Du génie et du grand talent
Dans la littérature, Zola ne m’a jamais vraiment attiré. J’ai pris pourtant un vrai plaisir à lire le « Bonheur des dames » qui décrit la naissance d’un des premiers grands magasins Parisiens, à savoir le « beaumarché » aves ses premières clientes. Zola n’a jamais été au coeur de ses romans mais il notait tout minutieusement (tel un journaliste qu’il était dans l’âme) en allant sur place pour voir afin retranscrire ensuite. Il était très curieux de la vie de la société de son temps. Mais c’est son action et son engagement (son fameux « j’accuse ») à un moment donné que l’histoire retiendra, je pense, en cette année de l’anniversaire du centenaire de Jean Jaurès et de Saint-John Perse.
Zola n’était pas un génie littéraire. C’est, je pense, un grand talent littéraire sans génie.
Il est celui qu’un auteur comme Tom Wolfe admire et cela se ressent dans ses romans, par exemple dés les toutes premières pages de « acid test » que je lis, en ce moment.
Il est beaucoup plus facile de reconnaitre le grand talent et le petit que le génie.
Aujourd’hui, par exemple, il n’y a une multitude de talents divers comme il n’y a jamais eu.
Le grand talent est moins rare que le génie. Le grand talent littéraire ne travaille pas comme le génie littéraire. Il faut beaucoup d’acharnement au grand talent pour parvenir à ses fins.
Flaubert est l’exemple, parfait. Il travaillait jusqu’à 18 heures par jour dans l’écriture et pouvait passer deux ou trois heures à l’élaboration d’une seule phrase.
Le génie littéraire n’est généralement pas un grand travailleur, cela lui vient rapidement et facilement souvent comme un « éclair au front » (pour reprendre le titre d’une biographie de René Char), il cède souvent à la facilité, de ce fait.
Dans le domaine musical comme dans celui de la peinture, de la sculpture, de la photographie et du cinéma c’est la même chose, je pense.
La facilité d’écriture se rapporte au génie, oui, maintenant le génie se rapporte également au vécu de l’auteur, à sa personnalité, à son éducation et n’a aucune considération morale.
Du génie en général, je peux dire qu’Hitler en avait mais son génie, il va s’en dire fut malsain, sans aucune considération morale. Un génie national dans des considérations les plus extrêmes ; un génie de la froideur la plus poussée prit dans des forces les plus malsaines.
Il y a différentes sortes de génie, il y a le génie de Picasso, le génie de Dali, le génie de Louis Ferdinand Céline, le génie de Baudelaire, le génie de Camille Claudel, le génie de Rimbaud, le génie de Hugo.
Charles Trenet aussi avait du génie (dans un domaine plus léger), il composait et écrivait ses chansons en très peu de temps. Elles n’étaient pas dénuées de qualités, la mélodie était souvent riche, mais ses chansons se ressemblaient toutes, il a cédé à la facilité, cela lui a rapporté beaucoup d’argent.
Raymond Devos a du génie aussi, mais là encore, il a cédé à la facilité, son génie s’est appliqué exclusivement au genre, qu’il a créé. Il aurait très bien pu appliquer son génie à autre chose, dans un autre domaine. Ou encore dans son propre domaine, faire autre chose, sans vouloir à tout prix jouer génialement avec les mots.
Céder à la tentation pour le génie est presque inévitable, il lui faut faire beaucoup d’efforts pour ne pas qu’il n’y succombe à chaque occasion.
Il y a enfin pour conclure, le génie génétique, mais cela est une autre histoire.