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Les carrés gris sur fond gris de Régis Jauffret
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 Article publié le 14 novembre 2008.

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Les carrés gris sur fond gris de Régis Jauffret
Benoît Pivert
Carré gris sur fond gris - Janine Ferraz - j-ferraz.com

S’il fallait donner une couleur aux Fragments de la vie des gens[1] de Régis Jauffret, ce serait assurément le gris. Les tranches de vie offertes aux lecteurs, épaisses de quelques pages, ont le gris des ciels bouchés de nuages, le gris d’un jour de spleen ou des murs d’une cellule de prison. Pour tout dire, Jauffret a la passion de la grisaille. Tel un furieux iconoclaste, il fait voler en éclat les images radieuses pour ne retenir de la vie qu’une seule couleur, la couleur de l’ennui.

Adieu donc le paradis coloré de l’enfance. Sous la plume de l’auteur, il n’en reste plus rien. L’inconvénient d’exister commence dès la naissance. Depuis le berceau, l’unique condition humaine est la captivité. On vous colle un prénom comme on vous colle un matricule. Toute enfance est une domestication, les enfants sont comme des teckels, des rats d’agrément dont le pelage d’une blancheur éclatante fait la fierté de leur propriétaire [2]. La liberté de l’enfance ? Un beau mythe que l’auteur pourfend allègrement puisque les enfants ne connaissent jamais l’absence de contraintes, tenus qu’ils sont dès leur plus jeune âge de jouer une partition spécialement écrite pour eux. Ce n’est qu’à ce prix qu’ils obtiendront de l’amour. Pas un instant, Jauffret ne croit à la douce innocence de l’enfance. Comme conscients déjà de la sinistre mécanique du divertissement, ses enfants ne se laissent pas prendre « aux jeux ». Ils ne jubilent pas lorsqu’on agite sous leur nez des petits jouets en caoutchouc, des canards, des kiwis, d’horribles cygnes crasseux avec de la mousse de savon séchée sur le bec [3]. La lucidité n’attend pas le nombre des années. Ils ont déjà compris malgré leur jeune âge que la vie est une sinistre farce dont les règles dramatiques s’apprennent sur les bancs de l’école ; ils n’aimaient pas ce rôle qu’on leur faisait jouer, ces vêtements, ces coupes de cheveux, et toutes ces pitreries auxquelles ils devaient se soumettre quand on les amenait à l’école [4]. Mais les adultes sont inflexibles. Même le plaisir est programmé. Bon gré, mal gré, il faut se plier aux simagrées destinées à feindre le bonheur, on les obligeait à s’ébattre malgré tout, à se livrer à des jeux qui les ennuyaient [5]. Régis Jauffret vous paraît excessif ? Regardez plutôt le tableau de Bruegel, Les jeux d’enfants (1559-1560). Commentant la toile, Froukje Hoekstra note : les enfants sautent en l’air dans des couvertures, ils se lancent des soucoupes ; la petite fille au premier plan joue à la marchande des quatre saisons. Pourtant aucun d’eux ne rit [6].

A noter toutefois que dans le monde de Jauffret, les enfants ne sont pas de simples victimes innocentes. Ils tyrannisent tout autant qu’ils sont tyrannisés. A la lecture du portrait de ce monstre en herbe qui griffe et mord sa mère sitôt la porte de l’appartement refermé, on se souvient de cette scène décrite par Cioran : Au marché, un gamin de cinq ans tout au plus, se débat, se contorsionne, hurle. Des bonnes femmes accourent, essaient de le calmer. Lui continue de plus belle, exagère, dépasse toute limite. Plus on le regarde plus on voudrait lui tordre le cou. Sa mère, comprenant enfin qu’il faut l’emmener, supplie le furieux : « Viens mon trésor ! » - On songe – avec quelle satisfaction ! – à Calvin, pour qui les enfants sont « des petites ordures » ou à Freud qui les traite de « pervers polymorphes ». L’un et l’autre auraient dit volontiers : « Laissez venir à moi les petits monstres ! [7] Toutefois, là où Cioran libère la tension par le rire, Jauffret suggère habilement les drames possibles : Elle se demandait dans combien de temps, il serait assez fort pour lui lacérer le visage, ou lui sectionner une artère [8]. Le lecteur perd l’envie de rire car il sait qu’existent de tels drames à huis-clos entre des mères – de plus en plus souvent seules – et leur progéniture devenue incontrôlable et potentiellement matricide.

A l’instar d’Elisabeth Badinter, Jauffret ne croit pas au caractère inné de l’instinct maternel. Ses mères contemplent, décontenancées, le fruit de leurs entrailles. Leur plus grand regret est d’avoir enfanté. Elles souhaiteraient se débarrasser de la chair de leur chair, ainsi cette femme du fragment 3 : ses enfants étaient de trop, elle n’en pouvait plus de les traîner à l’école, d’aller les rechercher, de leur courir après dans toute la maison[9] . Non seulement les mères n’éprouvent pas de tendresse mais elles ont le cœur si sec qu’elles en deviennent cruelles à considérer leurs rejetons comme des étrangers : ils n’étaient pas si intelligents ni si mignons, le monde n’aurait rien perdu si le néant les avait gardés. Elle aurait voulu qu’il l’ait gardée aussi, au lieu d’être là au milieu de toutes ces mères bonnes à jeter à l’égout à coups de pelle[10] . Les liens de la chair semblent bien impuissants à faire vibrer des cordes gelées. Jauffret qui ne se berce pas d’illusions sur l’amour en général sait qu’il existe des femmes au sein aride comme cette femme qui se félicite que ses enfants ne soient pas venus au monde, perturbant sa vie des années durant par leur faim, leur soif, leurs caprices[11] . Elle a finalement préféré se consacrer aux meubles anciens. Dans le monde de Jauffret sur lequel plane le dégoût de vivre, la maternité n’est pas un remède. Dans le fragment 15, elle s’avère impropre à délivrer l’héroïne du mal-être qui la taraude. Elle s’est même sentie plus triste à chaque naissance[12] . Le plus souvent dans les récits, les enfants apparaissent donc comme de simples boulets qui alourdissent un peu plus les multiples chaînes que portent les personnages, une entrave supplémentaire à leur désir de tout quitter pour recommencer à zéro.

Au sortir de l’adolescence – que Jauffret décrit peu – les personnages semblent n’avoir le choix qu’entre le carcan conjugal ou les affres de la solitude. Peut-être est ce parce que l’amour heureux n’a pas d’histoire que Jauffret ne s’aventure pas dans la peinture de premières rencontres, d’amours naissantes et d’instants riches de promesse. Si bonheur il y eut un jour, c’est toujours dans un lointain passé. Ce qui s’offre aujourd’hui au lecteur, c’est une image de la vie du couple qui égale en grisaille, et parfois en noirceur, la peinture de la solitude. La plupart des couples chez Jauffret en sont à l’heure du bilan qui s’avère le plus souvent accablant. Chacun rend l’autre responsable de l’échec de sa vie, persuadé qu’il est d’être passé à côté d’un meilleur possible, d’un destin plus exaltant, d’une vie en majuscule. L’artiste est convaincu qu’une femme plus jeune lui rendrait sa créativité mais il lui faut continuer à supporter l’étouffoir qu’il a choisi un jour, dans le coupable aveuglement de la jeunesse, de prendre pour épouse. On ne réfléchit jamais assez. S’il y eut un jour de l’amour, le couple en apparaît non seulement comme le tombeau mais comme ce qui cristallise les pires travers de chacun, égoïsme, froideur ou mépris. L’usure a tant endurci les cœurs que la mort de l’autre est attendue ou saluée comme une délivrance. La femme d’un artiste se réjouit ainsi que son mari ait fait une chute mortelle dans les escaliers, « le reste de son existence n’aurait été que jérémiades »[13]. Lorsque le sort est contraire, certaines femmes en viennent à souhaiter que leurs maris prennent une maîtresse pour souffler un peu. Il y a chez Jauffret quelque chose du Flaubert de Madame Bovary, une très grande aisance à pénétrer la psychologie féminine et le goût du romanesque. Avec cette remarquable sensibilité que l’on trouve plus souvent sous la plume des nouvellistes anglo-saxonnes, Jauffret se glisse dans la peau de ses héroïnes et explore leurs rêves inassouvis de passion fusionnelle. C’est le plus souvent aux femmes que revient dans l’oeuvre le romantisme échevelé et aux hommes un prosaïsme à toute épreuve. Exemple d’un de ces échanges entre une tragédienne et un rustre : Il lui a dit les enfants ont faim, on pourrait tous aller au restaurant. Elle lui a répondu aide-moi plutôt à me pendre au tuyau qui traverse la salle de bains [14] Il arrive, plus rarement, comme dans le fragment n° 9 que la tendresse masculine se heurte à une froideur revêche. Ici le protagoniste est un écrivain dont la sensibilité à fleur de peau est malmenée par une épouse qui ne s’épanouit que sur le terrain du quotidien. Il ravale donc ses déclarations d’amour, ses doutes quant à son talent qui depuis quelque temps l’abandonne, elle m’aurait répondu d’oublier d’écrire, songe-t-il vaincu par avance. L’un des mérites de Jauffret est de rappeler que romantisme féminin n’est en rien synonyme de sensibilité. La littérature féministe s’est trop souvent complu dans le manichéisme, faisant de la femme l’éternelle incomprise et l’éternelle victime. Jauffret montre au contraire des femmes qui, pour réaliser leurs rêves romantiques, marcheraient sur des cadavres et tueraient mari et enfants, comme cette femme résolue à se débarrasser d’un époux malade, lequel n’était plus qu’une épave dans sa vie, comme ces vieilles cuisinières qui encombrent les terrains vagues et les jardins abandonnés. […] Elle devait se retenir pour ne pas profiter de sa déliquescence, et l’écraser contre le mur comme une mouche [15] Délicieuse sensibilité féminine…

Parfois – mais rarement car les personnages de Jauffret ont une énergie inversement proportionnelle à leur imagination et une absence d’héroïsme caractéristique des représentants d’une humanité moyenne – la haine de l’autre va, comme dans le fragment 14, jusqu’à la tentative de meurtre, mais comme les personnages ratent tout dans leur vie jusqu’à leurs homicides, la lame, dans ce récit, se contente de glisser sur la cage thoracique et se perd dans le matelas. Le plus souvent, la haine est diffluente. Elle se répand dans des dialogues nocturnes dans lesquels les personnages égrènent la litanie de leurs récriminations, mais beaucoup de ces dialogues sont des dialogues de sourds, les réponses toujours à côté. Au fil des années, chacun est passé maître dans l’art de l’esquive.

La peinture de la solitude n’est pas plus radieuse. Les solitaires n’ont rien à envier à leurs congénères mariés. L’ennui est leur grand ennemi et le divertissement pascalien paraît presque trop noble pour décrire les samedis de cette héroïne occupés à passer plusieurs heures dans un grand magasin, traînant d’un rayon à l’autre, achetant un collant, un stylo à bille ou d’autres bricoles. Ensuite, elle mangeait quelque chose dans un café. A son retour elle s’allongeait jusqu’au soir[16] . On sent que Jauffret n’ignore rien de l’ennui des solitaires, des zones où il se tapit et des ruses pathétiques déployées pour s’arracher à ses griffes. Il décrit cette chape de plomb du silence sous laquelle sont plongés les appartement des solitaires. Fin observateur, l’écrivain sait que paradoxalement la solitude n’attire pas les sollicitations d’autrui mais que bien plutôt elle marque de ses stigmates celui qui la porte. Le solitaire devient le lépreux qu’on évite comme cette femme qui s’étonne qu’à la piscine personne ne lui adresse la parole même si son intelligence secrétait sans arrêt des opinions qui auraient pu intéresser les gens[17]. Mais la solitude est une maladie honteuse, elle est l’ombre dont ont peur ceux qui marchent dans la lumière, d’où pour les solitaires un immense sentiment de gâchis, d’intelligences et de sensibilités en friche. Parce que leur vie est désespérément vide et que le cœur a besoin de nourritures, les solitaires de Jauffret vivent parfois par procuration, comme cette femme du fragment 10 qui absorbe l’existence de ses collègues de travail à petites gorgées et, lors des informations, se repaît de la souffrance d’autrui pour conforter sa vision masochiste du destin. En voulant éviter les poncifs comme celui de l’animal, compagnon du solitaire, Jauffret découvre des solitudes souterraines, véritables forteresses imprenables dans lesquelles le cœur finit par se faire lui-même prisonnier, ainsi cette femme qui n’avait même pas d’animal ; il lui semblait que toute l’affection dont elle aurait été capable demeurait enfoncée au fond d’elle et qu’on l’enterrerait avec[18] .

Implicitement, Jauffret rejoint les conclusions de Lipovetsky dans L’ère du vide ou de Houellebecq dans toute son œuvre. Nous vivons à l’ère d’un capitalisme sexuel débridé et quiconque, par malchance, ne correspond pas aux lois du marché est impitoyablement éliminé et finit sur le bord de la route, en mendiant de l’amour. Jauffret montre ainsi une femme qui s’examine sans complaisance pour apprécier au plus juste sa valeur sur le marché et ses chances de n’être pas disqualifiée : les seins étaient minuscules, ils avaient cependant le mérite de tenir droit. Mais le fessier était plat, elle se cambrait en vain[19]. Le verdict est sans appel : De toute façon le visage lui causait trop de tort, dès qu’on l’avait vu, on ne perdait pas de temps à examiner son anatomie. Elle pleurait, tamponnant ses yeux avec un gant de toilette imbibé d’eau tiède[20] Puisque la disgrâce conduit aujourd’hui à la mort sociale, on comprend mieux que certains de ces solitaires, pressés d’abréger la torture, mettent tous leurs espoirs dans une maladie foudroyante ou un accident de la circulation.

Les solitaires de Jauffret ne sont pas tous comme les célibataires endurcis de Huysmans qui ont parfois le célibat goguenard et le sentiment d’avoir échappé au pire, ce sont aussi des femmes que l’on a abandonnées, des déçus de l’amour. Tous ne sont pas victimes d’autrui. Il existe chez certains une réelle difficulté à s’accommoder des imperfections du genre humain. Parfois, un rapport névrotique au corps, le sien comme celui de l’autre, compromet d’emblée toute rencontre, comme chez cette femme qui ne supportait ni la chair ferme, ni la chair molle, ni celle qui est glabre, poilue, blanche, noire ou écarlate. Elle aurait voulu pouvoir s’enlever ce corps comme une chaussure qui comprime les orteils, la cheville et le cou-de-pied[21] . Dans ces vies dont tout événement est absent, faire le ménage tient parfois lieu d’aventure et, à défaut de traquer l’âme sœur, on traque le grain de sable dissimulé dans les profondeurs de la moquette. Nombre de ces célibataires sont des pessimistes affectifs pour qui aimer, c’est immanquablement souffrir et finir abandonné. La noirceur de leur imagination fertile est parfois drolatique, ainsi cette célibataire qui s’imagine qu’un hypothétique mari aurait bien été capable de la laisser tomber pour filer avec un électricien venu installer une prise au salon. Si le pessimisme prête ici à sourire, ce qui caractérise le plus souvent les personnages de Jauffret, célibataires ou mariés, c’est une lucidité douloureuse.

C’est cette lucidité qui leur rend difficile voire impossible le rêve. A peine une femme malheureuse dans son couple s’imagine-t-elle partir vivre sur une île que déjà elle voit se profiler les ombres de l’automne insulaire : elle se rendrait compte soudain que le vent soufflait, qu’il pleuvait, et qu’il n’y avait plus personne à part quelques vieillards qui tiendraient l’épicerie, la taverne, ou passeraient leurs journées enfoncés dans de vieux fauteuils dont on les extrairait bientôt pour les coucher dans la tombe. Elle quitterait les lieux[22] . Le rêve est mort-né. Toujours des nuages sombres viennent obscurcir les cieux les plus radieux et il n’est pas rare que la clairvoyance des personnages tourne à cette hyper-lucidité décrite par Cioran : Seuls sont heureux ceux qui ne pensent jamais, autrement dit ceux qui ne pensent que le strict minimum nécessaire pour vivre. La vraie pensée ressemble, elle, à un démon qui trouble les sources de la vie, ou bien à une maladie qui en affecte les racines mêmes[23].

Chez Jauffret, cette maladie s’incarne par exemple en cette femme sur laquelle s’ouvre le fragment 15, qui ne comprenait pas qu’on puisse vivre une seule journée sans penser à la mort. […] Elle ne voyait pas comment on pouvait oublier l’échéance et faire semblant de croire qu’il y avait un moyen de passer à travers[24] . Tout l’y ramène, au coucher, la position horizontale évocatrice du cercueil, le froid du réfrigérateur ou la raideur d’un poulet rôti à demi dévoré par les enfants. Elle souffre de cette obsession de la mort que l’on retrouve chez les personnages de la romancière et nouvelliste allemande à qui nous avons consacré un ouvrage intitulé Ni vivre, ni mourir. L’ennui dans l’œuvre de Gabriele Wohmann. Chez elle comme chez Jauffret, la mélancolie n’a rien de « douce » mais renoue avec l’étymologie et retrouve toute sa noirceur. Non seulement les personnages ont l’esprit occupé par leur mélancolie mais ils sont aussi, en raison même de cette obsession, comme paralysés car toute velléité se dissout dans un accablant « à quoi bon ? ». Ils sont donc fatigués par avance. Certains, à l’instar des poètes romantiques, tirent orgueil de cette lucidité dont ils font un signe d’élection qui les hausse au-dessus du commun des mortels, ainsi cette femme qui ne serait pas heureuse, elle refusait cette amnésie, cette forme d’ébriété après laquelle tout le monde courait. A chaque instant elle se souviendrait, fière, prête à regarder face à face les trous des cimetières et l’os de son visage aux aguets sous la chair[25].

Si la lucidité empêche les enfants chez Jauffret de jouir de leur enfance, chez les adultes elle corrompt tous les prétendus plaisirs, ainsi les joies de la chair dont il ne subsiste qu’une mesquine comptabilité de coïts. La femme du fragment 2 concède à son mari une vingtaine de rapports dans l’année dont la durée n’excède pas le temps d’une bonne douche[26] . Malheur si le mari s’éternise et ne comprend pas qu’un accouplement mal dosé est non seulement un déplaisir mais une torture : il continuait, il allait, venait sans trêve. Elle n’avait jamais éprouvé une pareille sensation d’ennui, elle préférait encore les interminables journées qu’elle passait durant son enfance dans cette station balnéaire où il n’y avait aucune distraction[27] . Dans sa grande entreprise de démystification des plaisirs de la vie que Jauffret mène non sans un soupçon d’humour grinçant, il met en scène cette femme qui n’apprécie pas les coups de boutoir de son mari qu’elle accuse de diminuer ainsi ses chances de longévité : il la pilonnait comme si elle était une région ennemie. Il l’entamait à chaque coït, il lui faisait perdre des mois d’espérance de vie qu’elle ne retrouverait jamais. Plus tard, elle lui devrait ses rides, ses chairs flasques, et toutes les pertes de mémoire qui gâcheraient sa vieillesse[28] . Paranoïa, dira-t-on et certes, la situation peut paraître grotesque mais elle a le mérite d’interroger sur les sentiments parfois troubles qui dans l’« amour » anime les assaillants. Coups de boutoir ou coups et blessures déguisés ? Toutefois, les coïts qui s’éternisent sont loin d’être la règle. Ce serait prêter aux amants, dans l’œuvre en particulier et peut-être dans la vie en général, une improbable générosité et un peu vraisemblable souci de l’autre. Lorsque la femme qui n’en peut plus d’être pilonnée se remémore ses autres amants, force lui est d’admettre que c’était l’excès inverse qui était le plus souvent la règle : ils s’étaient tous pressés, comme s’ils avaient cherché à se dépasser les uns les autres[29] . Entre coïts trop brefs et accouplements interminables, n’est-ce pas toujours et encore une même insatisfaction qui s’exprime à l’égard de la chair. A lire Jauffret, l’échappatoire sexuelle comme remède à l’ennui existentiel est bel et bien une impasse : deux ans plus tôt, elle avait cru que la sexualité pourrait lui venir en aide et la distraire. Elle avait pris pour amant un homme rencontré dans une librairie. Durant cette passade, elle n’avait constaté aucune amélioration de son état. Elle avait eu des relations avec une femme, sans en retirer de bénéfice. L’œuvre semble avoir pour leitmotiv animal post coitum triste, même si parfois la solitude est si intenable qu’il faut bien en passer par là.

 Le plus souvent, chez Jauffret l’ennui existentiel est l’inaptitude à se réjouir de l’existence conjointe à l’incapacité de l’abréger. Certes, un certain nombre de personnages passent à l’acte mais la plupart se contentent de flirter avec le précipice comme cette épouse qui chaque matin ne peut s’empêcher d’ouvrir tous les brûleurs de la gazinière et de respirer avec une sorte de jubilation l’odeur du gaz qui envahissait peu à peu la pièce. Quand elle commençait à ressentir un léger malaise, elle ouvrait la fenêtre[30] . Le suicide est la solution ultime des conjoints à bout de souffle. Parfois l’incapacité à mener l’entreprise à bien prend un tour grotesque : elle avait si peur de la mort qu’elle n’osait avaler plus de cinq ou six comprimés à la fois[31] . On comprend qu’elle ait continué à attenter à ses jours trente années durant[32] .Bien que la plupart des nouvelles mettent en scène des conjoints désabusés ou des solitaires inconsolables et offrent donc un « motif apparent » au suicide, il arrive aussi que ce soit la vie en soi – et non pas ses versions dégradées – qui apparaisse comme le mal originel. L’écrivain du fragment 9 confesse : l’idée de mettre fin à mes jours me séduisait depuis l’enfance, même si le suicide n’était que le symptôme d’une maladie, un éternuement consécutif à un coryza[33]. On songe ici à la formule de Schopenhauer selon laquelle toute biographie est une pathographie[34] . Ainsi, chez Jauffret, le suicide ne relève pas du dérèglement nerveux mais de la clairvoyance quant à l’humaine condition. De la femme du fragment 11, il est dit : à certains moments, elle bénéficiait de quelques secondes de lucidité, elle se demandait alors quel était le moyen le plus efficace de se suicider[35] . Elle y parvient finalement. Ce n’est pas tant l’acte lui-même qui apparaît comme tragique que la notation sur les derniers instants de cette femme qui fait apparaître sa vie comme un ratage complet et une souffrance jusqu’à la dernière seconde de lucidité : son corps était tombé sur le tapis. Elle n’avait pas eu le temps de s’apercevoir que pour la première fois les remèdes lui apportaient l’apaisement auquel elle avait toujours aspiré[36] . D’autres, plus nombreux, souffrent d’une faiblesse de la volonté comme cette autre femme prête à demander à la femme de ménage de l’aider à se jeter par la fenêtre[37]. Tous les personnages ne partagent toutefois pas cette tentation du suicide. Beaucoup ne parviennent pas à adhérer à la vie mais ne trouvent pas pour autant séduisante la perspective de la mort, ainsi cette femme qui éprouvait une tristesse à hurler d’être obligée de mourir dans quarante ou cinquante ans, de passer à la casserole comme un vieux légume qui n’inspire de pitié à personne[38] .

Puisque la grande évasion fait peur, de nombreux personnages se contentent d’escapades au rabais. Quand ils n’en peuvent plus de la médiocrité, des routes tracées au cordeau et de l’avenir infiniment prévisible, il leur vient des lubies, des envies d’extravagance mais ce ne sont le plus souvent que fulgurances sans conséquence, ainsi cette épouse qui en écoutant les informations rêvait de tirer des obus assise au fond d’un char, survoler des villes, jeter des bombes en pleine nuit sur les populations assoupies[39] . Ce que cela cache est une fois encore l’ennui : elle aurait voulu se trouver ailleurs. Cette maison confortable, remplie d’une famille prospère, ne lui procurait aucune joie[40] . On comprend toutefois aussitôt que le risque qu’elle passe à l’acte est inexistant : elle aurait pu s’en aller, mais elle ne voulait pas s’encombrer des enfants et le courage lui manquait de les laisser derrière elle. Elle ne partirait pas, elle était lasse, paresseuse, incapable de se constituer une vie neuve[41]. C’est ainsi que chacun se façonne ses propres alibis de manière à continuer à cultiver tranquillement ses névroses. Jauffret excelle ainsi dans l’art des fuites avortées, des routes qui se transforment en déroutes et des tours du monde qui s’achèvent au coin de la rue. On ne sait s’il faut rire ou pleurer lorsqu’une épouse, fatiguée de tout, descend la nuit au garage, s’installe au volant et se voit déjà dans une chambre d’hôtel mais que, quelques lignes plus tard, le lecteur apprend : elle est sortie de la voiture, elle est remontée manger un morceau de fromage à la cuisine[42]. Encore une épopée qui tourne court. Les plus courageux poussent quand même l’aventure jusqu’au cinéma du coin ou au bistrot du bout de la rue. On n’est pas en Amérique ! La France n’est pas la terre de tous les possibles, le pays manque cruellement de héros. Le romantisme échevelé atteint vite ses limites. Parfois la fuite se borne à enchaîner quelques verres dans un café enfumé pour ne plus voir à la place des visages des gens qu’une tache brouillée, dans les blancs, les ocres, et les gris[43] ou à aller cinq fois par semaine chez le coiffeur pour changer de visage à défaut de changer de vie, jusqu’à ne plus avoir sur le crâne qu’une mince couche de duvet d’oiseau[44].. Toutefois, on n’échappe jamais à soi-même. On peut tout au plus changer de coiffure mais on ne se gomme pas comme on effacerait une ardoise magique, on ne se défait pas de son psychisme comme d’un manteau qu’on abandonnerait au vestiaire, d’où la plainte de cette femme dont la peau lui semblait être un vêtement d’emprunt qu’on aurait choisi à sa place. Elle regrettait d’avoir à supporter vingt-quatre heures par jour cette fille qu’elle avait sur son squelette, et dont elle n’aurait jamais accepté le rôle si on le lui avait proposé au cours d’art dramatique[45]. La folie est parfois envisagée comme une possible échappée mais la raison est opiniâtre, elle ne se laisse pas égarer si aisément. Bien que, comme nous l’avons déjà signalé, la sexualité apparaisse post coitum toujours comme décevante, elle n’en finit pas de séduire ces personnages prisonniers, qui rêvent d’endorphines pour anesthésier leur malheur, d’orgasmes libérateurs, qui rêvent que l’autre ouvre par magie le cadenas qui les maintient prisonniers de leur vie. Nombreux sont les personnages qui, n’y tenant plus, sortent, se donnent à un inconnu et appellent la sexualité au secours comme on réclame un analgésique[46] . Les plus timorés se contentent de se faire prescrire un arrêt de maladie pour échapper, l’espace de quelques jours, à l’immuable engrenage de la routine. Comme Beatrix, l’héroïne de la nouvelle d’Ingeborg Bachmann, Problèmes, problèmes, qui a fini après bien des enfantillages anciens par trouver dans le sommeil l’accomplissement de sa vie, les personnages de Jauffret, à qui manque souvent le courage de solutions radicales, passent une partie de leur vie à dormir comme cette épouse du fragment 3 qui se recouche à midi pour fuir les assauts de la grisaille car même quand le salon était tout éclairé par le soleil elle trouvait le temps gris[47]. C’est un des expédients dont usent les solitaires pour abréger les fins de semaine. Mais le sommeil n’est jamais libérateur, il n’est toujours qu’une anesthésie temporaire qui repousse au réveil l’angoisse existentielle, un bienfaisant coup de matraque sur l’occiput[48] . A défaut, une des héroïnes s’enferme aux toilettes toutes les deux heures pour faire la sieste car elle a réalisé à quel point l’existence était noire et ennuyeuse quand il devenait impossible d’en faire passer le plus clair par la trappe du sommeil[49].

Parce que les textes sont riches de gestes potentiels, de paroles en suspens, le conditionnel est le mode favori de Régis Jauffret. C’est le mode de l’irréel des rêveurs et du regret des déçus. Les textes regorgent de tout ce qui pourrait advenir ou aurait pu advenir si… s’il n’était pas trop tard, s’il n’y avait pas la peur d’être plus seul encore en partant, si tout cela servait encore à quelque chose et si tout n’était pas déjà perdu d’avance. Chacun moisit donc à l’indicatif en se trouvant une bonne raison de prolonger le statu quo et de différer la désertion.

A quoi faut-il imputer un tel amoncellement de misères ? Pour notre part, nous inclinerions à réunir l’ensemble des personnages sous l’étiquette du sentimental dépeint par René Le Senne, père de la caractérologie. Il convient de préciser que le sentimental n’est pas toujours sensible au sens charitable du mot. Il peut même, comme beaucoup des personnages de Jauffret, être prêt à piétiner allègrement la sensibilité d’autrui pour faire triompher ses sentiments. Voilà à quoi ressemble le portrait du sentimental de Le Senne : Par l’influence secrète mais constante de son inactivité, ici accrue par celle de la secondarité qui empêche la spontanéité rapide, son émotivité est tournée vers son échec, bref, vers les sentiments tristes, plutôt que vers son essor, vers l’allégresse joyeuse de l’action. Enfin, la secondarité, en prolongeant ces expériences, en les offrant à l’intuition intérieure du sujet lui-même, approfondit cette tristesse par son doublement dans la réflexion. Ces raisons s’ajoutant les unes aux autres doivent déterminer le sentimental plus que quiconque à ressentir les émotions comme des souffrances, les événements comme des agressions, le nouveau comme hostile[50]. On retrouve encore les personnages des Fragments de la vie des gens lorsque Le Senne conclut : le trait important où les propriétés plus spécialement conditionnées par le groupement non-actif secondaire viennent concourir est la disposition à l’ennui[51] .

Jauffret, pour sa part, semble avancer une explication sociologique qui ne convainc guère : je n’ai que l’expérience assez restreinte du milieu dans lequel je vis, pourtant je me sens très proche de toutes ces zones de la société où la souffrance est presque obligatoire tant aucune chance ne vous est accordée ?[52] Ses Fragments de la vie des gens seraient-ils du Zola ressuscité ? Dans cette citation, Jauffret fait découler la souffrance de ses personnages de zones particulières de la société qu’ils habitent. Pourtant, sa description du milieu est des plus parcimonieuses. Dans la plupart des nouvelles, le « milieu » est escamoté au profit de monologues intérieurs qui font naître l’impression que le mal être qui s’exprime pourrait surgir n’importe où. Et puis, les personnages ont un métier, ils ont un toit, ils possèdent des voitures et des télévisions, ils partent en vacances, certains ont même des bonnes d’enfants. Alors que la formule de Jauffret suggérerait une espèce de désespérance liée à une forme de précarité, il nous semble plutôt que ce qui s’exprime ressemble davantage à ce que le poète allemand Hans-Magnus Enzensberger a dépeint dans un poème intitulé Middle-Class Blues. Comme Enzensberger, Jauffret est iconoclaste dans la mesure où il prend implicitement le contre-pied de toutes les valeurs de la société qui est la nôtre. Il ne croit pas un seul instant au désormais célèbre travailler plus pour gagner plus qui semble sous-entendre et vivre mieux. Manifestement, il ne partage pas le rêve de l’accession généralisée à la propriété comme sésame du bonheur. Décrivant le décor dans lequel évolue le personnage féminin du fragment 3, il note : cette maison confortable remplie d’une joie prospère ne lui procurait aucune joie[53]. Ses héros sont même doublement prisonniers. Ils ont à la fois conscience que leurs maisons individuelles proprettes sont leur cercueil mais au fond des tripes la peur plus grande encore de perdre leur sécurité matérielle. A propos du même personnage, Jauffret ajoute : elle méprisait la mort, en revanche elle craignait la solitude et les difficultés matérielles[54]. Et chez beaucoup d’autres, on assiste à cette immobilité douloureuse dans des prisons de standing. Certains personnages, notamment de femmes qui ne travaillent pas, entrevoient que le désoeuvrement est à la fois leur privilège et leur pire ennemi mais l’idée de se mettre au travail tient plus de la rêverie fantasque que de la volonté. L’héroïne du fragment 14 se contente de dire qu’ elle accepterait de s’atteler à n’importe quelle tâche, mal installée sur un tabouret au tissu déjà usé par les postérieurs qui auraient précédé le sien, dans un bureau sans fenêtre, aux parois repeintes trente années plus tôt par une équipe d’ouvriers tous décédés depuis[55] . Toutefois la paresse – et l’ennui qui en découle – finit toujours par triompher, non sans quelque détour comique en l’occurrence puisque la malheureuse téléphone à une entreprise pour devenir laveur de vitres. Il y a des candidatures qui tiennent de l’ironie mais permettent d’être en paix avec sa conscience et de se dire que l’on a pourtant décidément tout essayé – sans y avoir cru un seul instant. De retour à la maison, la femme décide de remplacer le travail par la lecture ou des verres de vin qui la mettraient de bonne humeur de gré ou de force[56] - sans exclure de recopier un dictionnaire ou un livre d’économie.

C’est ce sens du burlesque qui, malgré leur noirceur, rend maints récits savoureux. Les personnages, pourtant monomaniaques, ne sont jamais à court d’idées fantasques comme cette femme qui, ne sachant dans quel magasin tromper l’ennui, songe à aller aux Pompes funèbres acheter un cercueil mais elle se ravise à l’idée qu’elle n’en aura peut-être pas besoin avant une soixantaine d’années. Elle se rend donc finalement à la banque où elle vide le compte de son couple avant d’aller jeter l’argent dans les toilettes publiques pour que son mari apprenne que l’argent n’existe pas davantage que le reste[57] . L’ennui engendre des épopées dont les bien-portants n’ont pas idée…

Malgré l’humour, on peut parfois se demander si les nouvelles de Régis Jauffret ne pèchent pas trop souvent par un excès de noirceur. Lorsque l’on surprend au hasard du recueil quelques lignes de bonheur conjugal, d’affection réciproque, c’est pour mieux être détrompé aussitôt, pour que la chute soit plus rude. Or toutes les chutes ne sont pas convaincantes. Certains drames semblent par trop mis en scène, ainsi la brusque fin de cette idylle : Elle posait son nez sur son cou, elle le humait comme une fleur. Elle se réveillait parfois dans la nuit, elle éclairait la veilleuse pour le voir. Un matin, elle l’a secoué pendant une bonne minute pour qu’il se réveille, puis elle s’est aperçue qu’il était raide mort dans le lit. Quelques heures plus tard, elle a tenté de se suicider. Ce fut un échec. Elle a recommencé le mois suivant. Elle n’a pas réussi non plus[58] . Certains détails apparaissent comme une surenchère dans le misérabilisme : Elle partageait son temps entre l’hôpital et le petit studio qu’elle louait dans une cité modeste. Au cours des années, son chagrin intarissable avait lassé sa famille et ses relations[59] . Au risque de parodier le texte, c’est parfois le pathos intarissable qui lasse le lecteur et a valu à l’écrivain quelques critiques, ainsi celle de Gilles Magniont dans Le matricule des anges  : L’existence est un fardeau dont témoignent les couples entrevus derrière la paroi de leur « aquarium », divers cas de bovarysme, la tristesse du célibat – cochez la case vous concernant…La mort comme « seul futur acceptable » et le leitmotiv du suicide parcourent alors en toute logique les pages du recueil. Ouf : on peut trouver ça imposant de noirceur, on peut aussi considérer qu’il n’y a pas plus convenu que l’expression clinique et nauséeuse de la dépression[60] . Il convient toutefois de reconnaître à l’écriture de Jauffret des vertus salutaires. Tant de drames pourraient apparemment être évités si une parole était prononcée avant l’instant fatidique, si un geste était accompli au moment juste. Il suffit parfois d’un rien pour éviter que le destin bascule. Le lecteur prend conscience du poids de toutes ces phrases non dites, du fait que la vie se compose – et se décompose – d’une multitude de conversations avortées, de paroles réprimées, par peur du ridicule ou de crainte qu’on y voie un aveu de faiblesse, ainsi dans ce passage du fragment 9 : J’aurais voulu lui dire que je tenais à elle, par exemple si elle tombait morte sur le gravier, je serais complètement désemparé. Nous sommes entrés dans le magasin. […]Nous avons terminé par un paquet de chewing-gums pris sur un présentoir près de la caisse[61] . Ce sont autant de preuves d’amour retenues, de consolations manquées, de souffrances ravalées, comme ces larmes non versées qui dans Mars, le roman de Fritz Zorn, finissent par s’enkyster et engendrent une tumeur. Fragments de la vie des gens est donc aussi une invitation à sortir de sa torpeur et de sa léthargie naturelles. La lecture de Jauffret, c’est l’occasion de mesurer les ravages du silence et de libérer la parole – ou l’écriture.

Benoît Pivert


[1] Régis Jauffret, Fragments de la vie des gens, éditions Verticales/Le Seuil, mars 2000. Nous citons d’après l’édition Folio, 2004.

[2] P. 12

[3] p. 9

[4] p. 11

[5] p. 12

[6] F. Hoekstra, Bruegel l’ancien, PML éditions, Weert, Pays-Bas, p. 24

[7] E.M. Cioran, Le mauvais démiurge, Paris, 1969, cité d’après Œuvres, Quarto Gallimard, p. 1250

[8] Jauffret, opus cit., p. 58

[9] p. 21

[10] p. 24 sq.

[11] p. 97

[12] p. 111

[13] ibid., p. 36

[14] ibid. p. 50

[15] ibid. p. 125-126

[16] p. 71

[17] p. 73

[18] p. 76

[19] p. 76

[20] ibid.

[21] p. 80

[22] p. 49

[23] E. M. Cioran, Sur les cimes du désespoir in Œuvres, Paris, Gallimard, p. 48

[24] Fragments de la vie des gens, p. 105

[25] p. 110

[26] p. 15

[27] ibid.

[28] ibid.

[29] p. 16

[30] p. 23

[31] p. 54

[32] ibid.

[33] p. 67

[34] A. Schopenhauer, Le vouloir vivre, l’art et la sagesse, Paris, PUF, 1956, p. 179

[35] p. 83

[36] p. 84

[37] p. 107

[38] p. 115

[39] p. 23

[40] ibid.

[41] ibid.

[42] p. 29

[43] p. 75

[44] p. 81

[45] p. 143

[46] p. 115

[47] p.

[48] p. 121

[49] p. 139

[50] René Le Senne, Traité de caractérologie, Paris, PUF, 1945, p. 218 sq.

[51] ibid. p. 267 sq.

[52] quatrième de couverture

[53] p. 23

[54] ibid.

[55] p. 115

[56] p. 116

[57] p. 120

[58] p. 54

[59] ibid. C’est nous qui soulignons.

[60] Gilles Magniont, Le matricule des Anges, n° 31, juillet/août 2000.

[61] R ? Jauffret, op. cit., p. 62

 

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