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Sériatim 1 - [in "Seriatim"]
Sériatim 10 (Patrick Cintas)
[E-mail] Article publié le 21 avril 2019. oOo La chanson a du charme au creux de ton épaule. Ces nuits valent bien toutes les nuits Que le couple a passé depuis que l’Histoire S’est installée dans tous les esprits Pour enseigner des tas de choses utiles Et même quelquefois agréables /comme ta chair encore tiède / car Tu n’es pas tout à fait morte.
Au fond, nous ne savons plus Très bien ce que nous voulons.
…ce n’est plus la faute À Voltaire ni à Rousseau. Les Illustres ne se vendent Plus au marché de la Joie.
Pourquoi (au fond) Ne pas travailler En vue d’un week-end ? Travailler ensemble Pour que la joie Ne soit pas seulement Un rêve à partager Avec d’improbables Sirènes ? Comment C’est si facile ? Avec Toi ou sans eux. 52 fois par an Et même plus Si les congés Sont payés… ? Pourquoi, mon fils, N’adhères-tu pas À ce courant de pensée Qui vaut bien toutes Les idéologies À la mode ? Surtout que, Mon fils, ma créature, Tu te trompes de sens…
Ce frisson qui menace la tranquillité Acquise dans l’action qui fait le Poème. Suffit que tu me parles de toi et de Tes soumissions. Comment ne pas Entendre tes « trop justes propos » ? Les rues sont si connues de tous ici. Ces noms le sont moins, je crois. Personæ d’un théâtre dont l’auteur Est né de la croissance urbaine. On ne traverse pas les murs si Ce ne sont pas des vitrines et Je n’ai pas la mienne à l’étalage. Où vais-je encore à mon âge ? Faut que j’y songe / un révolver Ou quelque chose dans le genre / Un cenote creusé par moi et non pas Par quelque phénomène géologique. Une conception nouvelle de la disparition. Sans chien pour être charmé ni objet D’un amour pas très catholique. Les origines n’ont plus le sens / vu D’ici / que mes vieux écrits leur donnent Du moins quand je les relis ô saisons ! Et demain est un jour tranquille et Ensoleillé par la prolifération humaine Qui pollue et qui charme à la fois ô Politique provisoire du bonheur avec Ou sans compagnie pour recueillir Les mots du festin et du désir qui S’ensuit / Faut que j’y pense merde !
Item, mes boîtes de conserves vieilles De plus de soixante ans — à celui ou Celle qui aime la rouille des surfaces Nostalgiques — les étiquettes déchirées Aux endroits qui renseignent sur La valeur énergétique du contenu.
Item, mes habitations à l’autre bout De ce monde hérité de papa, masures Et appartements donnant sur le front De mer, les amies de passage et l’enfant Recueilli sur le quai avant le « grand départ » / toutes sortes d’adieux avec ses bastingages.
Jamais plus grand livre que ce recueil Qui fut lu une nuit d’akelarre dans les dunes Que la Lune éclairait comme si désormais L’ombre avait plus d’importance que la lumière À nos yeux / cet apprentissage du livre conçu Comme un « sujet d’art » / dit-elle en maniant Le désir / « nous aurions encore le temps si Tu consentais à te taire » / et plus loin sur La plage d’hiver les barricades du pouvoir D’achat dressées par les fils et les filles De ceux qui ont cru aux succès de leurs Vœux / spectacle des filles nues se jetant Dans l’écume maintenant blanche de lumière. À l’autre bout de cette existence à rebours, Les clés du langage données par la ville Un jour de pluie et de vent / les ponts Traversés par des piétons pressés d’en finir Avec la grève / et le coup de fusil qui sonna La fin des festivités / un guardia civil auréolé Montait en même temps vers le ciel étoilé. Jamais je ne m’étais senti aussi heureux Qu’avec toi / nous reviendrons l’année Prochaine : et le livre sera enfin publié.
J’aime l’omelette aux anchois Derrière la porte aux petits carreaux Portant la trace de nos mains d’enfants.
Club des parodies les plus folles. Un bigophone joue l’air de Micaela. Joues parfaitement rouge bordeaux Du ténor qui ne veut pas danser avec elle. Les uns entraient par la fenêtre. Les autres « étaient déjà là. » « Il faut maintenant dépasser Ce stade, » conseillait le Roi. Et la Reine m’appartenait. Depuis longtemps je suis Le jouet de cette monarchie Du Verbe. Je me souviens Seulement d’avoir été très seul. Comment pourriez-vous me comprendre ? Nos chemins se sont séparés à l’âge Où le citoyen n’est pas encore un électeur. Les uns ressemblaient à leurs pères. Les autres ne voulaient pas être reconnus. Prenez la reine par la taille (qu’elle a souple comme la Chienne qu’elle est) et tournez Sans vous soucier des inquiétudes Du Roi qui n’est pas votre seigneur, Du moins pas tant qu’il prétendra L’avoir baisée avant vous, poètes ! N’importe quoi pour vous asseoir, poser L’énorme cul que la poésie vous a collé Dans le dos / et n’attendez pas les bavards Qui veulent changer la conversation en Filet de pêcheur / coussins de soie au chou / les usines crachaient leurs employés Dans les rues de la ville et les commerçants Grimpaient aux murs par les tuyaux de descente De gouttières ô chats errants du désir réduit À l’envie / des filles jouaient à se diaboliser. Un pas en avant, deux sur le côté Droit, un en arrière et on reprend La figure à son début / deux fois / puis la copulation est enseignée Dans les meilleurs stades du Royaume Ô république des triboulets crucifiés ! Vous ne ferez plus rien par hasard, ô poètes ! Cousez, coupez, pliez, anything, à l’encan ! Plongez la tête la première dans la complexité Toujours évolutive : chronique si vous voulez. Ce sera toujours mieux que de vous laisser aller À fabuler dans l’absurde de papy / grandissez Dans le choix / imposez-vous par calcul / visez La signifiance / donnez un sens à votre vie ! (et n’oubliez pas l’guide, que ça vous plaise ou non !)
Quelques beautés inavouables dans les marges De la spontanéité. Les pans d’usine aussi bien Que les horizons des chemins tracés dans la Verdure et les champs. Toujours des animaux Au volant. La comédie de l’homme en larmes Depuis saint Pierre. Ces hommes qui ne donnent Pas des enfants à la patrie qui les a vu naître Ou qui leur a ouvert les portes. Creusez votre Trou. Des territoires infinis à votre disposition. Un enfant par borne. Vous arrivez enfin au bout Du monde où il n’y a plus de saisons. Plus rien Ne pousse que vos enfants. L’un d’eux est beau. Vous ne pouvez pas le nier. Vendez-le à l’État. Enrichissez votre lopin avec cette substance Mirifique. Étonnant voyageur. Dans les fours Vos cadavres se consument lentement, au Rythme que leur impose la justice des hommes. Je ne sais pas si j’ai été aussi clair que je le veux…
Quelle beauté les soirs d’été ! Sur la terrasse À Málaga. Croquant les buñelos de la Passion. Leurs guirlandes au-dessus des têtes folles. Les chants venus du fin fond de l’Arabie, Langue connue de tous. Au bar Fatima on M’expliquait que tuer est une fonction Aussi belle que l’affine. Identités remarquables Des visages. Nous ne tuons que par plaisir / Alors pourquoi tuer l’homme qui ne se mange pas ?
Ma tête s’est enrichie de toutes les grimaces du monde. Jetez la chèvre et battez l’âne. L’après-midi avec la mort pour seule compagne Dans le confessionnal de sable et de soleil. L’ombre vous parlera enfin. Un verre à la main Et la parole avec le dieu qui est le vôtre. Nous en avons tous un. Derniers vers de Laforgue avant la mort Programmée de l’intérieur de son corps Par l’algorithme de la maladie chronique et évolutive. Cet in progress plus ou moins longtemps Et dans les limites du possible ou en tous cas Du Connu. Les fontaines sont vivantes.
Masques mortuaires de l’illusion comique. Leur phosphorescence de luciole. La langue s’y agite plus qu’elle ne parle. Ne réclamez votre dû qu’au personnage qui l’incarne.
Et ainsi pendant si longtemps Que les horloges ne savent plus Qui les a inventées.
Le club des parodies avec sa claque joyeuse Et hypocrite. Que voyez-vous dans le trou De la serrure ? Les jambes fines d’une fille Qui n’a plus l’âge de se donner à l’homme.
Masques de plâtre ou de papier mâché. Théâtre sans rideau autre que la nuit. Qui a inventé le temps ô ma pucelle ?
Je ne le dirais pas au temps si je le savais. Beauté d’un seul vers de Villon à l’appui. Rare les artistes dans ce domaine. Baudelaire encore. En costume de Poe Ou dans le sien : drôle d’histoire Inventée pour troubler le bourgeois Qui préfère Fanny. Du moins hors du lit.
À qui appartiennent ces mécanismes De la précision et de la logique ? Je ne le dirais pas aux hommes Si je le savais. Libre à moi D’en inventer le personnage (je réfléchis tout haut) Et les acontecimientos nécessaires À la compréhension de la chose publique.
Lits et parfums qui en disent long Sur les goûts d’une époque En matière de plaisir.
« Ce que tu peux être difficile à déchiffrer ! » Pourquoi pas un enfant s’il ne porte pas mon nom ? À quel point ce nom n’est pas le mien…
Rentré tard en fin d’après-midi, Fatigué par la distance parcourue Et par cette agitation tournoyante Qui nous a accompagnés en route.
En route vers quoi ? L’estomac Encore pétaradant sous le soleil Et les rares frondaisons de l’été. Aliz composait des vers en chemin.
Chemin de quoi, vraiment ? Au croisement des paysans Ces regards d’un autre temps Que nous n’envisageons même pas.
Qu’ont à faire nos visages Dans cette petite histoire De la famille au repos et Qui ne veut pas s’ennuyer
D’elle-même ? Nous revenons Avec les trouvailles des enfants. Rien ne m’amusera plus jamais Si je dois continuer de les aimer.
Comme la poésie est belle Quand le poème n’est plus là Pour se passer d’elle !
Nous avons oublié un chapeau Sur une chaise inoccupée. Ah ! que le vent l’emporte Plutôt qu’un de ces gilets ! Et qu’il en coiffe un angelot De porcelaine chez ma sœur !
« Je n’ai pas été heureuse avec toi. » Quelle cruauté quand elle s’y met, La garce ! Nous avons des étés Reproductibles, il faut dire…
Qu’est-ce que je suis Si je ne suis pas Ce que j’ai voulu devenir ? Naïveté des questions posées Lors des examens de conscience.
Nous avons aussi des plages de sable si fin Que nous en mesurons l’âge et l’érosion, Dit-elle pour meubler une conversation Qui n’avait plus rien à voir avec notre amour.
Nous possédons des tas de choses agréables. Et nous redoutons les effets de l’enfer mitoyen Sur cette espèce de bonheur dont nous connaissons Le prix, bien sûr. Ouvrir l’encyclopédie des choses Et en chercher la poésie à défaut d’en pouvoir lire Le poème. Nous ne mourrons pas ensemble, sauf Par accident. Dans un avion par exemple, voyant L’autre crier comme au premier jour et criant Soi-même sans aucune retenue. Il n’y a rien De plus désespérant que le désespoir. Et je pèse Mes mots. Nous avons acheté l’ennui dans une boutique De prêt-à-porter. Ça nous va bien, de nous ennuyer Mutuellement. Ce qui n’interdit pas le plaisir, tiens !
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