui le font ou pas, avec succès ou pas, il s’en fichait. Il surveillait la route plus haut. Les phares de la voiture de Pedro Phile s’annoncèrent par une intermittence, il avait été convenu de ne pas faire usage de l’avertisseur, les voisins n’étaient pas proches au point de s’inquiéter de leur capacité d’observation, mais ce tintamarre avait quelquefois agacé l’avocat et Pedro Phile avait cessé de s’annoncer de cette manière. Il aurait pu arriver tous feux éteints, mais la gosse en eût conçu une de ces terreurs qui vous fiche tout le plan par terre et il n’y a plus qu’à recommencer, seulement ce sera un autre jour, « la petite a une crise, » avait précisé une fois Pedro Phile et dorénavant on s’en tenait à quelques appels de phare au moment où la voiture descendait du col, l’avant pointé exactement dans la direction de la finca et Pedro Phile pouvait alors voir la façade illuminée et les ombres projetées sur sa blancheur de chaux aux ouvertures noires comme des tombes. Je vous le dis. Au cas où. La fillette descendit, posa ses pieds déjà nus dans l’herbe qui craquait comme si le feu y couvait, et après que Pedro Phile lui eût montré comment on se servait de la lampe, elle s’engagea dans le chemin. Elle n’avait pas peur, celle-là. Pedro Phile sourit en y pensant. Elle avait des raisons de ne pas avoir peur. Et il les connaissait. Il manœuvra et redescendit vers la route côtière. La fillette éclairait les bords du chemin, alternativement. Elle s’attendait à surprendre un animal. Il n’y avait pas de gros animaux dans les parages. Cotos de caza, indiquaient des panneaux plantés au ras du sol parmi la végétation naine et les cailloux dont on devinait la lente descente depuis les sommets maintenant découpés dans le ciel noir mais lumineux. Roger Russel, sous la tonnelle de vigne, parra dont il décrocha quelques grappes, la voyait descendre le chemin, agitant un rayon de lumière d’un côté et de l’autre, comme si elle croyait effrayer les lièvres de cette manière, peut-être ne songeait-elle pas aux scorpions et autres scolopendres. C’était une nouvelle. À cette distance, elle paraissait blonde et portait sa chevelure sur les épaules, non point comme un fardeau, mais comme une espèce de couronne. Elle se couronnait, la petite garce ! Sa robe devait être légère. Il adorait ces robes qu’on enlève par le haut d’un seul mouvement qui vous la laisse nue et facile. Elle arriva entre les cyprès, éteignit sa lampe et s’approcha sans donner signe de peur ni de méfiance. Elle connaissait le métier. Elle portait la robe sans ceinture, comme convenu. Elle était pieds nus, Roger nota la robustesse de ces pieds, peut-être une fille de la montagne, douze ans mais elle en paraissait huit, exactement comme promis, Pedro Phile manquait rarement à sa parole, ce n’était pas dans son intérêt de tromper sa clientèle, c’était un sacrément bon professionnel, jamais d’ennui avec lui, ni avec les autorités ni avec les gosses, tout était fignolé dans les moindres détails. Un artiste dans son genre. La fillette était mignonne comme tout. Roger la dénuda une première fois puis, insatisfait car il lui faisait de l’ombre, il lui demanda de se rhabiller, ce qu’elle fit sans rechigner, et il recommença, cette fois c’était parfait, sauf qu’il prit conscience que la deuxième prise n’avait pas été justifiée par un problème d’ombre : la fillette était un garçon.

— Tu n’es pas une fille…

— Non.

— J’avais demandé une fille. Je n’ai jamais…

— Je sais y faire, vous inquiétez pas.

— Mais ce n’est pas ce que… d’habitude…

Le visage du garçon commençait à se pétrifier. Il tortillait sa bite molle et ses dents mordillait son index. Il avait des yeux de fille mais ce n’était pas une fille. Roger se laissa envahir par les sensations qui se bousculaient en lui. Il dit, sans le vouloir, et le regrettant aussitôt :

— Je ne sais pas ce que je vais faire de toi…

Cette fois, le garçon se figea. Il cessa de tournicoter sa petite queue toute molle et sans poils. Roger tenait encore la robe.

— C’est une drôle de farce, dit-il.

— C’est pas une farce, dit le garçon. Je peux bander si vous voulez.

— Il faut avoir envie pour bander ! s’écria Roger et aussitôt il jeta la robe sur l’épaule du garçon, ce qui le laissait nu, sa petite bite maintenant dressée sans y avoir touché, par la seule force du désir

Cependant il remplit un des verres et le tendit au garçon qui s’approcha de la table. Il avoua ne pas aimer du tout ces boissons qui lui donnaient envie de vomir. Il avait un joli petit cul de fille.

— Ne bois pas si ça ne te plaît pas, mais moi je vais en boire deux, parce que je suis ah !

Roger se laissa tomber dans le fauteuil. Il n’éprouvait aucun désir. Il voyait l’enfant de profil. Ça peut bander indéfiniment à cet âge. Moi pas. Je vais tomber amoureux. C’est la première fois. Je ne suis même jamais tombé amoureux d’une fille. Il avait écrit ce genre de chose. Il s’en souvenait maintenant.

— Comment t’appelles-tu ?

— Wadi. C’est comme ça qu’on m’appelle, sinon je m’appelle…

Roger posa un doigt sur ces lèvres. Inutile d’en savoir plus. Mais à quoi Pedro Phile jouait-il ? Présentation d’un nouveau produit. Ou bien il en sait long sur les profondeurs de mon âme.

— Tu peux cesser de bander, petit. On verra ça plus tard… oui, plus tard.

— Vous voulez pas que je vous encule ?

Roger n’avait pas tiqué. Il se tapota les lèvres, index, majeur, majeur, index. La petite bite ne débandait pas. Le garçon n’y touchait pas. Elle était agitée de petits spasmes, mais apparemment sans volupté. Outil de travail. Avec ça encule le client. Sans joie ni orgasme.

— Je n’ai pas envie d’être enculé, murmura Roger comme s’il s’adressait à lui-même. Personne ne m’a jamais enculé.

— Je suis venu pour ça…

— Je te dis que…

Roger avait levé la main. Le garçon avait reculé, tenant cette fois sa bite à deux mains. Mais Roger n’avait aucune envie de se plaindre auprès de Pedro Phile. Au contraire il le remercierait d’avoir pensé à. Il ne savait pas en quels termes mais il le. Il en était certain maintenant. Je n’ai même jamais enculé de fille. Pas même envaginé. Elles sucent, caressent, se laissent frotter. Moi, enculé !

— C’est moi qui vais t’enculer ! lâcha-t-il d’une grosse voix.

Wadi éclata de rire et s’enfuit, sans toutefois aller au-delà du cercle de lumière qui tombait de la lanterne accrochée à l’angle du mur. Le jeu avait commencé. Il avait cru que Roger ne jouerait pas, ce qui compliquait sa situation envers Pedro Phile et quand ça se compliquait, Pedro Phile devenait cruel et il faisait atrocement mal, il vous faisait mal partout et vous aviez peur et mal pendant des jours sans pouvoir sortir ni même pour aller aux toilettes et la nourriture était infecte. Ces images venaient d’être projetées sur l’écran mental que Wadi ne quittait jamais des yeux et souvent il en avait été quitte pour la peur, comme c’était le cas ce soir, mais il lui était arrivé de leur donner raison et alors il avait eu peur et mal, à un point que personne ne peut s’imaginer s’il n’a pas vécu cette enfance particulière. Une enfance qui paraissait n’avoir pas de fin ou alors on avait l’impression qu’elle allait s’achever sans promesse d’avenir. La peur n’avait jamais quitté Wadi et la douleur le suivait comme un chien, non pas par fidélité, car personne de sensé n’aime ce chien, mais par devoir envers la seule autorité en vigueur, celle de Pedro Phile. Celui-ci avait conçu ce nouveau jeu en fonction de ce que sa fréquentation déjà ancienne de Roger Russel lui avait appris sur la véritable nature de son désir. Wadi avait enculé un tas de types qui en redemandaient. Pourquoi celui-ci prétendait-il compliquer une situation qui n’était pas conçue pour la complexité ? Un type qui n’enculait pas les filles, il ne les enconnait pas, il se laissait sucer et il les caressait comme des jouets, voilà ce que savait Pedro Phile. Et il avait agit uniquement en fonction de cette connaissance. La fillette était un garçon et ce garçon pouvait vous enculer et vous en redemandiez. Voilà en quoi Pedro Phile était fortiche. Wadi le savait. Roger Russel le savait maintenant. Et il se demandait si la petite bite de Wadi avait les qualités requises pour procéder à une sodomie prometteuse de toutes les sensations imaginables et imaginaires et il ne bandait toujours pas, bien que le garçon fût totalement nu et en proie à une érection comme Roger Russel n’en n’avait jamais connu pour lui-même. Il devenait jaloux. Et même honteux. Il sentait venir les instruments de l’hypocrisie. Il savait s’en servir. Il avait souvent détruit de cette manière. Il suffisait d’éteindre. Mais le garçon était tellement beau ! Il voulait le voir. Ne pas l’enculer. Il mesurerait l’effort et la capacité. Alors se laisser enculer, comme il se laissait pénétrer l’anus par les petits doigts de fées des fillettes pas moins hypocrites que lui. Il se déculotta prudemment. Il ne bandait pas. Peu importait de bander ou pas. Il se pencha sur la table, les fesses ouvertes comme si les lèvres d’une fillette amusée allaient s’y poser comme un papillon pressé de vivre sa vie. Il ne voyait plus le corps du garçon. Il voulait le voir. Il ne voulait voir que ça. Pedro Phile avait visé juste. Encore une fois. Mais il ne savait pas tout. Il y avait un tas de choses que Roger savait sur lui-même et que Pedro Phile ignorait encore. Il y avait même des choses que ni lui ni Pedro Phile ne savaient. Ne serait-il pas instructif de savoir ce que le garçonnet en pensait ?

— Non ! fit Roger en se reculottant.

Le visage du garçon s’assombrit de nouveau. La peur commençait à en déformer les traits délicats. Il avait mal par anticipation. Il se voyait attaché, car Pedro Phile ne laissait personne lui échapper s’il avait décidé d’en prendre possession par l’exercice de la douleur. Roger vit tout cela dans les yeux du garçon. Il lui semblait revivre quelque chose qu’il avait oublié à force de ne plus y penser. On ne peut pas aimer sans amour.

— Est-ce que Pedro t’aime… ?

— Je ne sais pas. Je ne le saurai peut-être jamais. Les enfants ne durent pas aussi longtemps que vous, monsieur Russel.

— (effrayé) Tu connais mon nom ?

— C’est écrit sur la boîte aux lettres…

— Il y a une boîte aux lettres ? (dépité) Je suis en vacances…

— Alors ce n’est pas vous. C’est le nom du propriétaire.

— Oui, oui, c’est cela ! Je ne suis pas Roger Russel. Je suis en vacances et le propriétaire de cette finca s’appelle Roger Russel et il me l’a louée, tu fais bien de me le rappeler…

Wadi recula. Il se remit à tortiller sa petite bite, mais Roger Russel ne ressentit pas la même chose, car tout à l’heure elle ne bandait pas, elle était molle, il n’était pas question de se faire enculer, tout avait changé, à part la nuit, laquelle s’achèverait tôt ou tard, il avait payé d’avance, Pedro Phile ne faisait pas crédit, seule Paquita vous accordait cette faveur, c’est en traitant avec elle qu’il avait connu le propriétaire de la finca et ils avaient parlé de la location et l’affaire avait été conclue, oui, ça s’était passé comme ça, ça se passe peut-être toujours comme ça, et cet idiot de Joaquín de los Alamos avait collé son nom sur la boîte aux lettres, comme si le vacancier était supposé recevoir du courrier, c’était absurde comme situation, il fallait se sortir de là avant de devenir fou et rien ne rend plus fou un type déjà pauvre de nature que cette proposition de sodomie dont la pertinence était incontestable, il fallait aussi le reconnaître, vu l’impossibilité d’arracher ces maudites racines peut-être génétiques ou qui sait acquises dans les dédales d’une enfance aujourd’hui à peu près aussi obscure que la mort prochaine et tout ça sans le moindre recours à une idéologie du plaisir à partager avec l’enfant

— Tu ne veux vraiment pas boire ?

— Je ne bois jamais, monsieur.

— C’est Pedro Phile qui t’en empêche ?

— Avec lui je bois.

— Pourquoi pas avec moi ?

— Vous ne me faites pas mal…

— Il ne manquerait plus que ça, miladiou !

— Vous ne me ferez pas mal si vous m’enculez…

— Et si tu m’encules, ça me fera quoi, hein ?

— Ça ne vous fera que du bien. Ils le disent tous.

— Je ne sais pas…

Il avait positionné l’enfant sur la table, assis sur son joli petit cul, la queue dressée entre ses cuisses serrées à la manière d’une fille, et il caressait les épaules et les bras, sentant venir l’érection, mais de si loin qu’il désespérait, ses mains caressèrent les cuisses, il y avait un tas de choses à caresser sur ce corps, mais la bite suintait et il hésitait à en tirer tout le jus, comme il le tirait de lui-même dans les moments de grande solitude. D’habitude, c’étaient les filles qui provoquaient ses éjaculations, d’une manière ou d’une autre, mais maintenant qu’il était en possession légitime d’un garçon, il se sentait assez fille pour le faire jouir, par la caresse ou la pénétration, il n’en savait foutre rien ! Il vida d’un trait le verre que lui tendait Wadi. Il s’essuya les lèvres sur un sein. Les filles n’avaient-elles pas des seins de garçons ?

— Tu veux me saouler ou quoi ?

— Des fois c’est bien de boire…

— Ça ne me réussit jamais, mec ! La dernière fois que je me suis saoulé, j’ai failli me mettre une balle dans la tête. Heureusement, c’était une vieille balle en bois conçue pour l’exercice, vois !

Il montra la cicatrice sur la tempe. Wadi frémit. Il caressa alors le gland, car le sang se retirait, une chose que Pedro Phile n’apprécierait pas s’il venait à l’apprendre, les clients étaient de sales rapporteurs, le gland se reforma, la verge contrainte par la pression des cuisses.

— Je ne sais pas pourquoi je te parle de ça. Peut-être parce que tu es un garçon. Je n’en parle jamais aux filles. Je ne parle de ça à personne. J’écris, quelquefois…

— Si tu m’encules Pedro sera content, même si je ne suis pas venu pour ça. Encule-moi.

— Non, toi, encule-moi !

De la route, on ne pouvait pas voir ce qui se passait devant la maison, sous la tonnelle. D’abord parce que la lumière de la lanterne fixée à l’angle du mur semblait produite par une chandelle de l’ancien temps. Et puis la nuit n’était pas aussi claire qu’on pouvait se l’imaginer en regardant le ciel étoilé. La lumière de la nuit ne pénètre pas les surfaces, elle ne les irise pas, on ne sait rien de leurs couleurs, à peine si leurs formes nous apparaissent au point de les reconnaître à coup sûr. Joaquín descendait sur la route. Il avait travaillé toute la journée à l’étanchéification d’un bassin d’irrigation haut perché, tellement près du soleil qu’il en souffrait et qu’il se craquelait de toutes parts. À la nuit tombée, à cheval sur sa Puch, Joaquín passa sur la route au-dessus de la finca qui ne s’appelait pas encore la Finca del Ahorcado parce que personne ne s’y était encore pendu.

 

*

 

Elle y était nécessitée. Tout ce qu’elle aimait, c’était là. Villiers de L’Isle-Adam, Véra.

« Me estás tomando el pelo, ¿no ?

— No. »

Joaquín redescendit de l’échelle, l’ampoule grillée dans une main. Il y avait cinq ampoules sur la jante et huit rayons où s’entortillaient les fils. « Deux, trois, les cinq. » Joaquín manipula plusieurs fois l’interrupteur pour montrer que ça fonctionnait. Maintenant, il n’était plus responsable des ampoules. La corde était authentique. Il était interdit au nouveau locataire d’y toucher sous peine de rupture de contrat.

— Tu romprais un contrat pour une histoire de corde, ¿amigo ?

¡Claro que sí !Ce n’est pas une corde ordinaire. Tu n’as qu’à pas la regarder.

— Je ne peux pas m’en empêcher… A no ser que me estás tomando el pelo…

— Ce type m’a porté la guigne ! Personne ne veut louer cette maison. Tout le monde sait que ce type s’y est pendu. C’est un manque à gagner pour moi.

— Puisque je te la loue, fais-moi la faveur de décrocher cette maudite corde qui t’a porté malheur jusqu’à ce que j’accepte de te la louer, cette maudite maison !

— Maintenant elle va me porter chance. La preuve, tu n’as pas le choix : tu ne peux pas faire autrement que me la louer, cette maudite maison. J’appelle ça de la chance.

— Je ne sais pas ce que Violette va en penser… Tu la connais… Superstitieuse…

— Si elle est aussi superstitieuse que tu dis, elle te dira qu’une corde de pendu, ça porte chance. Et elle te dira la même chose que moi : (imitant) Quelle chance on a, mon Fredo ! On n’a pas eu à chercher longtemps. Et puis c’est beaucoup mieux qu’en bas. Plus grand. Mieux éclairé. Tu as vu la vue ? Même les carreaux sont plus grands. Hou ! Hou ! Hou !

¡Hijo de p… !

Les murs avaient été chaulés récemment. La réverbération illuminait une terrasse où l’herbe poussait depuis des années. Il y avait une tondeuse dans la remise. Joaquín ne l’avait pas entendue ronfler depuis son enfance. Il enverrait quelqu’un pour aider.

— Mais ne touche pas à la corde.

Comme si j’avais déjà touché une corde de pendu. Je connaissais l’histoire. Mais ce que j’ignorais, c’est que cet avocat venu de France avait été celui du comte de Vermort, nos nouveaux voisins qui vivaient sous la tente parce que la maison du pendu ne les enchantait pas. Ce n’était pas n’importe quel pendu. C’était leur avocat. Ici, on savait pourquoi il s’était pendu. En tout cas on savait dans quel contexte. Le garçon avait été retrouvé dans le puits, au fond, où l’eau ne venait plus depuis longtemps. Il s’y était réfugié. Comme il n’était pas d’ici et que don Pedro semblait être en quelque sorte son tuteur (selon don Pío), on n’avait pas insisté, ni du côté des autorités, ni de celui de la gente. On ne savait même pas ce qu’il était advenu de lui. Don Pedro n’en parlait pas. On ne parlait pas plus souvent que ça à don Pedro qui, sans se tenir à l’écart de la gente, ne la fréquentait pas. À cette époque, on ne savait rien du comte de Vermort ni de sa comtesse. On ignorait donc leur rapport avec le pendu de la finca de los Alamos. La gente avait l’air de s’en foutre royalement, de la corde qui était restée accrochée à la poutre. Comme le guardia civil l’avait coupée au-dessus du nœud, on avait emporté le corps avec le nœud et on avait laissé le bout pendouiller au crochet de la poutre, un crochet à pendre le jambon. La maison était restée fermée pendant plus d’un an avant que Joaquín y monte parce que des squatters rôdaient autour et la gente l’avait informé et il était monté, à pied, le fusil en bandoulière, comme s’il allait à la chasse. Mais une fois là-haut, il n’avait rencontré personne, ni squatters ni rôdeurs, pas même quelque curieux ignorant qu’il tournait autour de la maison d’un pendu, attiré par la vue sur la mer et par les pentes prometteuses de gibier comme on en rêve quand on s’ennuie à la ville. Personne. La poussière avait même bouché le trou de la serrure. Joaquín passa un long moment à le nettoyer et une fois qu’il fut propre, il y jeta un œil. Rien n’avait changé. La table était à sa place, le fauteuil, les chaises, les étagères aux supports de plâtre, la cheminée avec ses ustensiles anciens aujourd’hui inutiles mais décoratifs, Joaquín, l’œil dans le trou, évalua la valeur de ce contenu, il en avait presque terminé quand son regard se heurta à la corde. Il recula brusquement. Comme il était à genoux, il faillit culbuter. La crosse de son fusil cogna le dallage approximatif du seuil. Il réfléchit. Ça ne pouvait être que la corde du pendu. Un élément de l’enquête qui avait eu lieu en son temps. On voyait encore les traces des scellés sur la porte. Joaquín se soumit à un intense effort de mémoire. Sa mère lui avait dit qu’une corde de pendu, si on a la chance d’en trouver une, ça porte bonheur. Ou le contraire. Il ne savait plus. Il pouvait poser la question autour de lui. Mais s’il la posait, on le soupçonnerait d’en posséder une, corde de pendu, puisqu’il était propriétaire de la ferme du pendu et que seul le nœud avait disparu dans les archives du tribunal. On ne pouvait pas soupçonner Joaquín de l’avoir dérobé à la Justice. Celui qui avait de la chance maintenant faisait partie du personnel et des habitués du Tribunal, avocats et autres fonctionnaires. On sait comment ça se passe. Et si ça se faisait, le nœud avait été partagé, qu’on pouvait même penser que le juge en possédait la meilleure part, qui se situe au niveau de la glotte, selon ce qui se dit, mais on dit tellement de choses que ce n’est plus la peine d’y penser, le nœud a disparu, c’était écrit dans le journal. Par contre, avec le temps, un peu plus d’un an si on y réfléchissait bien, Joaquín avait dû se dire que la corde elle-même devait être restée accrochée à la poutre, je vous le dis. On le savait, nous, puisqu’on y avait été voir, par le trou de la serrure, et on avait vu le morceau de corde qui pendait, oublié ou négligé par la Justice, personne ne s’en souciait maintenant. Aussi quand Joaquín redescendit de là-haut, on a eu une sacrée envie de jeter un œil dans le cageot qui est ficelé au porte-bagages de sa moto. Facile. On le hèle. On exhibe le Machaquito qui est bien supérieur à l’anis del Mono, et on se presse dans l’ombre préalablement arrosée de la même eau, sauf que les verres ont fait un séjour dans le congélateur. Il se doute bien qu’on l’a vu monter. Comme il n’y est jamais monté depuis et que nous on sait à propos de la corde, parce qu’on ne s’est pas contenté d’y monter, il sait que nous savons, et il n’a aucune envie de nous montrer la corde dont il est d’ailleurs le légitime propriétaire puisqu’elle a été abandonnée par la Justice qui ne peut plus la réclamer. On savait aussi que la finca appartenait à un comte qui n’était pas d’ici. Mais Joaquín pouvait bien s’emparer de la corde sans lui en parler. Celui qui trouve un objet abandonné en devient le seul propriétaire, même si cette corde a d’abord appartenu aux deux propriétaires. Vous pensez si on y avait réfléchi ! On savait presque tout, sauf que Joaquín avait décidé de ne pas décrocher la corde. Verre en main, il décréta que la corde demeurerait où elle avait servi à pendre un salopard qui tripotait les enfants sans que personne n’y trouve à redire, n’est-ce pas, caballeros, dit-il en achevant son verre et en le reposant sur le comptoir où il se brisa. Je ne sais pas si cette histoire de verre brisé est authentique, mais on en parle. Une fois brisé le verre, Joaquín remonta sur sa moto, et sans la quitter il annonça que le premier gilipollas qui s’aviserait de décrocher la corde il lui arracherait la tête avec du double zéro entrelacé. La gente avait compris, mais elle ne savait pas que Joaquín avait déniché dans la grange attenante à la maison une vieille roue de charrette qu’il customisa en lustre d’apparence rustique, avec des ampoules électriques à la place des chandelles et un système à deux interrupteurs d’une part pour assurer un va-et-vient et d’autre part pour faire des économies d’électricité, l’éclairage ainsi conçu ayant la capacité d’embrasser les filaments de deux ou trois ampoules, alternativement, ou des cinq si le besoin s’en faisait sentir comme il arrive quelquefois à l’occasion d’une fête entre cousins, voisins, ou les deux en absence de conflit d’intérêt. Voilà où on en était lorsque Joaquín emmena Violette sur le siège de sa moto, à la place du cageot, ainsi je les vis arriver car je m’étais assoupi sous la tonnelle, agacé par les guêpes et l’esprit plein de projets champêtres et de jouissances sexuelles excessives jusqu’au mensonge.

— C’est chouette, dit Violette. Dommage que Léona soit à l’école.

— Elle aura bien le temps d’apprécier puisqu’elle va y vivre, n d d !

Le lustre rustique lui plut. Il n’était pas question de le décrocher pour le remplacer par ces spots qui faisaient ma joie dans le taudis que nous habitions encore. Il était vraiment chouette ce lustre, sa roue en bois d’époque, le cerclage authentique, les rayons qu’on voyait qu’ils avaient servi et cette corde qui avait son âge si on en jugeait par son tressage, elle était spécialiste du tressage, surtout du tressage de chanvre, ça lui avait même enfoncé les yeux dans les orbites, avec de l’ombre et des larmes, et dessous des joues desséchées qu’on se demandait comment elle pouvait vivre avec ça. Bref, si on ne parlait pas de la nature de la corde, le lustre était exactement ce qu’elle rêvait depuis des années en matière de lustre et d’illumination intérieure, le mobilier méritait un dépoussiérage et quelques opérations de customisation, dommage cependant que d’habiter ici ça rallongeait encore le chemin pour arriver à la route, le comte ayant refusé de financer des travaux d’aménagement pourtant facilités par la présence plus bas d’engins de chantier et de main-d’œuvre qualifiée et pas chère du tout. Non, non, pour le chemin, voyez ce que vous pouvez envisager vous-mêmes, vous êtes trois, Joaquín peut vous donner un coup de main de temps en temps, mais Joaquín avait des problèmes avec ses artichauts qui avaient attiré une population de Roumains dans le voisinage des jardins. Il s’inquiétait surtout, le bon Joaquín, pour leurs gosses qui se baignaient toute la journée dans le bassin d’irrigation sans surveillance, sans bouée et sans rien sur le dos pour interdire la différenciation sexuelle toujours difficile à cet âge si le sujet est porteur d’une culotte. Mais Pedro Phile n’agissait plus dans le coin. Il y prenait des vacances ou courtisait Paquita, ce qui attristait considérablement notre pauvre et bon Joaquín. Ce jour-là, jour de la première visite, nous redescendîmes joyeux, Violette parce qu’elle l’était, moi parce que je jouais, et Joaquín parce qu’il avait ma parole au sujet de la corde. Quand nous aperçûmes la toiture branlante de notre actuel foyer, nous vîmes que Léona était rentrée de l’école et que Klaus, assis à même le sol, le dos contre un entassement de palettes, lui faisait la conversation, tandis qu’elle l’écoutait, exhibant ses gambettes au poil doré avec sans doute une vue étroite sur ceux de son entrejambe. Joaquín s’esquiva, on l’entendit une fois de plus jurer contre le kick qui s’en prenait à la plante de son pied, enfin la Puch s’éloigna en pétaradant comme jamais et Klaus se leva pour nous saluer au choc poussiéreux et poussif de ses espadrilles. Ce type avait besoin de bottes. Léona, qui lisait dans un manuel, croisa ses jambes et posa ses pieds l’un sur l’autre sur le rebord d’un débris de palette ou d’autre chose, peu importe.

— Terre très dure ici, dit Klaus avec un grand sourire comme si ça lui procurait du plaisir, qu’elle soit dure et il montra la broussaille qui surmontait le chemin vers la maison d’en-haut. Moi casser piston, huile partout, mon père est furieux, mais pas à cause de la pollution, hélas.

Il avait l’air d’aimer son père, celui-là. Sans doute comme j’avais aimé le mien : par crainte qu’il se mette à m’aimer. Nous fûmes comme projetés sous la tonnelle, par habitude sans doute. L’anisette avait un goût de cambouis.

— C’est l’air, dit Klaus. Le piston a jailli dans l’air. L’huile s’est pfioutt et l’anisette bonne quand même.

Il rit, ne perdant pas de vue les gambettes de cette fille que je ferais peut-être bien d’en parler à Pedro Phile, elle est douée. Mais sans l’accord de Violette, on restera pauvre.

— Ça avance, dit Klaus qui avait l’air de supporter l’alcool comme je tiens debout quand on me pousse. Ça avance en haut et en bas. Maintenant on est plusieurs et

— C’est pas vrai qu’on va habiter la maison du pendu !

Interruption style Léona qui s’en fiche que le sujet de conversation ne porte pas sur le sujet qui la préoccupe depuis que la gente (pourquoi pas elle ?) l’a informée de notre projet à Violette et à moi. Klaus n’en dit pas plus sur l’avancement des travaux. Il aurait pu. Ça m’aurait rendu service. J’avais l’intention d’en parler à Violette, du pendu, de la corde et du lustre. Que sans cette corde il n’y a plus de lustre ni de pendu. Elle s’avance comme sur les planches destinées à Œnone :

— C’est celle-là, la maison du pendu… ? Je croyais…

Qu’est-ce qu’elle croyait ? Il a bien fait de filer, le Joaquín. Il ne m’aurait été d’aucune utilité. Je n’ai jamais compris ce qui attire certains mecs vers les petites filles, mais Klaus lui a compris que ce n’est pas le sujet et qu’il vaut mieux aller voir ailleurs si la terre est dure et si l’huile des pistons s’est infiltrée dans les fissures de la roche comme son papa le craint, que les écolos vont se rappliquer et qu’il va être urgemment nécessaire de graisser des pattes. Le jeune Allemand applaudit sa berlue au passage et elle en rit à gorge déployée. Violette s’est effondrée. Et encore, effondrée c’est moins que ce qui va lui arriver quand elle apprendra que la corde ne peut en aucun cas être décrochée.

— Je ne savais pas que c’était la maison du pendu… Dix ans sans le savoir…

— Qu’est-ce que tu croyais, maman ?

— Je ne croyais rien… je ne savais pas. Ce n’est pas la même chose !

— Il n’empêche que c’est la maison de ce cochon qui s’amusait avec des petites filles !

— Oh, oh ! interrompis-je. C’était un petit garçon. Il n’y avait pas de petite fille dans le puits. C’était un petit…

— Oh ! Taisez-vous tous les deux !

Violette est désespérée, mais le désespoir, ça se soigne. Je m’y connais, en tant que mon propre cobaye. Elle finira par accepter le fait qu’une maison dans laquelle un homme s’est pendu n’est plus sa maison à lui. Elle sera la nôtre, mais comme Léona est au courant pour la corde (la gente !), on va y venir, aujourd’hui ou demain, peut-être même plus tard, mais on y sera. Et alors il faudra décrocher le lustre et le raccrocher avec autre chose ou peut-être même qu’elle n’aimera plus le lustre à cause de sa mauvaise fréquentation. Et une fois le contrat rompu, on ira où ? Je lui pose la question tout de suite ou on commence par le début ?

— Joaquín a promis de tuer celui ou celle qui décrochera la corde…

— Avec moi il se contentera de rompre le contrat, il me l’a dit, il n’a qu’une parole !

— Quelle corde ?

La question. Il y a une corde. Sans corde, pas de pendu. Léona ne veut pas habiter là-haut. Elle fera tout pour que ça n’arrive pas. Dans ce cas aussi, nous sommes dehors. Et je les mets où, mes affaires ? Sans compter que Violette pèse cinquante kilos de plus que moi. Ça en fait des kilos ! On les mettra où ?

— Tu veux que je t’explique, maman ?

La petite s’est rapprochée de sa génitrice en chef. Oublié le petit Allemand excité. Elle ne suinte plus. Elle s’assoit entre les jambes de sa mère qui est posée, sinon assise, sur un baquet retourné. Violette s’assoit toujours sur des objets retournés.

— Tu sais que ce cochon de monsieur (se tournant vers moi) qui faisait l’amour à des petites filles encore plus jeunes que moi, (à sa mère) s’est pendu dans cette maison…

— Je ne savais pas que c’était cette maison…

— C’est bien celle-là, (à moi) pas vrai Alfred ? (un temps, elle en profite pour lécher sa croûte au genou) Et bien la corde est restée dans la maison. Et tu sais à quoi elle sert maintenant ?

(nous, on le sait, mais puisqu’elle en parle, laissons-la parler)

On s’est couché finalement. D’après Violette, il n’y avait qu’une solution : décrocher le lustre et le balancer dans le barranco avec sa corde, la crue d’automne l’emporterait dans les profondeurs de la mer. Seulement, quand bien même c’était faisable, ce n’était pas une solution : c’était un problème. Elle le reconnaissait et derrière le rideau la Léona se réjouissait. Avait-elle conçu son propre plan ? Klaus figurait-il dans son projet ? Arrgh je ne me voyais pas survivre au déshonneur d’être frappé par un habitant du sud, comme les appelait Joaquín qui ne connaissait que le sud de ce pays, n’ayant pas eu l’occasion de monter plus haut, d’ailleurs Klaus était peut-être venu du nord, sans passer par le sud s’il avait pris l’avion…

— Cesse, veux-tu, Fredo ! Tes problèmes ! Tes solutions ! Tu nous fais chier avec ton Duchamp ! On a autre chose à faire, nous. C’est un problème si je remplace MOI-MÊME la corde du pendu par une corde ordinaire qui n’a jamais pendu personne… ?

— La corde qui est accrochée sous l’appentis a servi à pendre un cochon lors de la dernière matanza

— Un cochon n’est pas un homme, Fredo ! Et une matanza n’a rien à voir avec le suicide.

— Tu veux dire que si ce type avait été pendu par quelqu’un, tu accepterais…

— Ne sois pas idiot ! (à travers le rideau, de loin) Léona, va te coucher ! Papa et moi on a des choses à discuter…

— C’est pas mon papa !

Peut-être, et même sûrement, mais ce genre d’attaque la réduit toujours à la dimension de la petite merde qu’elle est à mes yeux et elle part en trombe pour se jeter dans son lit qui est d’ailleurs une poubelle, dommage que ça n’en soit pas une vraie, n d d !

— On peut faire ça ce soir, si tu veux, Fredo…

— Avec Léona aux basques… ?

— Elle dort.

— Tu veux que je l’assomme ?

— Vois d’abord si tu te sens de force, Fredo.

— Si tu crois que ça peut faire l’objet du chapitre suivant…

Quel chapitre ? Celui où j’assomme Léona (A). Ou celui ou je décroche la corde (B) ? Le lecteur est prié de jouer

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