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![]() oOo Paysages inachevés car les poses hasardeuses du sténopé argentique semblent donner ici des images en mouvement, dans l’acte même de naître. Des images aux points de couleurs séparés et divisés, hésitant encore à se mêler les uns aux autres pour rendre compte d’une seule réalité. Paradoxe photographique qui dévoile une matière brute, des tremblés et des irisations qui ne sont pas sans rappeler l’impressionnisme et le pointillisme. Mais ce manquement à la précision est aussi un appel à l’imaginaire, une proposition faite à la pensée de prolonger l’acte interrompu, et de dire de mémoire, ces paysages ordinaires, lieux communs de notre humanité. Jean-Luc Aribaud
Poème 1 :
abandonne ce temps de chutes d’étoiles de sel amer de fleurs mortelles laisse prends plutôt dans tes mains les écritures sauvages du feu et du désir prends laisse-toi envahir par ce lieu de sève et d’encre qui te laboure te dresse au ciel comme un menhir au cœur de tes prairies natales de tes rives incendiées la nuit des Corbières te longe te déchire te dessine comme un delta perdu entre deux mondes demain soleil large et lune sombre s’uniront sur tes terres dévastées fonderont des villes blanches où dans une langue dont tu ignores les vocables
des enfants habillés de foudre dompteront des chevaux noirs
Poème 2 :
par la fenêtre du soir nous avions vu cela comme un dégel immédiat et brutal une valse d’herbes avides d’oubli une esquille de ciel aussitôt soudée à la terre nous avions vu et cela avait suffit Dieu a lancé ses dès sur le glacis de l’étang et j’avais ris pour donner fête lumière lampions à ta parole pour que ces mots nés dans la vision ne s’en retournent pas au silence et que le dire ne soit pas ce visage d’été si vite effacé par la pluie et qu’un mystère une question nous amène au-delà de cette parole main dans la main sur l’autre rives rêvée avec vie mort doutes dans la voix et nus où se dressent des collines de mémoire des villes en paix où ce qui surgit et demeure est un éclair dans le poème
Poème 3 :
ce lieu me prend me divise m’impose ses battements d’ailes ses couleurs ensevelies dont le rouge est une lame qui vrille ma poitrine cet exil au seuil de ce que j’ai été est un bien ma garrigue mon ciel mesuré au silence des combes la biche y offre le miracle de son élan une amnésie durable comme une corne de brume qui sonnerai l’oubli ô terre du possible qui ne demande rien n’interroge jamais la figure blessée ou le regard en péril le neuf de l’âme y savoure son souffle anonyme sa virginité lunaire et dans le grand brasier des vignes seul sous les salves du vent ma marche obstinée ne croise que le présent de mes pas
Poème 4 :
tard dans l’insomnie dans l’inquiétude des portes ouvertes sur une nuit furieuse le paysage s’écrivait pour nous seuls disais-tu cette frontière de noir subtil séparation furtive des mondes terre ciel râpe claire des calcaires sombre éther où sous nos yeux d’enfants vigies s’agenouillaient des étoiles mortes et ce rite funèbre élevait en nos langues une Babel innocente immuable vocable après vocable dans le ciment des voix anciennes avec l’assentiment de l’Hydre et d’Orion fraternelle pour que se prolonge en nos mains friables ce sursis de lumière grâce du temps qui nous fait et nous défait indulgence des dieux devant nos babillages tristes de sable et d’eaux corrompues
Poèmes 5 :
épopée de pins de vignes qui s’exaspèrent matins illimités sans rien qui puisse rompre ce court délai d’éclaircie ce raccourci de la mûre à la main oui cette terre entre les bras est un possible un traité de paix délivré par la rixe du jour et de la nuit oui nous avons tenu notre rang d’éveillés courus jusqu’à l’occulte ruisseau cueillir ce qui s’enfuit déjà comme un orvet fragile sous le plat protecteur de la pierre et notre marche est noble désormais et la faim qui nous hante une joie dans nos bouches invalides lorsque nous renonçons que les cimes à fleur d’étoiles dispersent nos audaces
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