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Seriatim 3 - [in "Seriatim"]
Seriatim 3 - promenant ses personnages au bord du canal... (Patrick Cintas)
[E-mail] Article publié le 24 janvier 2021. oOo [promenant ses personnages Au bord du canal où la noyée Abandonna sa chevelure, Laisse tomber ses gouttes Avec le ciel, comme chiens De compagnie ces noms Qui appartiennent à tout le monde.
Trouve assez d’herbe pour se coucher. Quelle nuit d’été encore ? Et de quel songe qui fut ? Pas même une barque Alors que d’autres possèdent De quoi franchir le Sud.
Entre l’écluse et le vieux pont, Ces hôpitaux que déserte la foi. On n’entend pas le bruit des eaux Ni la voix des locataires.
« Tu aurais pu venir avec ton chien, mais tu n’as pas de chien ni le temps d’en écrire le temps » Sous l’arbre à moitié mort, Les feuilles de l’année dernière, Écrites sans le chien d’usage.
Bonjour à la petite fille Qui fut l’amante en poésie. Salut aux oiseaux des toits Comme si le ciel était bleu. Ça traîne la savate en halant. Et ça vient de la périphérie en saut. Bonjour aux pieds dans l’eau Et au fusil de pierre moussue.
Que chercher d’autre sinon le bonheur ? Lazarille trouve de quoi alimenter Son imagination : rigoles toujours Et des foisons de suppositions. Bonjour à la carpe à fleur de l’eau.
« Nous ne sommes pas venus pour rien » Il faut bien s’en remettre au rythme. Aux annonces répond par le feu. Tignasse des algues maintenant, Voilà ce que tu es devenue, noyée !
Quel voisinage que cette bourgeoisie Flottante ! — Qu’est-ce que vous Regardez ? / À part les filles du passé Et celles qui fuient l’Histoire… rien. Je pensais revenir sur mes pas.
Songe un instant à traverser, nu. Puis agite une casquette NY. Sent la froidure des jeunes hivers. Le tissu a vieilli avec la peau. « Je suis chair avant d’y penser »
Au théâtre on ne joue plus. On s’y donne en spectacle. « Qu’est-ce que j’ai raté ? » Tentative de dialogue avec Quelque inconnu en rade. On ne boit pas le pot sans Créancier « pourquoi vivre ? »
On voit ça dans tous les poèmes. Ça trinque avant de boire cul sec. Enfumant les lieux de végétation Comme si le ciel n’existait pas Ou qu’il fût simplement oublié. Roule ta bosse d’atmosphère Et de profondeurs telluriques !
Gerbes à huit heures des travaux De rénovations ! Cris des scies Dans l’acier ! Les « ploc » dans L’eau verte. Ça flotte un instant Ou ça coule à pic. Du linge au vent Sur le roof. Bras nus au travail Du rêve en cours d’extraction. Pas un enfant sur le pont, pas Un chien, feu d’étincelles comme Jaillissant d’un enfer à venir.
« Qu’est devenu ton chien errant ? » Plus loin les feux conditionnent, Les trottoirs laissent couler leurs flots. Les rideaux grincent au vilebrequin. « Devenu… ? Tu veux dire que j’étais… »
Surface non réfléchissante des eaux En cause. Point de miroir pour se voir. Impossible calcul des profondeurs À atteindre en cas d’obsession. Plus loin on sollicite l’écluse Et tout est à refaire. Connais-toi.
« Iras-tu au théâtre ce soir ? Río et Blanco ne jouent plus. Mais le spectacle vaut la peine d’être payé ! Je t’attends au guichet. Ma robe de soirée etc. »
Quel matin n’est pas celui de la nuit Plutôt que le cheval de volée du train Train quotidien ? Questionne encore Des passants. Nulle réponse en vrac. « On te prendra pour un fou » / nuit Comme la roche de Thomas, obscure.
Balade ses nœuds en marin avisé. La savate au vent, cheveux noirs Des suies de l’hiver à force de toits. « Il n’y a pas de ciel sans un dieu gagné sur la magie des lieux » Cut-up des trajets / romances Des bassins en enfilade / rails Vers les pays / aux alpes vaincues Les vents de l’âge en fusion / « Ne reviens pas si c’est pour redire » / sans chien devant soi.
Au concret des doutes n’oppose rien. « Río et Blanco me sont venus à l’esprit alors que je taquinais le goujon en solitaire » / mais quand il s’approche Du théâtre (le lieu) : il vomit son vin Et passe pour un « homme de trop »
Quel rossignol ne le sait pas ? Quelle invention pour plaire Ignore les tenants et les aboutissants Du principe matinal ? Il s’extrait Non pas de la nuit ni du rêve mais DE L’ATTENTE :: : xoco ona au sel Des embruns : boit dans les creux D’un coquillage tenu par des mains Expertes / mâche la feuille inerte.
Ainsi coule la scène. Sans pont Ni feux. Témoin : le voisin ami Des amis. Il trottine pour gagner Du terrain, éviter les écueils Du roman, mériter une invitation À désirer le même objet, marcher Sans boussole et trouver le coin Aussi agréable que possible. Au
Diable les tenants de l’architecture ! « Comme je comprends ! » / ardoise Grasse de doigts / au canal revoit Le Sud des égarements narratifs Et d’un trait rature l’espace ici : Guéridons aux chaises en rond Et vides : la viande salée taquinant Les extases du vin : « je sais qui j’étais avant de vous connaître ô imparfaitement je le reconnais ! »
« Je vous raconte ça comme ça ! » Préfère le verre transparent au vitrail. La lumière vient de ses propres yeux. Projette les miroirs absentés, excusés Les miroirs ponctuant les surfaces ! Trinque avant d’en dire plus au môme Qui se prend pour un homme ou Une femme : comment savoir qui On aimera avant de le ou la perdre ?
Puis le jour s’installe avec les pays, Les étrangers, les inconnus et midi N’est pas plus midi que l’heure fixée Au fronton des palais où œuvrent Le larbin bienheureux et la limace Qui s’en veut : « vous oubliez votre chien : » Les chaises ont quatre pattes, Mais elles ne voyagent pas. « Avant j’étais sensible aux changements : maintenant, je vis au jour le jour : j’en ai marre de la solitude ! Ça ne se soigne pas autrement que : par l’acceptation d’un pieux mensonge : finissez votre verre et allons-nous-en ! » coupez.
La campagne un matin d’automne, les alouettes Et les mottes de terre figées par le degré zéro Du réveil, la langue aux chaleurs du verre avalé Sur le seuil, regard pas plus loin que la brume : Sachant que la moindre blessure change la donne. Les objets accumulés par pur esprit pratique, derrière Soi, ces accumulations méthodiques sans enfant À la clé, n’ouvrant la bouche sur les autres que Pour parler de soi : à deux doigts de la furie, toujours Amer malgré d’incontestables réussites poétiques / Enfin seul le fusil à l’épaule au service de l’existence Encore gagnée depuis hier : dans le viseur les larbins Du Pouvoir et de l’Ordre qu’il légitime sans pitié Pour les mauvais payeurs et les malchanceux : guerre Personnelle aux portes de la mosquée ou de l’asile / Sabrant le champagne aux nouvelles / loin, en rêve, De la domesticité et de la production, en silence Pour ne pas éveiller les soupçons, voire la haine / Ce matin d’un automne grisollant, branches dénudées En contrejour, chien patient sur le même seuil, poches Bourrées de munitions, la langue encore tannée par : Les habitudes du réveil : « qui se méfie de toi ? » Les putains au service de la politique et du journalisme Se maquillent derrière les miroirs : « je suis venu te dire » L’œil ensommeillé des témoins dans les fenêtres closes. Nulle angoisse en saison, pas même une douleur en phase Avec l’alchimie en jeu, à l’intérieur le feu est à la joie : « le courage des flics » / « l’abnégation des rond-de-cuir » « saisissez l’idole quand elle est encore chaude » « pâleur de la boulangère » « les gosses sont tout ce qui nous reste » Entre la masse sociale et le désir de différence maintenant Clairement associé à la mort : « veut faire des joliesses surréalistes sans surréalisme » / ou pas encore levé Le soleil signe d’unité : la boue cristalline et les traces Du gibier : « je vous emmerde tous ! » mais sans rire Devant l’écran ensanglanté de flic / joyeux sans excès / patient comme l’hiver qui attend son heure de feuillage / des joliesses, des trouvailles, des paillettes de grammaire Et de jambes en l’air / juste de quoi nourrir ce vieux corps À la dérive : debout sur le seuil venteux : les volets secoués Grinçant claquant : « tu ne tueras point » / ici (pense-t-il) Je suis moi-même : j’habite les lieux de mon invention : je Suis prêt à défendre ma solitude : quitte à tuer un enfant : Avec ou sans Matzneff / chaque minute assiste à sa perte :: : Nous n’irons pas plus loin Que cet arbre rencontré Au hasard de la promenade. Nous avons connu les limites.
Maintenant le souffle est cadencé, Sans préciosité de circonstance. « n’oublie pas de prendre de quoi Éclairer cette obscurité matinale »
S’approcher des paludes du temps Et retrouver ce qu’il était avant Que tout nous soit supprimé : Voici l’heure des superficialités.
« as-tu cherché à entrer dans l’Histoire ? » ou simplement T’es-tu évertué à ne pas mourir Sans savoir son fin mot ?
Le chemin est celui du retour. Chaque matin revient l’après-midi. À l’intérieur le feu est aussi vivace Qu’hier, la nuit a veillé tard cette nuit.
Heureusement tu n’as pas enfanté La poésie pour les enfants, ni les contes Illustrés, ni l’éducation nationale ! Quel bonheur presque d’y penser !
Il te vient à l’esprit que tu sais chanter Sans soumission à Pythagore, le fusil À l’épaule, oyant les froissements de poils Et de plumes dans la complexité
Topographique, plan en tête, chassant La pluie de la veille comme une mauvaise Idée du Monde, les dieux au rendez-vous De la transparence et du récit en cours.
« nous ne sommes plus ce que nous avons été » Martèle l’écran têtu : mages de l’information Au service de l’ordre : « sans ordre pas de pouvoir et sans pouvoir pas de séparation » Ordre magique Donné par des fous Que le Désir emporte Avec l’idée d’océan.
« quelque chose au fond de nous » (désignant la poitrine Ou le ventre à défaut Du regard) « là, ici »
« depuis quand la poésie… ? » Suivant le chien qui sait Où il va / le même canal Mais à l’ombre des platanes.
Disposant ses personnages Sans se soucier de leur langue, Effraie les ailes d’un oiseau Qui n’a pas connu la cage.
« depuis quand je ne sais pas » Personne sur le rivage clos. Pas un clapotement de coque. Ni de chevelure parmi les joncs.
« ce ne sont pas mes lieux, les vôtres » dit-il sans y penser. Immobilité des ombres projetées Dans l’assistance prémonitoire.
« il fut un temps sans poésie » Qui n’a pas connu le bonheur À midi ? quand la table est mise Et que les autres enfants existent ?
Bruissement de feuilles et d’insectes Dans les parages de cette enfance Qui métaphorisait les papillons Jetés à poignées dans la journée
Au travail : chien distrait par la fleur ? Autant que possible les anecdotes Réduites à leur sens : « arrêtez-vous ! » Et le jouet s’enfuit sur la rivière.
Bête destination des couleurs en jeu. « je ne savais pas que la poésie… » « épouse l’air faute d’azur » Nous Ne revenons pas sans y penser un peu.] RÍO Gesticulant au milieu de la scène, hystérique et oiseau. Mais qui c’est çui-là ? Mais qui c’est çui-là ? Mais qui c’est çui-là ? Mais qui c’est çui-là ? BLANCO Interrompant Tu vas te rendre fou ! RÍO Tu l’as déjà dit ! BLANCO Rajustant la chemise de Río C’est le « Monde… » RÍO Dubitatif Qu’est-ce que tu en sais… ? BLANCO Presque en colère Pourquoi l’avoir laissé entrer ? RÍO Nera arrive à 14h par le Sud-Express Elle a voyagé de nuit. En couchette. M’a réveillé sur le coup de 3h. BLANCO La sonnerie de ton smart est insupportable ! Surtout à cette heure ! Moi aussi je voyageais ! Je n’ai pas vécu le matin qu’il a mis en poésie… RÍO Ah parce que pour toi c’est de la poésie… ? Le « Monde » pénètre par effraction dans « notre monde » et tu t’agenouilles comme Au théâtre… ! (rieur) As-tu appris quelque chose « au moins » ? BLANCO Rien sur Nera… Il s’avance. La foule recule. On voit bien qu’il a perdu de vue Celui qu’il appelle « le forastero. » J’ai peur de ce que la peur Peut inspirer à mon enfance. RÍO Angoissé, se touchant le cœur Elle est toujours là… Après tant de festin et de désir, Toutes ces années passées à le dire, C’est « là » que je la retrouve, mais En pièces… BLANCO En pièce… ? RÍO Amer, mais ne s’adressant pas à Blanco Je fais entrer qui je veux. Je suis peut-être seul avec Heu… disons… ces « passants » BLANCO Révolté par cette réflexion « absurde » Parce que je n’existe pas peut-être… ? RÍO Renonçant Si, si. Tu existes. Tout le monde existe. Je ne suis pas comme ça… (réfléchissant) Il paraît qu’on le devient au dernier instant. BLANCO Quoi ? Seul ? RÍO (pas envie d’ergoter) Ce n’est pas ça la solitude ! BLANCO Pédant Comment appelles-tu ça… ? RÍO Pas de mes vœux en tout cas ! Il rit en cherchant son arbre des yeux. Rien sans cette société inévitable Et sans cette idée de la mort que nous avons Il désigne un point sur sa poitrine. « là » / à deux doigts de l’enfance, incalculable. (se reprenant) Nous aurions tort de ne pas les écouter… BLANCO Tu veux dire : de ne pas les laisser parler. Hum… Pas moyen de les inviter à trinquer au bastingage ! Je ne suis pas radin, mais ma bouteille est sommaire. RÍO Je ne trouve pas « ça » très poétique… BLANCO Ça ne l’est pas ! C’est lui le poète ! Il le sait. Le cherchant Mais ne le trouvant pas. C’est comme jouer aux dés ! Lances-en un en l’air, il retombera À l’endroit même prévu… RÍO Par qui ? BLANCO Haussant les épaules Qu’est-ce que j’en sais. Moi ? Je n’étais pas né quand c’est arrivé. Mais on m’en a parlé, j’avais 15 ans Quand on a cessé de me nourrir Au sein / j’en ai conçu… RÍO Joyeux Oh ! Je sais ! Moi-même (mais dans une autre enfance…) BLANCO En es-tu si sûr… ? RÍO Pas vexé Maintenant que tu le dis… Va coucher son trouble contre le mur. Il accepte une grappe de raisin Et en croque les grains un à un Pendant que Blanco en cherche d’autre Sous les pieds. (mâchonnant) Tu ne trouveras rien. BLANCO Irrité Tu ne sais même pas ce que je cherche ! RÍO Une fille… BLANCO Nous attendrons le Sud-Express de 14 h précise. RÍO Il n’y a jamais eu de Sud-Express à cette heure-là. Crache peaux et pépins. BLANCO Tu en doutes ? Maintenant que tout est joué Tu te mets à douter de ce que je t’ai annoncé ? RÍO Nous n’étions que deux à ce moment-là… L’argument fait mouche. Blanco trésaille puis faiblit Et cherche l’appui d’une épaule. Tout le « Monde » recule dans le noir. Je ne dis pas ça pour te faire mal… BLANCO Je n’ai pas mal ! Je sais me tenir Quand il le faut ! Tu le sais bien : « Tout existe même ce qui n’est pas Encore arrivé… RÍO …à l’heure ! » En attendant, j’ai peur d’avoir peur. Je ne redeviens pas enfant, pas encore. (inquiet, voix faible) Et si je n’avais jamais aimé personne… ? BLANCO On en est tous là, allez ! Pose la question À l’enfant... RÍO Mais c’est à lui que je la pose ! BLANCO La page n’était même pas transparente… Tu sais… comme la feuille morte depuis L’année dernière… cette fragilité De la structure nue… la poussière sans Les cendres… au fil des balladas revues Et corrigées une fois de plus… l’enfant Ne pense qu’à jeter sa ligne dans le ru. Est-ce pour « passer le temps » ou : Pour revenir avec de quoi alimenter Sa légende ? Maintenant les branches Raturent le ciel devenu gris ou blanc. « Que va-t-on faire de toutes ces feuilles, Papa… ? » Il n’y a que des têtards Dans cette eau morne… Demain, Troque la canne pour un bocal / Invente-toi une raison et reviens Dans ton lit pour y rêver d’amour. RÍO Avalant le dernier grain À force d’attendre… Si rien ne vient… (cherche) C’est l’idée d’un refrain… Mais un refrain sans rimes… N’est-ce pas… ? Sans le jeu Qui rythme mieux que le verbe … T’ai-je interrompu, mon bon Blanco… ? BLANCO J’ai vu pire… […] Ah non ! Il recommence ! Le train arrive.
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