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Séries spectrales et autres accidents
La raison suffisante

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 Article publié le 20 mars 2016.

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C’est curieux. Il s’agit d’une mention mal perçue, à la naissance de la série (1714).Mais Leibniz, dans sa Monadologie, n’emploie pas le mot « série » mais le latin « series »:Et comme tout ce détail n’enveloppe que d’autres contingents antérieurs ou plus détaillés, dont chacun a encore besoin d’une analyse semblable pour en rendre raison, on n’en est pas plus avancé, et il faut que la raison suffisante ou dernière soit hors de la suite ou series de ce détail des contingences, quelque infini qu’il pourrait être.Il n’y a pas de faute d’accord, contrairement à ce que peuvent laisser penser plusieurs éditions notamment numériques de l’ouvrage qui indiquent "hors de la suite ou séries". Gilles Deleuze, lui, ne s’y était nullement trompé.Le mot "série" ne sera recensé dans son seul sens mathématique que 51 ans plus tard par le Dictionnaire de l’Académie française Mais il est employé, dès 1708, par Varignon pour désigner le principe des suites mathématiques.Il est remarquable que Leibniz ait employé l’étymon latin plutôt que sa variante française. C’est dire qu’il y distinguait une spécificité que n’épuise pas le mot « suite » mais que ne pouvait pas exprimer un mot qui n’existait pas encore (du moins officiellement) et dont l’avènement pouvait susciter des réticences. Soixante-dix ans plus tard, Jean-François Féraud protestait encore bien vivement dans son Dictionnaire critique de la langue française :Pourquoi se servir d’un terme technique inconnu au comnun des lecteurs, quand il en existe un (celui de suite) que tout le monde connait ?On peut soupçonner Leibniz d’avoir fait preuve d’une extrême prudence en employant le mot latin « series » dans un texte rédigé en français.Mais à travers le mot « series » c’est bien « série »,qui exprime toute sa nécessité existentielle dans cette démonstration. Leibniz a choisi d’utiliser le mot latin pour décrire la finalité dernière des chaînes de causalité qui nous animent. La raison suffisante, dit-il en substance, est hors série.Voire.Ce qui nous importe, ici, tient principalement dans ce fait de langue qui voit poindre la nécessité d’un mot à sa naissance, même. Ce n’est pas seulement un cas remarquable « d’absence de la série » (le mot était bien attesté à cette époque et ne fut pas employé par Leibniz). C’est avant tout un témoignage précieux de l’émergence, entre 1708 et 1715, du signifiant « série ».

 

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