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Oser le silence (1)
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 Article publié le 17 décembre 2012.

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il semble que plus le poète avance sur sa voie plus l’horizon de ce qu’il recherche s’éloigne jusqu’à se confondre avec ce qui serait l’expression d’une matière fuyante, à la différence, remarquable, qu’elle constituerait la réalité du noyau que le poète garde en mains pour le véhiculer tel un ballon à ne pas perdre même si en cours de route il modifie sa forme jusqu’à devenir méconnaissable. Une expansion de sa quête en devenir se ramènerait ainsi à une concentration qui, paradoxalement, pourrait tenir dans un centre de la grosseur d’une tête d’épingle. Ce qui s’étend est aussi ce qui se contracte. Plus la circonférence de la découverte s’étale plus l’amande pulpeuse au milieu s’alourdit. De là, peut-être, cet aspect silencieux, incompréhensible sous lequel se présente la quête. Une impression d’indicible pourrait n’être que du "en modification" capté à l’instant où il est déjà au delà de la ligne escomptée.

Le silence pourrait provenir d’une invraisemblance. Il résulterait de cet impossible entre ce qui de la marche en avant s’envole et ce qui s’appesantit, sorte de destination double d’une même flèche lancée, allant se ranger à la périphérie, là où tout est envisageable, et, au centre, sorte de puits, mise en réserve, épargne inaudible. Le silence ne serait pas l’expression d’une "panne sèche". Il ferait partie du déroulement de la création. Il aurait la vertu de prendre divers visages. Tantôt il ferme la porte à toute velléité d’un pouvoir de la part du scribe renvoyé à son impuissance, à sa conditions réelle de copiste à genoux devant une page blanche céleste sur laquelle jamais il n’inscrira quoi que ce soit. Tantôt il se présente sous la forme d’un vide gigantesque qui n’est en vrai qu’une rigole pas plus épaisse qu’un doigt que le scribe met des années à franchir comme s’il s’agissait d’un gouffre figurant dans les annales. Parfois il prend l’allure d’une porte, si son cadre reste visible la poignet pour l’ouvrir demeure introuvable, situation absurde, casse-tête insensé.

Parfois le silence se recourbe en un arc de triomphe que le scribe franchit les chaînes aux pieds, marqué au fer rouge, en position de soumission, de repentance, de révolte rentrée. De l’autre côté de l’arc il trouve un mot, un seul planté au milieu du champ de la lutte, main tendue unique à cinq pétales, il n’y en aura pas d’autre pour le tirer de là. C’est alors que le scribe ouvre la bouche et il en sort une onomatopée entre le cri de la bête et l’interjection humaine.

Le silence vient s’inscrire non en absence ou en échec à l’expression, il fait partie des outils qui serviront à excaver de la matière écrite des pans cachés qu’il laisse subodorer justement par sa présence assez insistante, taraudante, pour alerter le poète que quelque chose se passe précisément là où il n’entend rien.

Il se penche, sonde la matière de son bâton, réalise qu’elle sonne creux, soudain certain qu’en dessous un passage souterrain se dissimule quelque part, lointain peut-être, mais non inaccessible. Il lance alors son fil au plus profond de son silence, dans le puits de l’inépuisable...

 

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