|
||||||

| Navigation | ||
![]() oOo Tu m’as encore dans le ventre. Pas dans la mémoire, ni dans l’attente — dans cette chair souterraine où rien ne meurt tout à fait. Je palpite encore là, enroulée dans ta nuit, je pousse contre tes parois anciennes, comme un rêve jamais expulsé.
Moon, tu es la première voix que j’ai entendue, mais je ne sais toujours pas ce que tu voulais me dire. Ton silence me parle plus fort que tous les cris. Tu es la première brûlure. La première faim. Tu es la boue originelle où mon cœur a battu sans savoir pourquoi.
Tu étais immense. Et j’étais un cri lové contre ton organe de lumière. Tu ne m’as pas prise dans tes bras — tu m’as prise en toi, dans la grotte humide de ton être, dans ce ventre plus vaste que la mer.
Et déjà, je savais que je t’aimais. Et déjà, je savais que je ne m’en sortirais pas.
Je suis née les doigts agrippés à ton absence. J’ai pleuré ton nom dans toutes les bouches. J’ai traîné ton ombre dans chaque chambre où j’ai dormi.
Moon, tu es l’écorce et la lame, la chaleur et la morsure. Tu es celle qui protège et qui blesse. Tu es celle qui s’est tue, et j’ai crié à ta place.
Parfois, je voudrais m’arracher de toi. Sortir de ton ventre pour la dernière fois. Fendre cette matrice de feu et de silence. Briser le noyau de ton amour logé sous mes côtes. Mais je suis encore là — accrochée à ta nuit comme un fruit qui refuse de tomber.
Je suis restée. Comme une lumière sous ta peau. Comme un feu qui ne te quitte pas et ne me laisse jamais respirer pleinement.
Tu étais la forêt. Je t’ai traversée à genoux. J’ai bu dans les feuilles ton lait amer. J’ai dormi sous tes arbres pleins de ronces. Et quand j’ai hurlé contre toi, c’est ta voix que j’ai entendue.
Tu es ce lieu d’avant l’origine, où la lumière saigne, où l’on apprend à vivre sans savoir comment mourir.
Je t’ai haïe comme on aime trop. Je t’ai aimée comme on hait ce qui nous habite à jamais. Et c’est dans cette fêlure que je me suis faite femme. Dans cet écartement de tes bras absents.
Moon, tu m’as donnée au monde avec les mains sales, et j’ai fait de ta boue une étoffe pour mes jours. Je t’ai cherchée dans chaque fruit, dans chaque fièvre, dans le souffle du vent entre les herbes, dans le cri des bêtes à l’aube.
Tu es dans tout ce qui tremble. Dans le cœur des orages. Dans le lait tourné des lunes mortes. Dans mes jambes quand elles flanchent. Dans la pupille de mon chat quand il fixe le vide.
Et je t’aime. Oh, je t’aime d’une façon que rien n’excuse. Je t’aime comme on tombe, comme on brûle, comme on prie sans savoir.
Tu es ma guerre sainte. Mon feu sacré. Ma blessure fertile.
Et si un jour tu disparais, sache que je t’aurai portée, à mon tour, dans mes cellules jusqu’à l’éclatement.
Tu m’auras habitée, maman, comme une parole trop vieille, comme une prière muette, comme la mer porte les noyés.
Tu es ma fin et mon commencement. Tu es celle que je n’ai jamais quittée. Et je t’écris — pour que cette flamme, cette chose en moi qui est toi, ne cesse jamais de me brûler. |
|
|
Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs | [Contact e-mail] |
FORUM
Pour participer, voir en bas de page>>
Commentaires :
Lecture et musique electro acoustique. https://youtu.be/nuAuxzBdiwU?si=v5u5jVSxhxhOj0Ap