L’Espagnol Santiago Montobbio a été rarement recensé. Tout simplement parce qu’il nous a envoyé un seul livre, en espagnol et non traduit, mais aussi et surtout parce qu’il a vécu vingt ans de silence, sans écrire. Nous avions même cru à sa disparition, mais le revoici avec un recueil important : La poésie est un fond d’eau marine. C’est en février 2009 que la poésie lui est revenue, et il s’est mis à écrire ses carnets dans le désordre. Au total, jusqu’à peu, 942 poèmes, qu’il dut classer, relire, revoir, pour en faire un ensemble cohérent. Et pour la cohérence, il est champion, car j’ai rarement lu un livre qui tienne ainsi à la fois la qualité et la distance. Je dois dire encore, ayant lu en son temps et avec difficulté le premier livre, que la traduction de Jean Dif m’a confirmé dans le respect que j’avais déjà pour ce poète. Un exemple s’impose : "La solitude est un patrie. Je lève/ les mains en l’air/ et je sens le parfum d’une rose/ qui se forme en moi en secret./ Dis-moi si je peux vivre ainsi…" Il a écrit et publié bien d’autres recueils, uniquement en espagnol, mais il insiste sur le caractère particulier du présent ensemble, pour lui différent des précédents. Il y postule que "la poésie est aussi une grotte dans laquelle sans signaux/ ni lanternes ni équipement je me terre..."
Paul Van Melle
Santiago Montobbio, La poésie est un fond d’eau marine, Editions du Cygne, Paris, 2011. (Traduction de Jean Dif).