Ipomée

Dans la paume du dieu posée

 

Orphée, orfèvre fiévreux

Par des nuits étoilées

 

Tout cela

Et plus encore

Par les nuits accordé

 

Fébriles tes mots qui s’agitent

Sous la langue vipérine du fier orfèvre

Voûte céleste lentement déchaîne les étoiles lestées de brume

Rudes complots à même le firmament

De longtemps ourdis dans les plis des toges laineuses des dieux

 

Haineuse langueur partout résonne

Et se désole l’amant esseulé qu’égare

Tant de fougue bavarde

 

Fourchues les jambes de la déesse innommée

Qu’un complexe drapé préserve

Oh toi seul le sait 

Qui jadis fus dans son intimité !

 

En ces temps où déambulent nues

Par les rues

Des verges affolées 

Griffes du Destin déchirent

La contrée

 

Et fèves des mots à renouveler s’envolent

S’en vont là convoler dans Morphée éveillé

 

Ailes poudreuses du papillon en haillon se délitent

Redeviennent roche de pure poudre blanche

Gypse délicat de L’Isle sur Sorgue

La bien nommée

Qu’aucun ciment sciemment n’égale

Ah vigoureuse blancheur 

Fit toute ta renommée !

 

Approche donc !

N’aie pas peur !

A toi l’honneur, Orphée !

La Provence t’accueille

En miettes ta lyre en délire !

Empoigne la truelle 

Que le dieu des lieux t’a réservée !

 

Le muret aux murmures t’attend

Saxifrages déjà questionnent l’horizon dédoublé

Par ta présence insigne

Et les murmures convenus, de toutes parts, grandissent

A mesure que mûrissent les blés

Dans ta mémoire emblavée

 

Ni d’hier ni d’aujourd’hui

La peine qui est la tienne

Dans Avignon déserté

 

L’or des vignes rousses

Sous l’été déhiscent

Serments plantés en rangées de sarments noueux

Crépitent sous ton regard

Promesse du vin

Ne tient donc qu’à un fil

Et le plomb lentement

Redevient ce fil d’or qu’il n’a jamais été

Qu’Arachné déchaînée de bon cœur avec entrain filait

Ah rude comparse qui aux temps jadis s’avisa de tapisser étroitement

Les murs de ta chambre noueuse

Dans Hypèdes évasée

Fleur de tiare

A la rose rouge accordée

 

Fil à fil recompose

Le filet des jours

A la mer violette

Voué

 

Athènes s’étiole

 

Il est temps pour toi d’embarquer

Pour des terres entièrement nouvelles

 

Jean-Michel Guyot

4 novembre 2023