|
Navigation | ||
![]() oOo Il trotte et pète en chœur, le poète à dada ! Il est plouc de service ou enseigne en soldat, Approchant de ces murs où se décident lois, Je n’étais pas auteur mais sorte de piédroit |
![]() |
Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs | [Contact e-mail] |
FORUM
Pour participer, voir en bas de page>>
Commentaires :
Si la pratique de l’axiome est bien pensée, alors il est juste de se dire, calcul et expérience à l’appui, que si l’univers est en expansion, il a un commencement et une fin. Un commencement dans quoi ? Une fin dans quelle idée ? On n’a pas fini de s’en poser, des questions, des questions aux réponses tout aussi axiomatiques que l’exercice de la pensée. Ainsi, si l’on en croit le postulat gorurien* : « Ici, peu de schizos, beaucoup de paranos et surtout, énormément de cons ».
Comme le poète n’est pas con (je suppose), et que l’immense majorité des cons ne lit pas, ou lit ce qu’on lui ressert depuis des lunes pourvu que la sauce lui rappelle quelque chose, beaucoup de temps serait perdu à commenter les activités de l’essentiel, en quantité, du troupeau créé à un moment donné sur le fil d’un temps qui menace toujours de s’achever d’une manière ou d’une autre… pour laisser la place libre à d’autres inventions du hasard ou au néant retrouvé justement pour cause de temps.
L’autre masse, d’ailleurs grandissante on ne sait exactement pourquoi : effet de la pratique démocratique ou des ressources apparemment inépuisables du marketing, s’est nettement scindée avec l’expérience d’une poésie toujours plus communicante (à défaut de porter plus loin) : on distingue assez aisément, dans l’espèce de brouillard occasionné par la passion : des lieux municipaux, fournisseurs de la pire des médiocrités scripturales, et des séjours universitaires, pour ne pas dire bordels, où se joue la recherche qui ne trouve pas ou à peine de quoi alimenter ses ambitions pédagogiques et méritoires.
Plus rare, comme filon ou tarasque, le schizo donne des signes de trouvaille, comme on ne peut pas s’empêcher, qu’on soit con ou pas, de reconnaître le mystère annonciateur d’un infini qu’on ne peut pas tenir par un bout même si la raison dit le contraire. Il faut en effet l’avoir perdue pour trouver encore assez d’énergie dans le refus de se laisser « soigner ». La folie, qu’on associe plus nettement à la mort qu’au crime, n’a pas encore cessé de préoccuper les autorités ni ceux qui s’y soumettent pour « avoir la place » ou la planque.
Pourtant, le seul mystère restera celui de l’absence ou en tout cas d’un état, pas forcément irréversible (comme l’est le temps, par exemple), si proche de la mort que la moindre étymologie perd tous ses droits sur le principe élocutoire que d’aucun nomme poésie si l’occasion, au sortir d’un escalier ou de tout autre lieu, se présente à l’esprit ou au cul.
Bien sûr il y a maints moyens de se rendre fou (je simplifie) ou de le paraître, telle « l’absente de tous bouquets ». La condition nécessaire à cette espèce de métamorphose consiste d’abord à ne pas être atteint, par cheminement ou par sang, de connerie. Rien ne saille non plus des ordres fréquentés par les municipalités et les universités. Et le plus souvent, la poésie des asiles n’en sort pas indemne de toute trace médicamenteuse. De quoi donner à la morosité tous les matins que la nuit prend toujours le temps de fomenter.
Pas facile de se situer dans cette hiérarchie fatalement horizontale et donc sans valeur de jugement. Sans doute le con ne sait-il pas qu’il l’est et bien souvent le poète de cour, en sa municipalité ou en cours de recherche, n’a pas les moyens de dissimuler, aux yeux du spécialiste, son hypocrisie doublée de jalousie et de bêtise. Mais le fou sait-il qu’il est fou ? Celui qui se croit assez fou pour « trouver du nouveau » n’a-t-il pas au moins une fois dans son existence mis les pieds dans un conseil ou un séminaire pour plaider sa cause menacée d’enfermement ?
Ce poète chez-soi (chessois est le gentilé de Chez, proche de Pandémonium sur la Carte) habite bien quelque part si toutefois on ne l’a pas encore enfermé pour qu’il ne sorte plus. Pour ma part, je suis bien incapable d’en faire, pour l’usage commun, un personnage assez maître de lui pour m’en imposer chaque fois que je prends la plume. Je pense, peut-être à tort, qu’il constitue plutôt mon spectacle. Je n’entre pas, bien sûr. Et je plie bagages le plus souvent pour aller me loger avec les autres, soumis aux lois du loyer et de la paternité. Qu’est-ce que j’y peux ?
*Tout ce qui suit est une libre interprétation qui me sépare peut-être de l’auteur des goruriennes…
En ces temps de conservatisme, progressisme, wokisme, humanisme, universalisme, inclusionisme et tout ce qu’on voudra pourvu que ça passe, la situation du poète.e dans la cité a perdu les contours que les temps passés, souvent à ne rien faire, lui avaient attribué.s on ne sait plus d’ailleurs pourquoi ni comment. La question de la vieillesse se pose donc avec une acuité qui vire vite à l’inquiétude si on ne prend pas garde à se voiler la face, comme le recommande le Prophète.e lui-même, pour ne pas sombrer dans un herméneutisme propre à vous délabrer sans laisser de traces. Quant à celle de la jeuness.e (la question de), elle ne se pose plus en termes de croissance mais relativement à ce qu’on compte faire de ses dix doigts si on n’en a pas perdu quelques-uns en route, ce qui participe toujours de l’infantilisation inhérente au militantisme. En citant ci-après une anecdote extraite de Francion (celui de Charles Sorel), je ne veux pas autre chose que montrer à quel point nous sommes éloigné.e.s des temps où la poési.e était une question (encore un.e) d’apparence, dans le sens sans doute noble du terme, mais enfin...
[lire le portrait de Musidor par Francion...]
Le sens de son destin... https://youtu.be/QDgoh6YN3S0?si=RxQ3wVTtgEXVXGzc
Il est plouc de service... https://youtu.be/QDgoh6YN3S0?si=rQb0jMtlVaZN8Tel
Comme le poète n’est pas con ! https://youtu.be/0m3u8eBZ8MQ?si=hsQ1xP9Mr_nqfev1
Ce poème s’élance dans une chevauchée burlesque où le poète, monté sur un dada capricieux, trotte et pète en cadence, comme une fanfare désaccordée mais obstinée. Il y a, dans ces vers, une ironie grinçante, une révolte goguenarde contre l’ordre établi et ceux qui en régissent les règles. Le poète, tantôt militant, tantôt plouc de service, tantôt enseignant ou soldat, apparaît comme un être hybride, à la fois grotesque et tragique, un errant dont la mission se délite dans le fracas des infortunes.
Son destin n’est pas une noble quête mais une besace où il fourre, pêle-mêle, ce qu’il cueille au passage : un éclat de grogne, une désillusion, un cri noyé. Son pas est cyclique, presque absurde, car il ne fait que reprendre la même route, encore et encore, Sisyphe burlesque dont la marche ne conduit jamais ailleurs que là où elle a commencé.
Le dernier mouvement du poème ouvre une brèche plus amère encore. S’approchant des lieux du pouvoir, où se formulent lois et mœurs, le poète s’élève comme un chevalier de la Lune – image splendide et désabusée d’un être qui ne combat que dans l’inconsistance des songes. Il est celui qui voudrait dire, qui voudrait être reconnu, mais à qui l’on refuse le statut d’auteur, le condamnant à n’être qu’un piédroit, un support immobile et silencieux, chargé de soutenir les lacunes d’un édifice absurde.
Il y a dans ces vers une tonalité à la fois satirique et mélancolique, un jeu d’échos entre le trivial et l’idéal, une énergie rieuse qui dissimule mal la morsure d’un rejet. Un poète-culbuto, qui retombe toujours sur ses jambes, mais dont l’élan se heurte à des murs où ne résonnent que le silence et la dérision.