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![]() oOo De Semblables Impuissances
« Je retrouverais le secret des grandes communications et des grandes combustions. Je dirais orage. Je dirais fleuve. Je dirais tornade. Je dirais feuille. Je dirais arbre. Je serais mouillé de toutes les pluies, humecté de toutes les rosées. » (Aimé Césaire, Cahier d’un retour au pays natal)
Pauvre soleil corrompu Nos plantes de pied durcies À ton langage sidéral
Ternies nos sombres silhouettes ; Aux cimetières horizontaux couchées Creuser Chuintements Troubled Water Tels abîmes qui violent nos Buissons avilis
Applaudissements
Creuse puisatier Jusqu’à l’os Après la saignée nos lambeaux de prairie atrophiée Au festin des loups habitués
Nos schismes d’incurie
Sommeil ; indissolublement Mots impuissants Qui disent le Silence Qui dit le poète
En sa religion -
Désert de vérité... Où la soif est de marbre
Poète A demeure Quelle retraite ? Ces enfants qui secouent Ta juvénile mort putrescente Aux hommes
Trahi comme une absinthe S’enivrant d’elle-même, A part soi Le son de nos vaines diatribes Ô ce monde que tu n’habites plus !
À toi seul Poète solitaire Fourmillement de vivants Au mutisme ennemis
Accourez ! Terrassiers ! Pour que jaillisse l’Ombre lascive Du fond des abysses Une aperture Cette voix du Néant
Espoir mutilé Toi Noir Obscur Invisible Réfugié Sans refuge Refuge des Maux Anciens
Creuser cette houle Du désir Sauvage Noir Sauvage En cette aurore pâle ?
Visage tuméfié De cet orgueil interdit En cette blanche écume T’emportant Te roulant
Écoute ce roulement Au loin Ces lointains soupirs De ton peuple perdu Tam-tams Sage et virevoltant ; Jusqu’à la démence Toute de chair Danses des mots, Chants des mots, Rires des mots, Tes mots qui se lèvent Tes mots qui s’enivrent De fraternité, De rhum, Tes mots sexe Tes mots qui enlacent, Qui embrassent ; Tes mots qui flagellent tes membres Qui fouettent ta docile mélopée
Point de Hauteurs ; Mais des mots de sueurs frustes Mais des mots du ventre Des mots ceints de barreaux Des circonvolutions de ton âme ; Mais des mots des entrailles Tapies aux profondeurs Qui soudain frappent aux portes De ton purgatoire ; Qui soudain fouillent, Qui débauchent ton cœur malhabile Qui font l’Amour à cette tienne Terre
Mais des mots morpions suçant ton sang, Ton plaisir oublieux, Fustigeant ta paresse Des mots qui n’en sont pas Des mots-Être, des Traîtres-de-Mots Des mots-Substance Des mots-Sève
Nulle abdication À ta noirceur vespérale-
Ton noir butin disputé Tantôt au Blanc Jour
Tantôt à la Noire Nuit Nuls subreptices à ton soleil de minuit Aux lois contraires, Ta condition condamnée
Tes vieux os de pauvre Déporté Translaté Toi Noir Muscle dilaté En ta disgrâce Aujourd’hui comme hier Tu as le goût pestilentiel Du cadavre flottant ;
Reçu ta dernière toilette De ce Gouffre Amer Où tu échouas naguère Toilette d’Immondices Se nourrissant de l’excès De ta nuit ancestrale Te Souviens-tu ?
Que n’as-tu des Tout-terrains Des Four by Four Des Hammers En tes bosses pustuleuses Pour fuir... Ne fuit que le vent Pour un ailleurs à écorcher ; Ne fuient que ceux dont le ventre Paraît-il empli d’essence Longtemps raffinée
Il y eut bien des chiens Qui ont eu plus De chance. Des BB phoques En leur temps
Réfugié Torrentiel Dieu bénisse le Ciel Dieux des Stades municipaux À la bonne fortune ; Toujours Ces autels du pécheur Qui limitent l’étalement De ton corps, De ta détresse, De ta misère noire
Risque Contagion. Va Dispute à tes frères La gamelle du déraciné ! Les loups se mangent en famille... ... Que la nuit t’apparaisse En dague salutaire Pour que tu pagayes, tu pagayes, Tu pagayes de présence À toi-même
Que la foudre te frappe Ardemment Chapelle Luisante tel un rayon translucide Pour t’empêcher d’oublier T’empêcher de rêver A l’humanité Qui t’oublia Un blanc matin Sans couleurs
Zélateurs, tes Semblables ? Honnêtes serviteurs du Capital Qui prient le dimanche Qui ont donné à la Justice Le doux visage de l’Aumône ;
Qui te rouèrent de coups Bas Te voilà donc de retour En bas, Ombre en dessous
Toi qui crus que leur blanche Lumière Vaut bien plus que tes sombres lucioles
Eux qui te laissèrent ton grossier châlit Aux clous dressés En sentinelles de ton agonie
Te sacrifièrent Rite séculaire
Ta Peine Capitale Ton seul Capital Ton seul Bien qui tranche Le débat.
« - Toi noir drapeau en berne Debout et marche sans illusion De victoire Sans haine éphémère Avec ton ombre hideuse
Alors
Tu atteindras cette aube À pas comptés Que tu creuseras sur ton corps Raidi, Mais fier ; À l’affût De sa dignité
Toi Mon frère ... »
« Au bout du petit matin, une autre petite maison qui sent très mauvais dans une rue très étroite, une maison minuscule qui abrite en ses entrailles de bois pourri des dizaines de rats et la turbulence de mes six frères et sœurs » (Aimé Césaire, Cahier d’un retour au pays natal)
Brûlures incandescentes Mon frère, mon sang Tes flots Pour étreindre mes flammes Mon cri aux hurlements intérieurs
Te parviendra-t-il ?
Mon vieux Paris Paisiblement dormait Le pauvre- Et ta Nouvelle-Orléans Fredonnée au saxophone Ton jazz qui regorge ; Mon tam-tam de braises
... Les larmes de ton ciel Mes nuages de fumée Mes rats Aux recoins de mon âme accoutumés ; Mon bois vermoulu, Mes odeurs, Ma planète Saturnisme Embrasement Embrassons notre douleur ! Cette si fidèle amie...
Consumée Ma honte ; ma tête Basse.
Mon frère englouti Ta Louisiane Mon taudis Du numéro 13
Moi Poussière ; Poussière dans l’œil blanc Toute petite poussière Bientôt De retour en Afrique Nage mon frère ; Nage puisque tu es à L’eau, Ce que je suis au Feu.
Pittsburgh, 10 septembre 2005
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