Catalogue de Valérie Constantin | |
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Compressions - par Stéphane Pucheu |
COMPRESSIONS I, II et III
Valérie Constantin est une artiste plasticienne dont l’amour pour les mots se transfigure au travers de spéculations picturales éminemment subjectives.
La sobriété du titre, déjà, délimite le sujet, cette vaste discipline qu’est la littérature. L’auteur que je suis, l’homme de mots que je suis est sensible à l’extension de ces lettres, phrases ou paragraphes en matériau plastique, en matériau artistique nouveau, d’autant que les couleurs, le noir et le blanc, sont synonyme de profond respect pour cette discipline à laquelle Valérie consacra une grande partie de son temps.
Ainsi, des pages et des pages de manuscrits, des écritures sans doute différentes et des héritages mémoriels tout aussi hétérogènes ont probablement présidé à l’élaboration de son travail. Hommage aux mots, donc, hommage à la prose synonyme d’envahissement, de prolifération, et qui d’un coup, de par leur cadrage, semblent photographiés, immortalisés.
Oui, Valérie a photographié les mots par le biais de couches contrastées, modifiant leur taille pour mieux souligner leur présence et leur beauté. C’est aussi la puissance de la littérature qu’elle dévoile à travers sa démarche, autre émanation de ses tableaux : l’étalement du noir contenant l’unité des mots, dans un espace envahi.
Plus avant : c’est l’ontologie des mots qui est mise en forme, là, sous nos yeux. Des mots connaissant une continuité existentielle sous le concept de spatialité.
Les mots ont une place précise dans l’espace, une place qui devient proliférante (Compressions II).
La centralité de certains passages conduit les autres à la périphérie (Compressions I).
La mobilité et la danse du sens engendrent un tableau dynamique (Compressions III).
Nul doute que la prosodie est bel et bien présente au sein de « Compressions », une prosodie magnifiée. Car tout lecteur digne de ce nom est forcément sensible à cet aspect de la syntaxe. De surcroît, le mystère de la création littéraire est abondamment souligné par le biais de ces inlassables mouvements picturaux qui se déclinent en série.
Si la netteté du sens est mise en exergue, ainsi que l’austérité de la littérature, un autre substantif, la nuance, semble également incarné comme en témoigne l’entrecroisement parfois délicat du noir et du blanc.
Par un effet de débordement, je ne peux m’empêcher, par ailleurs, de formuler des hypothèses concernant la formation picturale de cette artiste, songeant avec une certaine évidence, à partir de ses « compressions », à de grands maîtres de la peinture tels que Rothko, Soulages ou encore Mondrian, pour qui la discipline se confondait avec l’avènement d’une netteté radicale.
Radicale... Valérie Constantin l’était sûrement dans son approche des arts plastiques, à la fois investigatrice et déterminée, nette en un mot.
Dans cette ode à la littérature, le travail de l’artiste demeure ouvert à l’interprétation. Des constances, des répétitions d’un tableau l’autre, oui... avec des nuances inédites. Sans cesse nouvelles.
En noir et blanc, comme l’essence de la photographie qui permet de voir le monde dans toute sa compression...